Lima : Comité de lecture, un média militant… mais pour la démocratie

 

C’est dans ce cadre qu’est né Comité de Lecture, un média indépendant dont l’objectif est de défendre et d’expliquer les concepts démocratiques, en éloignant la transmission de l’information du sensationnalisme.

Connivence avec le pouvoir, corruption, désinformation : ce sont quelques-unes des critiques fréquemment adressées à l’égard de la presse au Pérou. En effet, d’après le Rapport sur l’actualité numérique 2024 de l’Institut Reuters, seulement 35 % de la population fait confiance aux médias traditionnels.

Dans ce contexte de déconnexion entre les Péruviens et le monde journalistique, des formats indépendants émergent en offrant une alternative crédible et indépendante à l’information classique.

C’est dans ce contexte qu’on vous présente Comité de Lectura, un média en ligne péruvien qui propose des podcasts et des newsletters quotidiennes. Son approche repose sur un filtrage rigoureux de l’information : chaque matin, les cinq principales actualités sont analysées en détail, suivies d’une réflexion plus approfondie et technique sur un sujet complexe. En tant que média indépendant, il cherche à combattre la polarisation actuelle de la société et à proposer une information aussi neutre que possible, loin de tout sensationnalisme et biais idéologique.

 

Comité de Lectura : le produit d’un ensemble de coïncidences

 

 

« Sin dueños de la verdad », ou « La vérité n’a pas de propriétaires », est la phrase avec laquelle Augusto Townsend ouvre ses podcasts. Il est le curateur principal de Comité de Lectura et l’homme derrière la fondation de ce média.

Initialement diplômé en droit, mais désenchanté par le métier d’avocat, il décide de se réorienter vers le monde du journalisme. « Je commence en tant que stagiaire à Semana Económica, où je traitais au départ des sujets économiques. Peu à peu, je gravis les échelons jusqu'à devenir rédacteur en chef », nous détaille-t-il.

Par la suite, il rejoint El Comercio en tant que rédacteur en chef dans la section économie.

L’idée de créer Comité de Lectura ne viendra cependant que plus tard dans sa carrière, lorsqu’il travaillait chez Aporta, le laboratoire d’innovation sociale du groupe Breca.

Augusto explique que « Après avoir établi plusieurs contacts dans le monde entrepreneurial, je décide de créer un groupe Facebook avec 50 personnes pour partager les articles que je lisais et les idées qui me venaient à l’esprit. ». Il sera confronté à sa grande surprise, lorsque les invités eux-mêmes commencent à poster leurs propres lectures et à interagir entre eux.

« J’ai donc commencé à inviter plus de monde sur le groupe, jusqu'à en atteindre 2000 », continue-t-il.

Il décida, dans le même format que précédemment, de partager un résumé quotidien de l'actualité sur WhatsApp. Initialement destiné à ses supérieurs dans le cadre de son travail, ce résumé vocal s’étendait désormais à un groupe comptant plusieurs milliers de membres. Un jour, en y réfléchissant, il eut une idée qui changea la donne :

« Si seulement 10 % des membres s'abonnent, je pourrais en vivre », pensa-t-il.

Son objectif fut largement atteint et, en 2019, Comité de Lecture vit officiellement le jour.

 

 Une éthique de travail particulière

Première difficulté à laquelle Augusto Townsend se voit confronté : créer une équipe de travail. En effet, il était conscient que pour atteindre son objectif de produire des contenus aussi neutres que possibles il ne pouvait pas recruter des personnes partageant exactement ses idées. “Mon premier partenaire, qui ne travaille plus actuellement avec nous, se situait aux antipodes de mes positions idéologiques. C’était un exercice difficile, mais nécessaire pour assurer la qualité de notre travail”.

L’équipe est aujourd’hui composée de plusieurs professionnels de qualité tels que Alejandra Costa, ancienne Rédactrice en chef de la section économie de RPP, et Farid Kahhat, professeur à l’académie diplomatique du Pérou et commentateur de sujets internationaux à CNN espagnol.

La logique de recrutement pour Comité reste encore la même, et les profils au sein du média sont variés.

“On discute très souvent des sujets d’actualité, et comme on n’a pas tous la même manière de comprendre les choses on a nos petites discussions en interne. Mais c’est bien, ces échanges nous permettent de voir les faiblesses de nos arguments” nous révèle M.Townsend.

La démocratie et la pluralité sont en effet centraux dans le projet de Comité de Lectura. Dans chaque podcast, les différents journalistes visent à présenter la manière dont les personnes de diverses idéologies réfléchissent par rapport à chaque sujet. Augusto nous confie qu’il a même des fois changé de position en préparant ses épisodes.

 

Une initiative démocratique en expansion

Si bien Comité est un média, ce dernier reste avant tout un projet avec un objectif social pour son fondateur :

“C'est une excuse pour expliquer les concepts et le fonctionnement democratique” dit-il.

Augusto Townsend souhaite diversifier les activités de Comité, en ne se limitant pas uniquement au journalisme. Ils préparent actuellement des cours universitaires et des séminaires sur le rôle de la citoyenneté et l'éthique, et ils forment des enseignants du primaire afin qu’ils enseignent correctement la démocratie à l’école.

Effectivement, Comité de Lectura est un média qui défend le pluralisme, qui croit en une société moins polarisée et mieux informée, et considère que pour améliorer l'offre politique au Pérou, il faut d'abord passer par l'éducation et la sensibilisation du public. Son évolution témoigne de l’importance de l’engagement civique dans un contexte où la confiance en les médias traditionnels est faible et que la démocratie péruvienne est en danger.

 

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