Dans un pays où le paiement numérique en est à ses balbutiements, où le système bancaire est encore loin des normes internationales les plus élémentaires, où il n’est pas possible d’obtenir une carte de crédit mais uniquement des cartes de débit prépayées et où surtout à peine 40% de la population dispose d’un compte en banque, on pourrait penser que le commerce en ligne est inexistant ou à tout le moins à peine existant. C’est en fait tout le contraire ! Les e-boutiques se multiplient, grâce à la facilité de création d’une page Facebook : une photo, un nom, un numéro de téléphone, et hop, le magasin est ouvert ; ne reste alors qu’à télécharger quelques photos des produits en ventes, d’en donner le prix, et le tour est joué. Le paiement se fait à la livraison, paquet fermé, et le prix du coursier est à la charge du client. Le produit n’est pas conforme ? Aucun recours. Le produit est déficient ? Aucun recours. Les prix ? Toujours au-dessus du marché, supérieurs à ce qui se fait dans les nombreuses boutiques dispersées dans les villes.
Et pourtant, le e-commerce est populaire, très populaire même auprès des Birmans. La raison ? Sans doute l’aspect novateur du système ; sans doute aussi parce que les commerces sont rarement concentrés dans des zones bien circonscrites, et que lorsqu’ils le sont – marchés officiels, centre commerciaux… - les prix montent, sans que pour autant le service soit meilleur. Sachant qu’en Birmanie la notion de service est encore plus balbutiante que celle de banque ou de paiement numérique… Autre attrait des boutiques en ligne, pouvoir contempler des photos et rêver durant des heures sans contrainte. Problème important : ces commerces sont tout aussi informel que la multitude d’échoppes des rues, et donc ils échappent à tout contrôle et ne rapportent aucune taxe aux autorités.
Développer l’information sur le commerce en ligne
C’est là une des raisons de la création de l’Association birmane de e-commerce (Ecam), dont le lancement a été officialisé mardi 10 mars à Yangon en présence du directeur général du ministère du Commerce U Nyi Nyi Aung. L’Abec existe depuis déjà 9 mois, elle a été officiellement enregistrée par la Direction administrative de l’investissement et du commerce (Dica) en juillet 2019, et son objectif principal est de structurer le e-commerce en Birmanie, explique son président U Aye Chan : « Nous travaillons avec les Nations Unies et le gouvernement. Nous allons participer à l’élaboration et l’évolution des lois et réglementations sur le e-commerce. Nous avons déjà organisé des ateliers sur la fraude sur internet, et nous préparons une campagne d’information et de sensibilisation sur ce sujet. Notre point de vue est qu’un e-commerce formel, en bonne santé et honnête profite à tout le monde : l’entreprise car elle augmente ses ventes et ses profits en n’ayant pas à faire face à une concurrence déloyale, l’état car il peut prélever des impôts sur ces bénéfices et les consommateurs car ils ont des garanties sur ce qu’ils achètent ».
Comme l’exprime le secrétaire de l’association, « nous réunissons des entreprises de e-commerce soucieuses de développer ce secteur, des acteurs privés. Nous sommes là pour aider des entrepreneurs à mettre en place des structures pérennes, visant le long terme. Nous voulons développer le paiement en ligne, l’éducation aux services numériques et améliorer la logistique du dernier kilomètre. Sans cela, la population perdra toute confiance dans ce genre de vente ».