Le 8 novembre 2020, probablement à partir de 6h du matin si l’horaire est le même que lors du scrutin de 2015, ce sont plus de 41 000 bureaux de vote qui ouvriront dans tout le pays, tous autorisés par la Commission Electorale Nationale (CEN). Leur nombre et leur emplacement dépend du nombre d’habitants par circonscription. Et si les mesures contre la propagation du Covid-19 le nécessitent, des bureaux supplémentaires pourraient être mis en place. L’obligation d’une distance physique minimale et la limitation du nombre d’électeurs présents en même temps dans un bureau de vote risquent en effet de considérablement ralentir la démarche de vote et d’empêcher un certain nombre d’électeurs de mettre leurs bulletins dans les urnes s’il n’y a pas assez de bureaux ouverts.
En général, ces bureaux sont installés dans des lieux communautaires facilement accessibles, comme les écoles. Chacun d’eux possède trois urnes, pour les trois types de postes à remplir, un dans chaque chambre du Parlement national et un au Parlement régional ou étatique.
Plusieurs personnes doivent être présentent durant toute la procédure de vote, à savoir un responsable du bureau de vote, un vice-responsable, des individus assurant la sécurité, au moins trois contrôleurs de liste électorale et trois distributeurs de bulletins de vote, et enfin du personnel chargé de marquer le doigt de l’électeur à l’encre noire après qu’il se soit exprimé, cela afin de limiter les possibilités de fraude.
Les électeurs illettrés ou handicapés pourront se faire accompagner de la personne de leur choix pour les aider à déposer leurs bulletins. Quant aux électeurs résidant à l’étranger et qui n’auront pas voté par anticipation, ils pourront se rendre dans l’ambassade, le consulat ou les bureaux de représentation permanente que la Birmanie possède au plus proche de leur lieu de résidence.
En ce dimanche de novembre, l’électeur qui souhaite aller voter doit commencer par vérifier que son nom est bien correctement inscrit sur la liste électorale disponible à l’entrée du bureau. En théorie, la mise à jour des listes a été effectuées depuis plusieurs mois par la CEN. De gros doutes subsistent cependant sur la validité de ces listes, et la conseillère d’état elle-même, Daw Aung San Suu Kyi - dirigeante de fait du pays et de la Ligue Nationale pour la Démocratie – a tapé du poing sur la table lors d’une visio-conférence le 5 août 2020, affirmant que les listes « sont remplies d’erreurs ». Le ministre du Travail, de l’Immigration et de la Population a d’ailleurs déploré des erreurs concernant sa famille !
En théorie, la mise à jour des listes doit se faire d’un côté par les administrateurs de district ou de villages, censés vérifier que l’électeur habite bien toujours à l’adresse indiquée sur la liste, et de l’autre côté par l’électeur lui-même, supposé vérifier par anticipation que son nom est bien sur la liste de son district. Malheureusement, comme si souvent en Birmanie, la communication a été pour le moins approximative : dans bien des endroits, les électeurs ignorent qu’il leur incombe de procéder à cette vérification ; plus étonnant, de nombreux Birmans ne sont toujours pas au courant que des élections générales se tiendront le 8 novembre prochain ! Quant aux administrateurs de district ou de villages, beaucoup se sont pour l’instant contentés d’attendre tranquillement dans leur bureau que les individus y passent et alors leur demander s’ils étaient bien sur la liste. A ce jour, selon la CEN elle-même, six millions de votants potentiels, sur les 37 que compte le pays, ont vérifié qu’ils étaient correctement inscrits, pour quand même plus de 200 000 corrections sollicitées et 65 000 cas de noms erronés, dans la graphie ou la dénomination.
Si l’électeur trouve bien son nom sur la bonne liste, il pourra rejoindre la queue qui se sera probablement formée devant l’entrée du bureau, comme en 2015. Les isoloirs devraient être à disposition durant dix heures, entre 6h et 16h, toujours si le scrutin de 2020 se déroule comme celui de 2015. Ces horaires doivent encore être confirmés par la CEN.
Les votants devront probablement se soumettre à un contrôle de température et à un lavage de mains, comme il est d’usage actuellement. Aucune annonce publique n’a encore cependant été faite à ce sujet. Puis, deux officiers de sécurité seront chargés de vérifier que l’électeur n’a pas d’encre sur l’un de ses doigts, signe qu’il aurait déjà voté. Ensuite, l’électeur montrera son document d’identité à la personne chargée de distribuer les bulletins de vote et signera à côté de son nom sur la liste électorale auprès du contrôleur. Les bulletins de vote donnés à l’électeur doivent être signés au dos par le distributeur pour être valides.
Dans l’isoloir, l’électeur utilisera un tampon fourni par le personnel du bureau de vote pour cocher le/la candidat(e) qu’il préfère pour chacun des trois postes à remplir. Après avoir plié ses bulletins de vote, il ira les répartir dans les urnes correspondantes. Chaque urne possède une couleur différente : verte pour la chambre basse du Parlement national, bleue pour la chambre haute, et violette pour le Parlement régional ou étatique.
Enfin, l’électeur se dirigera vers la sortie du bureau, en passant devant un dernier contrôle de sécurité où il devra tremper un de ses doigts dans un verre d’encre noire indélébile, l’équivalent du « a voté » français.
Les candidats, ou leurs représentants, peuvent assister au ballet des électeurs venus voter. A leurs côtés, les observateurs nationaux et internationaux qui en auront fait la demande seront chargés de vérifier que l’élection se déroule conformément à la loi. A partir de 16 heures, le bureau fermera ses portes. Les électeurs qui auront rejoint la file d’attente avant cette heure limite pourront cependant entrer pour voter.
Le décompte des votes par le personnel du bureau commencera alors, sous les yeux des témoins présents (candidats, médias, observateurs). L’urne contenant les votes anticipés sera la première à être ouverte. Puis viendra le tour de la Chambre basse, de la Chambre haute, et enfin des Parlements régionaux et étatiques.
Le bureau de la sous-commission de la circonscription, qui supervise les bureaux de vote de sa zone, sera chargé de compter les votes des électeurs s’étant exprimé à distance, soit qu’ils résident à l’étranger, soit qu’ils ont voté en absence. Y seront ajoutés les décomptes transmis par les bureaux de vote locaux, pour donner un résultat final.
Les résultats seront ensuite vérifiés au niveau de la région ou de l’état, puis par la CEN qui sera chargée de les annoncer officiellement. En 2015, le vote s’est également tenu le dimanche 8 novembre, et la CEN a annoncé les résultats vers 15h le lendemain. Pour les élections de cette année, les observateurs locaux comme internationaux s’attendent à un moindre taux de participation qu’en 2015 et à une victoire nationale de la LND. Des enjeux demeurent, aux yeux de ces observateurs : la LND perdre-t-elle beaucoup de sièges, sa victoire probable lui donnera-t-elle une majorité relative ou absolue ? Parmi les partis rivaux, certains parviendront-ils à cristalliser les voix des très nombreux déçus des cinq ans au pouvoir de la LND ? Et dans les sept états, les partis ethniques parviendront-ils à s’imposer tant localement qu’au plan national ? Et quel sera le résultat final du Parti de l’Union pour la Solidarité et le Développement – PUSD, le bras politique des généraux – alors que cette année, contrairement à 2020, les soldats voteront dans des bureaux installés hors de leurs casernes et donc sans subir le contrôle de leurs officiers ? Enfin, quel sera le degré d’acceptation des résultats par les perdants si leur défaite est lourde, surtout s’il s’agit du PUSD et a un moindre niveau (en cas de majorité seulement relative) de la LND ? Réponses à partir du 9 Novembre.