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Ile de Sumba : sauvage et magique

Sumba sauvage traditionSumba sauvage tradition
Écrit par Corinne Gaminde
Publié le 25 août 2021, mis à jour le 20 mars 2024

Dans le monde des Pusaka, biens précieux gardés de génération en génération dans le clan familial, certaines îles ont beaucoup de mal à conserver leur patrimoine culturel et artisanal. C’est le cas de Sumba, petite île dans le Sud-Est de l’archipel qui appartient à la province de Nusa Tenggara Oriental, la plus pauvre de l’Indonésie. 

La religion Marapu 

Pour mieux comprendre le dilemme auquel fait face Sumba, il faut mettre en évidence deux situations primordiales : le passé et le présent. 

Ainsi, cette société patriarcale, dont un tiers adhère à la religion Marapu, est conditionnée par ses traditions bien ancrées auxquelles les fidèles se soumettent corps et âme. Le culte Marapu millénaire détermine la vie des croyants et cherche à concilier les esprits des ancêtres afin de protéger le clan de la maladie et donner de bonnes récoltes. La richesse d’un clan joue un rôle important dans l’organisation sociale. Les objets sacrés tanggu marapu sont directement liés aux ancêtres dont ils ont gardé une partie de la force spirituelle et peuvent ainsi servir de médiateurs lors des rituels et des cérémonies.

Cependant, ce passé tranche avec la réalité du présent, avec la rareté des ressources, le manque de travail, la pauvreté du peuple qui n’arrive pas à survivre et voit ses jeunes partir, dans l’obligation de chercher du travail loin de leur île, migrer vers la Malaisie le plus souvent, afin de pouvoir faire vivre toute leur famille restée à Sumba. 

 

Survie de l’artisanat 

Sumba sauvage tradition

 

S’il n’y a plus de jeunes pour perdurer les traditions, la transmission du “savoir-faire “ des anciens se perdra. C’est le cas de l’artisanat qui contribuait socialement et rituellement au maintien de l’identité ethnoculturelle des communautés insulaires. La vannerie très élaborée à motif zoomorphe particulière à Sumba est malheureusement en voie de disparition ; ces paniers tressés en feuilles de palmier lontar contenant la chique de bétel utilisés durant les cérémonies sont remplacés maintenant par de simples paniers, faute de mieux.  « L’artisanat local ne génère pas assez de revenus » affirme ibu Rambu Ata, une tisserande de Waingapu, la capitale de Sumba : « avant 1998, nous avions la visite de nombreux collectionneurs étrangers qui venaient deux fois par an pour acheter nos tissus ikats, mais depuis, la demande a beaucoup chuté ». Sur une note plus positive, elle ajoute qu’« à l’heure actuelle, ce sont les indonésiens nos meilleurs clients ; ils commencent à apprécier la beauté de nos ikats ».

 Les Ikat

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Quand on évoque le textile en Indonésie, c’est le batik qui vient à l’esprit. Peu connaisse l’ikat voire l’apprécie. L’ikat n’a pas la finesse du batik, mais revêt cet aspect à la fois rêche et profondément mystérieux et magique qui caractérise l’île et ses habitants. La technique est basée sur une teinture par réserve non pas sur le tissu (c’est le cas du batik) mais sur les fils avant leur tissage. Les fils de chaine blancs sont fixés sur un cadre et noués avec du raphia autour des motifs qui devront rester blancs. Puis, ils sont trempés dans une teinture d’indigo pendant plusieurs heures et séchés afin que la couleur se fixe. Entre chaque teinture, les fils doivent être dénoués, séchés, remis sur cadre et renoués pour obtenir toutes les variations de couleurs désirées par la tisserande.  Ainsi, pour obtenir un bleu indigo profond, le procédé de teinture est répété huit fois. La teinture du rouge morinda qui provient d’écorce d’arbre est tout aussi complexe et longue car la couleur met un mois à se fixer. Quand les fils sont finalement teints, ils sont montés sur un métier puis tissés : six mois sont nécessaires pour réaliser un ikat et ce procédé ne peut se faire que durant la saison sèche.

Origines des motifs Ikat

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La technique et certains motifs d’ikat sont d’origine indienne, en particulier les médaillons floraux appelés patola. Dans le passé, les marchands indiens venaient échanger leurs soies et or pour le bois de santal qui poussait en abondance à Sumba. D’autres motifs plus autochtones représentent le monde animal terrestre et aquatique et souvent imaginaire.

Présents de mariage

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Mamuli en alliage, collection du Musée National de Jakarta

Les textiles faisaient partie intrinsèque des biens précieux tangu marapu ou pusaka intégrés autrefois dans un vaste réseau d’échanges entre familles. La famille de la mariée présentait des ikats, des bracelets d’ivoire, des peignes en carapace de tortue et de la porcelaine qui symbolisaient l’élément féminin de l’union. La famille du marié offrait en contrepartie du bétail, des chevaux, des fusils et des bijoux symbolisant l’élément masculin. Le Mamuli faisait partie de ces parures et pouvait être porté par l’épouse et plus tard ses filles, soit sur l’oreille droite soit en pendentif de collier.

Les mariages sont encore actuellement arrangés comme dans le passé et considérés comme des alliances entres lignées et clans. Les échanges de biens entre familles ont considérablement diminué du fait que certains trésors Pusaka ont dû être vendus par nécessité.

 

Crédits photos : Corinne G, Wera beach resort

 

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