« The Musettes » c’est un réseau de femmes expatriées qui entreprennent à travers le monde… et surtout l’une de nos lauréates des Trophées des Français du Moyen-Orient 2024, Adeline Verdier Velten ! Celle qui travaille chaque jour à déboulonner les clichés et encourager les femmes entrepreneuses à la sororité, à l’emancipation, à la croissance et au développement de leurs projets. En chemin, il n’est pas difficile d’imaginer le chapelet de platitudes condescendantes auquel elle est confrontée, ou qu’on lui partage: un vrai catalogue estampillé « misogynie 101 dans le monde de l’auto-entreprenariat », sur lequel se rajoute le vernis spécial « caricature de la femme d’expat »!
Adeline étant Adeline, se morfondre sur ces reflexions archaïques n’était clairement pas une solution, et avec beaucoup d’humour et d’ironie, elle a choisi de retourner les clichés à l’envoyeur… à travers un « petit » livre très inspirant et au grand impact Expatpreneures: Les audacieuses globe-trotteuses de l'entrepreneuriat, une collaboration - parce que c’est son ADN - avec la graphiste Pauline Hargot-Thonon et tous les témoignages des « Musettes » qui ont croisé son chemin.
Lepetitjournal.com/dubaï : Quel cliché vous a fait « bondir » le plus lors de vos aventures d’expatriation?
Adeline Verdier Velten :"Ah oui tu vis à Dubaï, la vie bling-bling. Tu vois des influenceurs?", un classique… Et à une femme qui lançait son projet, on lui a dit "ça va ton petit bazar ça avance..?" comme si elle allait vendre trois cookies deux fois par an à la kermesse de l’école : ça me rend dingue! déjà, je leur dis: venez monter une boite dans un pays où vous ne connaissez personne, dont vous ne maitrisez ni les codes ni la langue, où vous devez comprendre l'administration, changez de pays et recommencez encore une fois à zéro… après on en reparle de ce "petit bazar"... !
Pauline Hargot-Thonon : Il y en a tellement ! Celui qui m’agace le plus, c’est l’idée que les femmes expatriées et mamans passent leurs journées à ne rien faire (ou ne penser qu’à leur bien-être). Entre la maternité et l’expatriation, j’avais l’impression d’être occupée 24/7 sans pouvoir dire exactement ce que je faisais de mes journées. L’énergie déployée est impossible à mesurer. Donc oui, impossible de répondre à la question “ Mais en fait Pauline, tu fais quoi de tes journées ?” Un autre cliché qui m’a touché, c’est celui de la maman parfaite au foyer, heureuse de tout gérer à la maison. La nouvelle Bree Van de Kamp….Celle qui reproduit le schéma familial traditionnel de ses grands-parents. Spoiler : ça ne me ressemble pas du tout ;-) ! Et bien sûr, le fameux : “Vous vivez dans une bulle d’expats ultra privilégiés, déconnectés de la réalité !” Une remarque toujours irritante, surtout venant de personnes qui n’ont aucune idée de la réalité locale et de la difficulté de trouver sa place dans une société où les enjeux socio-économiques sont bien différents...
Qui vous a inspiré le plus lorsque vous vous êtes lancée dans votre propre projet entrepreneuriale?
Adeline Verdier Velten : Quand j'ai commencé à réfléchir au projet The Musettes, j'ai rencontré plusieurs femmes qui s'étaient lancé dans l'entrepreneuriat. J'ai trouvé ça tout de suite courageux et inspirant. Mais si je devais en citer 2, je dirais une amie qui s'était lancé dans la relocation à Amsterdam, qui a été copiée, mais qui a tenu bon et qui s'est fait un nom et une entreprise dans le secteur. Et je dirais une femme qui a été dans mes premières interview, Marie qui a monté Uplifters (https://uplifters-edu.org), une ONG pour aider les employées de maison à gérer leur argent : Projet de dingue!
Pauline Hargot-Thonon : Sans hésitation, Margaux Motin ! J’ai toujours adoré son style, son humour qui lui ressemble tant, et son réalisme percutant. Ses dessins racontent des histoires avec une telle justesse… Pour moi, c’était la parfaite combinaison : trouver la phrase qui colle au dessin, donner la priorité aux personnages avant le décor, et tout ça avec une bonne dose d’humour. Et puis, il y a ma grand-mère, elle aussi illustratrice, qui m’a toujours appris à observer le monde autour de moi. Une vraie artiste dans l’âme. Côté inspiration entrepreneuriale, c’est plutôt Mathilde Cabanas (@mathilde_bisou) qui m’a ouvert les yeux. Elle montre qu’on peut combiner créativité et business, ce qui n’est pas évident pour beaucoup d’artistes !
L’humour, l’arme fatale contre les clichés ?
Adeline Verdier Velten : Évidemment ! Je pense que j'utilise pas mal cette arme. Que ce soit pour connecter les gens, pour faire passer un message, pour détendre une atmosphère...Humour léger mais qui retient l'attention, enfin j'espère (sourire) mais je l'utilise car c'est dans ma nature. J'ai récemment été coaché pour trouver mon "tone of voice", mon ton perso : et l'humour en fait clairement partie.
Pauline Hargot-Thonon : Oui, mille fois OUI ! L’humour, c’est mon arme secrète depuis toujours. Ça te permet non seulement de prendre du recul sur ce qu’on te balance, mais aussi de remettre les gens à leur place, tout en douceur. Tu les désarmes sans violence, juste en tournant leurs propos en dérision. C’est une manière élégante de se défendre.
La force des femmes entrepreneuses c’est?...
Adeline Verdier Velten : La résilience ! Si je ne dois en choisir qu'une...
tu ne peux pas être entrepreneuse sans être résiliente. On tombe souvent, beaucoup, mais on se relève.
Les femmes ont beaucoup de charge mentale en plus de leur business à gérer. Je ne dis pas que les hommes n'en ont pas, mais force est de constater qu'on ne réfléchit pas pareil : les femmes anticipent peut-être plus, réfléchissent et organisent beaucoup de choses tout en gérant leur business. Et gérer cette charge, plus apprendre à tomber et se relever c'est le combo de l'entrepreneuse (sourire).
Pauline Hargot-Thonon : C’est transformer une idée en véritable projet entrepreneurial. C’est avoir le courage de se lancer sans attendre que tout soit parfait. C’est percevoir les autres femmes comme des alliées, pas des rivales. La collaboration est essentielle : elle te pousse à aller plus loin et te donne l’élan nécessaire pour concrétiser tes projets.
Qu’est-ce que vous aimez le plus dans ce livre, votre page ou votre histoire favorite ?
Adeline Verdier Velten : Sincèrement tout, j'aime comment Pauline a mis en scène ces clichés (parfois vrais)…avant de le publier je l'ai montré à 2-3 personnes, et elles ont se sont mis à rire spontanément : rien que ça, c'était gagné ! Les femmes qui témoignent (dont les histoires complètes sont sur mon podcast https://www.themusettes.com/podcasts/) ont su saisir des opportunités, ont été résilientes bien sûr, et surtout ont cru à leur projet jusqu'au bout. J'aime l'histoire d'Alice qui a vécu grossesse et accouchement à l'étranger, sans son mari, dans un pays où elle ne maîtrisait pas la langue, en période de Covid, avec un sévère post-partum… et qui a su se relever. Mais mon petit coup de cœur irait peut-être à Coumba qui est vraiment parti de zéro : elle ne savait pas pâtisser plus que ça, son envie de pain au chocolat qui est le déclencheur de son histoire est géniale. Aujourd’hui elle a ouvert une boutique, et ses gâteaux se sont retrouvés dans une série suédoise diffusée sur Netflix! Incroyable mais vrai : J'adore!
Pauline Hargot-Thonon : Difficile de choisir une seule page, mais j’ai vraiment aimé celles qui parlent de ces femmes désorientées par l’expatriation, surtout quand elles se retrouvent sans emploi. Leur identité est chamboulée, et elles se demandent : “Qui suis-je, maintenant que je ne suis plus celle que mon boulot ou ma vie d’avant définissait ?” Chaque histoire entrepreneuriale racontée dans le livre est unique et inspirante à sa manière, impossible d’en choisir une seule !
À qui s’adresse ce livre?
Adeline Verdier Velten : À toutes ces femmes qui ont lancé leur entreprise à l'étranger. Que ce soit en suivant leur conjoint ou en décidant de sauter le pas de l'expatriation. À ces femmes qui ont déjà été confrontées aux réflexions un peu désobligeantes de leur entourage amical ou familial qui regardent leur projet comme des « gentils passe-temps pour femme au foyer estampillée 1950 » ... et il s'adresse à tous ceux qui justement ont un regard faussé sur la femme expat, pour leur montrer que oui: c'est toujours très dur d'entreprendre, et peut-être encore plus à l'étranger (car il faut changer de pays, s'adapter à la culture, à l'administration, à la langue...) mais qu'elles y arrivent ou pas, au moins elles ont eu l'audace de le faire, de se lancer, d’entreprendre.
Pauline Hargot-Thonon : À toutes les femmes (et hommes !) qui ont mis leur carrière en pause pour suivre leur conjoint ou s’occuper de leurs enfants. L’expatriation accentue souvent ce sentiment de perte d’identité sociale. Ce livre s’adresse à celles et ceux qui se sont déjà demandé : “Qui suis-je vraiment, et que veux-je faire de ma vie maintenant que j’ai peut-être le temps, l’espace, l’opportunité ?”
Un seul conseil aux femmes qui n’osent pas se lancer dans l’auto-entreprise?
Adeline Verdier Velten : Je partagerai mon mantra: "Tu n'as rien à perdre" peut être un peu de temps et d'énergie mais sinon...j'ai commencé avec très (très) peu de budget, j'ai fait moi-même mon site, appris tant bien que mal à gérer les réseaux sociaux, à contacter au culot des gens inconnus...du moment que tu aimes vraiment le projet dans lequel tu te lances, tu-n'as-rien-à-perdre !
Pauline Hargot-Thonon : On bluffe toutes au début, alors il ne faut pas se laisser impressionner par les parcours des autres. Et puis, parfois, il faut juste foncer sans se poser trop de questions, mettre la charrue avant les bœufs !
Une repartie infaillible quand on se fait « traiter" de « femme d’expat »?
Adeline Verdier Velten : "au moins moi j'ai osé l'aventure de l'expatriation" et "si mon conjoint en est là, si nous en sommes là, c'est que moi "femme d'expat" participe très, très largement à la réussite de la vie professionnelle de mon conjoint et de cette vie à l'étranger"….
Pauline Hargot-Thonon : “Sans moi, il n’aurait jamais pu réaliser tout ça ! »