La marque suédoise de vêtements H&M a annoncé le 17 mai 2021 qu’elle allait progressivement recommencer à passer des ordres de commande auprès de ses sous-traitants en Birmanie après gelé sa production locale suite à la prise de pouvoir par des généraux le 1er février 2021. Dans un communiqué, l’entreprise a expliqué que sa décision résultait de sa volonté de « ne pas pousser nos partenaires locaux à fermer leurs usines et à mettre au chômage des dizaines de milliers de personnes qui ont besoin de leur salaire afin de survivre dans le contexte de crise que la Birmanie traverse aujourd’hui ». En outre, H&M affirme avoir conduit un audit de ses relations ou de celles de ses fournisseurs locaux avec des entreprises liées à l’armée et être parvenu à la conclusion que « H&M n’a aucun lien direct avec une entreprise détenue par des militaires ». Et elle a ajouté à l’intention des nombreux tenants des solutions « y’a qu’à… » qu’elle était maintenant dans l’attente « du cadre juridique permettant aux entreprises étrangères de résoudre les situations éventuelles de liens indirects avec des compagnies dépendant de l’armée en Birmanie ». Un commentaire qui soulève ce « vide » juridique, vu comme une diversion par ceux qui réclament la rupture de tels liens indirects s’ils s’avèrent et ceux qui relèvent que le droit est le droit et qu’il est contraignant partout dans le monde, y compris en Birmanie.
Le retour de H&M va à l’encontre de la rumeur actuelle rapportant des départs et des fermetures de masse d’usines dans les grands parcs industriels autour de Yangon. Interrogés par le quotidien Eleven, plusieurs dirigeants de telles zones industrielles reconnaissent des fermetures mais rien de massifs et confirment que les commandes reprennent dans certains secteurs, dont l’habillement. « C’est vrai que des usines ont fermé ou sont sur le point de fermer dans la zone de Hlaing Thar Yar, une quinzaine à ma connaissance, mais c’est un chiffre calculé sur les quatre premiers mois de 2021, mais nous n’observons rien de massif et certaines fermetures avaient été annoncées après la crise de la gestion de la pandémie de Covid-19 », explique un membre du Comité régional pour l’Industrie de Yangon. Une tendance qu’observe d’autres administrateurs de zones industrielles : des fermetures faute de commande, réelles, mais plutôt en ligne avec un mouvement entamé en 2020 avec la contraction économique internationale et locale.
Une nette dégradation des conditions de travail
Des secteurs sont bien sûr très touchés, comme les activités autour du métal, dont le prix des matières premières a presque doublé pendant ces derniers mois, « et du coup le nombre d’acheteurs a beaucoup baissé, ou des projets ont été reportés, entraînant la fermeture de nombreuses entreprises du secteur », explique un dirigeant de la zone industrielle de Dagon Sud. « Les salariés viennent toujours travailler, et certaines usines ont même recommencé à embaucher », complète un responsable de la zone industrielle de Mingalardon. Les associations de salariés relèvent pour leur part une nette dégradation des conditions de travail alors même que les deux dernières années ont vu de nombreux conflits sociaux dus à la forte propension des patrons birmans de considérer que les lois et le droit ne les concernent pas et donc à les enfreindre allègrement
Si les départs massifs d’usines relèvent donc de la rumeur, la situation économique dramatique de la Birmanie est, elle, une réalité globale : inflation galopante, effondrement du kyats, perspectives très sombres… La Direction de l’investissement et des entreprises (Directorate of Investment and Company Administration – Dica) a annoncé qu’il n’y avait eu aucun investissement direct étranger en Birmanie lors du mois d’avril alors qu’en mars l’équivalent de 500 millions d’euros avait été investi dans le pays par des entreprises extérieures.
Le 7 mai 2021, la Commission nationale de l’investissement a approuvé quinze nouveaux projets d’investissements étrangers, dont un projet chinois de deux milliards d’euros pour produire de l’électricité. Mais une telle approbation administrative n’est qu’une première étape, et de nombreux projets approuvés ne voient finalement jamais le jour suite à des revirements des investisseurs potentiels.