Le cinéma espagnol est assez peu représenté en cette 75e édition du Festival de Cannes. Rossy de Palma, présidente du jury Caméra d’or, en est une rare représentante. Pourtant, le succès de ses acteurs traverse largement les Pyrénées.
Novembre 1975. Le général Franco meurt, après presque quatre décennies passées à la tête de l’Espagne. Le mouvement de la "movida" marque le renouveau culturel du pays. Finie la censure, le cinéma peut se développer. Seulement connu du Festival de Cannes, désormais il va pouvoir conquérir le grand public français, sous la houlette de Pedro Almodóvar.
Penélope Cruz et Javier Bardem, les acteurs fétiches d'Almodovar
Le réalisateur a ses acteurs fétiches : Penélope Cruz et Javier Bardem. Le couple, tant dans la vie qu’à l’écran, devient iconique. Ils sont révélés en France en 1992 par le film 'Jamón, jamón', de Bigas Luna. Tous deux habitués du cinéma hollywoodien, l’actrice se fait aussi une place devant les caméras françaises, depuis son rôle de Mathurine dans Don Juan, l’unique film de Jacques Weber, sorti en. 1998. Quand on joue dans une adaptation de Molière, on entre forcément dans le cœur des Français… "La France, c'est le cinéma. Et être reconnue ici, ça représente beaucoup pour moi", déclare l’actrice madrilène. Elle reçoit d’ailleurs un César d’honneur en 2018.
Un espagnol, 1er étranger à recevoir le César du meilleur acteur
Parmi les pionniers figure aussi Sergi López. Indissociable de Manuel Poirier (Western, 1997), il apparaît dans La Haine, de Mathieu Kassovitz. Il est le premier étranger à recevoir le César du meilleur acteur, en 2001. Les Français adoptent aussi Rossy de Palma, une autre fidèle de Almodóvar, tout comme Antonio Banderas, l’interprète phare de Zorro. Le natif de Malaga remporte le prix de l’interprétation masculine à Cannes, en 2019, pour Douleur et Gloire.
Des espagnols aussi à la télévision française
Dans les années 2010, après le cinéma, les talents espagnols investissent le petit écran. En France, téléfilms, plateaux télé et émissions de divertissement prennent des accents ibériques. Cette nouvelle génération est notamment incarnée par Victoria Abril. Très tôt, l’acteur et réalisateur Jean-Claude Brialy lui trouve "quelque chose de très rare chez les jeunes actrices, c’est le sens du rythme". Un talent démontré par ses succès dans de nombreux formats. Venue du cinéma, elle se fait connaître de l’Hexagone dans La lune dans le caniveau (1983) aux côtés de Gérard Depardieu. Le rôle lui vaut sa première nomination aux César.
Elle devient plus populaire encore par sa présence dans les huit premières saisons de Clem. D’après Le Figaro, il s’agit de la série télévisée la plus recherchée sur Google en France, en 2015, devant Game of Thrones et The Walking Dead. Drôle, énergique et extravagante, la native de Madrid monte même deux fois sur les planches. Cette année, elle est à l’affiche de Drôle de genre, de Jade Rose Parker, au théâtre de la Renaissance à Paris. Dans Clem, elle est accompagnée pour trois saisons par Agustín Galiana. Révélé par cette série, ce dernier s’illustre ensuite par sa victoire dans l’émission Danse avec les stars, en 2017.
Les Espagnols à l’heure des plateformes
De nos jours, la vidéo à la demande est un tournant dans les habitudes du public. En 2017, elles représentaient un marché de 26 milliards d’euros à l’échelle mondiale. La nouvelle génération d’acteurs espagnols a pris ce virage avec succès. Particulièrement sur Netflix, la plus importante de ces plateformes, avec près de 20 millions de visites par mois en 2020 dans l’Hexagone. Qui n’a pas entendu parlé de La casa de papel ? La série espagnole rencontre un franc succès en France. Selon Médiamétrie, elle est la série la plus visionnée en 2020 dans le pays.
Parmi les têtes d’affiche, Úrsula Corberó. L’actrice catalane incarne le personnage de Tokyo. Une braqueuse imprévisible et icône de la série. De même, Élite, autre succès espagnol sur Netflix braque les projecteurs sur Ester Expósito. La jeune madrilène de 22 ans incarne le rôle principal de Carla Rosón Caleruega et enchaîne des seconds rôles. Si cette nouvelle génération n’est pas spécialement implantée et adoptée par le public tricolore, elle a très tôt émergé à l’international. Mais surtout, elle semble être au début de son ascension.
Gaël Lanoue