Suite à la décision du Tribunal Constitutionnel qui barrait la route à sa candidature à la tête de la Generalitat, Carles Puigdemont a désigné Quim Torra, un fervent indépendantiste, pour le remplacer à la tête de la Catalogne. Le débat d’investiture du candidat controversé a eu lieu samedi 12 mai, mais l’abstention des députés radicaux de la CUP l’ont empêché d’avoir la majorité absolue. Lundi 14 mai, il se présente au second tour, lors duquel se décidera son investiture. Le feu vert est d’ores et déjà confirmé par les députés de la CUP, qui devraient maintenir leur abstention.
Actualisation lundi 14 mai - Quim Torra est élu Président de la Generalitat, avec 66 voix en sa faveur, 65 voix contre et 4 abstentions.
Pour le remplacer, Carles Puigdemont a désigné un candidat libre de toute charge judiciaire, mais pourtant très controversé. En effet, ses profondes convictions indépendantistes l’ont poussé à écrire des tweets très polémiques voire xénophobes envers le peuple espagnol, qu’il a aussitôt supprimé mais qui ont fait le tour des médias locaux. Mais au-delà de ces publications, Quim Torra est depuis plusieurs années une figure de l’indépendantisme radical, ou un "indépendantiste émotionnel" comme il se définit lui-même. C’est en 2007, quand il assiste depuis la Suisse à l’échec du processus de la réforme du statut de la Catalogne, que naît sa vocation nationaliste. Revenu en Catalogne, il devient essayiste et écrit sept livres, la plupart portant sur des journalistes et des intellectuels catalans des années 20 et 30. Comme beaucoup d’idéologues de l’indépendantisme actuel, il partage le mythe de la Catalogne des années 30 comme un rêve brisé par la Guerre Civile. Il devient aussi éditeur, avec A Contra Vent, qui se veut une référence du journalisme littéraire catalan. Sa présidence d’un an de Sobirania i Justicia, qui promeut l’indépendance de la Catalogne marque le début d’un activisme politique qui le propulse à la tête du Centre Culturel du Born, au Conseil de l’Assemblée Nationale Catalane dont il est membre en 2011 et à la présidence Òmnium Cultural, une association politique qui œuvre pour la promotion de la culture catalane et pour l'identité nationale de la Catalogne.
oui, je suis un radical
Et Quim Torra n’a pas manqué de confirmer ses convictions radicalement indépendantistes dans sa prise de parole lors du débat d’investiture, le samedi 12 mai, au Parlement catalan. En effet, il s’est engagé à "travailler sans répit pour la république catalane" et a confirmé sa volonté d’entamer un "processus constitutif qui aboutira à l’élaboration d’une Constitution catalane". Il a également promis de respecter le résultat majoritairement indépendantiste du référendum du 1er octobre, jugé illégal par le gouvernement espagnol. Dans ce discours très véhément envers l’Etat et les institutions espagnoles, il prône la "construction d’un pays avec la plus grande radicalité possible".
L’opposition, sans surprise, a qualifié son intervention de "radicale" et "incendiaire", ce à quoi Quim Torra a répondu "oui, je suis un radical".
Dans son discours, il n’a pas manqué de s’assurer le soutien des quatre députés "anti-système" de la CUP, indispensable pour son investiture, en parlant de "République féministe" et de la consultation des citoyens dans le processus constitutif.
Les députés de la CUP ont annoncé qu’ils ne bloqueraient pas l’investiture de Quim Torra
Mais cela n’a pas convaincu les députés de la partie la plus radicale de l’indépendantisme qui se sont samedi abstenus, l’empêchant ainsi d’obtenir la majorité absolue et d’être investi au premier tour. En effet, il a obtenu 66 voix en sa faveur, 65 contre et 4 abstentions, un résultat qui lui permettrait d’être investi au second tour, où la simple majorité est requise. Le deuxième tour de l’investiture se tiendra donc ce lundi 14 mai, à 10h30. Ce dimanche, les députés de la CUP ont annoncé qu’ils ne bloqueraient pas l’investiture de Quim Torra au second tour, et donc qu’ils maintiendront leur abstention lors du vote de lundi. Cette décision devrait permettre au candidat de créer un Gouvernement régional et de mettre fin à l’impasse politique qui maintenait la Catalogne à la tutelle de Madrid suite à la proclamation d'indépendance.
Mais si depuis Berlin, Puigdemont a tenu à rassurer sur le fait que Quim Torra était un "président effectif" et non une marionnette, l’idée d’un président par intérim reste probable. Même s’il a dû se retirer pour laisser place au nouveau candidat, l’ancien président ne manquera pas de continuer à exercer son influence sur de nombreuses décisions, et Torra n’a pas écarté l’idée de nouvelles élections à partir du 27 octobre, dès que cela sera légalement possible.