À 77 ans, Keiko Borjeson, pianiste de renommée internationale, s’est produite à Hanoï lors d’un concert au Long Waits Jazz Café en ce mi-octobre. Dans une ambiance mystique, elle a transporté son public à travers un voyage musical intemporel, mêlant classique et jazz. Keiko reverse les bénéfices de ses concerts à des causes humanitaires, fonds qu’elle aimerait aussi destiner aux provinces du Nord du Vietnam. Retour sur un concert intimiste, riche en émotions variées.
Il est 20h45, le Long Waits Jazz Café s’imprègne d’une énergie presque mystique. Sur la petite scène du cabaret, Keiko Borjeson s’installe devant son piano. Un murmure d’anticipation parcourt le public. Vêtue d’un áo dài violet, elle impose sa présence sans un mot. À 77 ans, Keiko ne se contente pas de jouer des notes : elle transcende le temps, nous plongeant dans une bulle où passé, présent et futur se confondent. Ses doigts glissent avec aisance sur les touches, transformant chaque accord en une invitation au voyage.
« Je pratique tous les jours, même en faisant mes courses ou en me promenant dans la rue. Chaque action de mon quotidien est liée au piano. Je vis au rythme de cet instrument. Pour moi, chaque interaction résonne comme une note sur un clavier », confie l’artiste. De Tokyo à Détroit, du classique au jazz, le parcours musical de Keiko est jalonné d'influences. C’est sa tante, Kazuko Yasukawa, qui l’a initiée au piano.
Formée en France, auprès notamment de Lazare-Lévy, Kazuko a introduit sa nièce à la rigueur de la méthode française dès son retour au Japon. Jeune prodige, Keiko fait ses débuts à la télévision japonaise à l’âge de cinq ans, interprétant la célèbre Für Elise de Beethoven.
"Nous portons tous les cicatrices du passé"
Lorsqu’elle joue Chant de l’eau, une de ses compositions, Keiko précise : « J’ai écrit ce morceau en hommage aux victimes de la catastrophe naturelle qui a frappé Noto, au Japon, après une tempête dévastatrice. » Au-delà de son immense talent musical, Keiko est une artiste engagée, reversant les bénéfices de ses concerts à des œuvres caritatives en faveur des enfants. Elle a notamment exprimé son souhait de revenir au Vietnam pour soutenir les provinces du Nord, récemment touchées par le typhon Yagi. « À Hanoï, il souffle un vent de renaissance. Je suis honorée d’être ici ce soir », déclare-t-elle avec émotion.
Chaque morceau interprété par Keiko est introduit par une anecdote, un souvenir, une émotion. Ce soir, elle rend hommage au 70e anniversaire de la libération de Hanoï en jouant une pièce spécialement composée pour l’occasion. « Nous portons tous les cicatrices du passé, mais la musique nous rappelle la beauté que nous pouvons encore créer ensemble », dit-elle, pleine de sagesse.
Avant qu’elle ne reprenne sa place derrière le piano, l'artiste confie « ne cessez jamais de regarder vers l’avenir. Ouvrez-vous au monde, et il vous ouvrira des portes que vous n’auriez jamais imaginées. » Le concert reprend. Ses doigts dansent à nouveau sur les touches, tissant des harmonies qui nous transportent dans un autre univers, où chaque note semble réunir les éléments – terre, eau, feu – dans un chant d’amour pour l’humanité. Avec une grâce infinie, Keiko Borjeson nous rappelle que la musique est un langage intemporel, et qu’à travers elle, nous faisons corps avec le monde.
Pour l'écouter lors de sa prochaine date à Saigon, veuillez suivre ce lien : https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSdGxcsrmvmAZ9o0LwpO0EjWD96A-O7yoQQLS82tU74vTMrsxg/viewform