Dans cette 2e partie, Stéphane Vojetta passe en revue les différents combats qu'il mène, dont un qui ne lui est pas venu de sa circonscription mais de France, dont un certain Booba!
Vous n'êtes affilié à aucun parti politique mais travaillez avec la majorité. Pourquoi?
C’est dans la ligne de ma victoire contre Valls. C’est ce que je disais pendant ma campagne, le but du jeu c’est de retourner ce rapport de force, et retourner dans la majorité, ils m’accepteront, mais en étant un député puissant, plus que je ne l’aurais été, s'il n'y avait pas eu la bataille contre Valls. J’avais été obligé d’être LREM pour être à la tête de liste des élections consulaires et après ils m’avaient expulsé. Alors, c’est bon, je n’y retourne plus, même si je suis membre du groupe parlementaire. Je suis le seul député indépendant, affilié à aucun parti dans l’Assemblée nationale et ça me va très bien. Tous les autres sont affiliés, que ce soit même à des micro-partis. Je suis dans la majorité présidentielle parce que je veux travailler efficacement et pouvoir demander sans problème une réunion avec tel ou tel ministre et c’est aussi pour ça maintenant que les gens m’interpellent au-delà de ma circonscription.
Pour renouveler le passeport, on oblige les Français de Tenerife ou de Mallorque, par exemple, à prendre un avion pour un rendez-vous d'un quart d’heure! Et ça c’est absurde!
C'est ce qui s'est passé avec votre combat actuel contre les influenceurs arnaqueurs?
Effectivement. Ce sont des Français de France qui m'ont interpelé sur Twitter pour me demander de l’aide. Ces influenceurs sont des gens qui se font connaitre grâce à des téléréalités, et qui après deviennent influenceurs avec des milliers de personnes qui les suivent. D'ailleurs, ceux-là oui sont des exilés fiscaux, puisqu'ils partent à Dubaï. Alors à partir de là, ils font de l’influence, ils vendent des produits. Parmi ces influenceurs, il y en a qui sont utiles pour les entreprises mais par contre, il y en a d’autres, ce sont vraiment des arnaques en bande organisée et pour l’instant les consommateurs ne sont pas protégés vis-à-vis de ça. Sans parler du fait qu'il y a de plus en plus de jeunes qui dans la vie veulent devenir influenceur…
Si je n’avais pas l’image du type qui a battu Valls, les gens ne seraient pas venus à moi
Mais pourquoi faire appel à vous?
Parce qu'ils savent que je suis dans la majorité et que si je dois ouvrir ma gueule, je vais le faire. Si je n’avais pas l’image du type qui a battu Valls, les gens ne seraient pas venus à moi. Il y a une sensation que ces arnaqueurs sont souvent protégés par des gens importants proches du gouvernement et que donc personne ne va rien faire contre eux. Alors j’ai commencé à gratter un peu, à faire des auditions et le rappeur Booba, qui lutte aussi contre ça, m'a interpellé et maintenant on échange ensemble pour lutter contre ce fléau. Booba le fait à sa manière et il a contribué à m’alerter et donc je prends le relais et il y aura une loi Vojetta pour réguler le système des influenceurs et couper court aux arnaques potentielles, notamment en imposant aux plates-formes Instagram, TikTok, etcetera des règles qui permettent de protéger les consommateurs et les jeunes. Et pour moi c’est essentiel. On voit bien l’influence qu'ont les réseaux sociaux sur les jeunes, c’est terrible.
Booba lutte à sa manière et je prends le relais. Il y aura une loi Vojetta pour réguler le système des influenceurs et couper court aux arnaques potentielles
Sur quoi travaillez-vous également?
Maintenant les gens ont conscience qu’ils ont un député qui travaille pour eux et mon équipe passe 80% du temps à régler les problèmes que les gens de m circonscription rencontrent avec l’administration. Bon ça c’est le Béaba du député. Il y a des problèmes que l’on peut régler individuellement, comme par exemple lorsqu'un retraité ne touche plus sa pension parce le certificat de vie s’est perdu par la poste et là on intervient. Mais il y a d’autres sujets où ça ne peut pas être réglé individuellement comme par exemple pour les homologations de diplômes. Dans ces cas-là il faut passer par le ministère.
En Espagne c’est beaucoup plus compliqué pour un Français, parce qu'en plus tout est décentralisé, avec 17 communautés autonomes qui ont leur législation
Et vous pouvez faire quoi pour l’homologation des diplômes?
C'est un sujet qui inquiète énormément de Français et c’est une des consultations fréquentes que je reçois. Les Espagnols ont moins de difficultés pour venir travailler en France, alors qu'en Espagne c’est beaucoup plus compliqué pour un Français, parce qu'en plus tout est décentralisé, avec 17 communautés autonomes qui ont leur législation. C'est comme ça qu'un ostéopathe qui vient s’installer en Espagne, peut se rendre compte qu’il n'a pas le droit de travailler parce que son diplôme n’est pas homologué, et ça arrive aussi parfois sur l’enseignement, sur la médecine. Donc on a lancé une enquête afin d'identifier les problèmes et les synthétiser pour ensuite pouvoir agir. Je vais aller voir le ministère de l’Enseignement supérieur en France et après je mettrai la pression, je vais être persistant, je n’accepte pas un non pour réponse.
Je suis le seul député indépendant, affilié à aucun parti dans l’Assemblée nationale et ça me va très bien.
Pour le certificat de vie, on en est où?
La fin du certificat de vie est en place sur le régime général des retraites, avec l’échange des données entre la France et l’Espagne, mais pas encore sur la partie des régimes spéciaux. La cause en est une lenteur administrative, avec le ministère de la Santé espagnol qui n'a pas encore signé l’avenant au contrat principal. En fait, le certificat de vie s’éteindra sans big-bang, peu à peu, sans qu’on se rende compte. Simplement les Français ne recevront plus la demande de certificat de vie sur les régimes spéciaux.
Le certificat de vie s’éteindra sans big-bang, peu à peu, sans qu’on se rende compte
Et pour la dématérialisation du renouvellement du passeport?
On en est encore à la phase de test qui devrait commencer au Portugal au premier semestre 2023 et le but est que d’ici fin 2023, la phase soit concluante et que cela puisse être étendu au reste du monde dont l’Espagne. Mais le problème c’est que dans les administrations, il y a une résistance au changement! Ça traîne et je leur ai remis la pression, mais c’est un jeu constant entre moi, qui insiste le plus avec le député d'Amérique du Nord, et l’administration de l’autre côté qui freine avec toujours une bonne excuse pour aller lentement. Le discours est toujours de dire qu'on a besoin de plus de moyens consulaires. Alors, si on pense seulement en terme de Français de Madrid ou de Barcelone, et on met 10 agents de plus au consulat, effectivement, ça ira plus vite, mais il y aura toujours le même problème pour tous les autres Français qui sont obligés de se déplacer. Car le problème n'est pas seulement qu’il manque des rendez-vous mais c’est le fait de devoir se déplacer. On oblige par exemple les Français de Tenerife ou de Mallorque à prendre un avion pour un rendez-vous d'un quart d’heure! Et ça c’est absurde! Alors qu'avec la dématérialisation, on va régler les deux problèmes en même temps: il y aura plus de rendez-vous et on n'aura plus à se déplacer. En plus, les agents consulaires auront plus de temps pour autre chose.
On parle de plus en plus de l’Espagne en termes favorables, comme destination touristique, modèle culturel ou style de vie incroyable
Vous avez assisté à la présentation de l'enquête du think tank Real Instituto Elcano et Dialogo "France-Espagne: regards croisés". Pensez-vous que les Français se sentent supérieurs et regardent avec une certaine condescendance les Espagnols?
C’était vrai à une certaine époque, mais ça a bien changé. Si les Français ont des a priori négatifs, c’est plus vis-à-vis des Anglais ou des Allemands, mais pas avec les Espagnols. Par contre, j’ai remarqué qu’on parle de plus en plus de l’Espagne en termes favorables, comme destination touristique, modèle culturel, style de vie incroyable. L'Espagne est à la mode. Et quand il y a eu le deuxième confinement en France, les Français venaient en Espagne voir les musées, aller au restaurant, boire une bière en terrasse, faire la fête, enfin, vivre. Ça a donné une image de liberté, de joie de vivre, même si c'était à Madrid, puisqu'à Barcelone, pendant ce temps-là c’était fermé. Je pense sincèrement qu’il y a eu ces dernières années une amélioration de l’image de l’Espagne en France.
Les relations avec l'Espagne sont vraiment au beau fixe. C’est pour ça que c’était dommage de voir le nuage Midcat assombrir ces relations
Il y avait ces derniers temps de l'eau dans le gaz dans les relations entre l'Espagne et la France à cause du Midcat. Ça va mieux?
Nous avons une relation qui est la meilleure qu’on n'ait jamais eue. Tout ce qui avait été mis sur la table il y a un an et demi lors du sommet de Montauban a bien avancé. En terme de coopération économique, on continue à attirer des investissements espagnols en France et beaucoup de Français continuent d’investir en Espagne. Donc les relations sont vraiment au beau fixe. C’est pour ça que c’était un peu dommage de voir le nuage Midcat assombrir ces relations. Les équipes techniques sont en train de travailler pour voir la faisabilité du projet et le financement du Barmar. Est-ce que les fonds marins ne sont pas trop profonds pour le faire? auquel cas il faudrait se rapprocher des côtes et donc ça rallongerait mais on verra début décembre lors du sommet à Alicante si on valide ce nouveau projet et on passe à l’étape suivante. Je ne suis pas impliqué là-dedans. Moi je m’étais impliqué pour bien dire au gouvernement français qu’il fallait une autre communication avec les Espagnols parce que leur approche antérieure était mal comprise. C’est ce qu’ils ont fait et c’est un sujet important des relations bilatérales Il faut prendre soin de ces relations et même si l'on ne peut pas se passer de l’axe franco-allemand, nous devons construire d’autres axes secondaires qui sont aussi importants, comme celui entre la France et l’Espagne.