Nous publions une lettre transpartisane de 14 élu·e·s dans les pays d’Afrique et du Moyen-Orient de la 10e circonscription législative de l’étranger. Ils s'adressent à Mme Amelia Lakrafi, députée avec la demande "d’agir urgemment pour la paix au Moyen-Orient."
Madame la députée Lakrafi,
En tant qu’élu·e·s des Français·es résidant dans les pays d’Afrique et du Moyen-Orient de la 10e circonscription législative de l’étranger, nous vous demandons par la présente d’agir urgemment pour la paix au Moyen-Orient.
L’embrasement de la région fait suite à des mois d’impunité d’un gouvernement criminel. Depuis les attaques terroristes perpétrées par le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens le 7 octobre 2023, nous, résident·e·s de la région, sommes chaque jour les témoins des crimes perpétrés par le gouvernement israélien dans les Territoires palestiniens occupés ayant causé la mort ou la disparition d’au moins 50.000 civils (chiffres de la défense civile palestinienne et des autorités de la bande de Gaza au 21 août 2024, incluant plus de 10.000 civils portés disparus ou ensevelis sous les gravats). Aujourd’hui, c’est l’ensemble du Moyen-Orient qui est en danger. Plusieurs pays sont attaqués sur leur territoire, puisque Israël mène régulièrement et en toute impunité des assassinats et des frappes relativement ciblées en Syrie et en Iran, et des frappes moins précises (c’est-à-dire tuant plus de civils) au Liban, quand il ne recourt pas au terrorisme en piégeant des appareils de communication. De tels agissements constituent sans conteste des exemples de casus belli en droit international. Ils tuent ou mettent en danger, directement ou indirectement, des milliers de civils, dont des femmes et des enfants. Le lundi 23 septembre 2024, en une seule journée de frappes israéliennes massives au Liban, on dénombrait 492 morts dont 35 enfants. Au 4 octobre 2024, le bilan cumulé s’élevait à plus de 1000 personnes tuées par Israël au Liban. Sans parler, évidemment, des civils gazaouis qui n’ont nulle part où aller, ballottés d’ordre d’évacuation en ordre d’évacuation, dans une bande de Gaza dévastée par l’armée israélienne, affamée, privée d’eau et d’aide humanitaire par le gouvernement israélien, et maintenant en proie à une épidémie de poliomyélite. Chaque jour apporte son lot d’exactions de l’armée israélienne, au regard desquelles les condamnations verbales de la communauté internationale paraissent bien faibles et impuissantes.
Nous connaissons vos prises de positions pour la paix au Moyen-Orient. Nous les croyons sincères. Aussi, nous vous demandons aujourd’hui d’agir plus concrètement et plus efficacement pour que cesse l’impunité d’Israël, pour que les armes se taisent dans la région et pour qu’advienne une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens.
Afin d’œuvrer à la stabilité de la région, au rôle de la France en tant que promoteur de la paix, du dialogue entre les peuples et du respect des droits de l’homme, à défaut d’initier vous-même ces démarches, nous vous demandons un engagement à soutenir toute initiative, et notamment toute proposition de loi, quel que soit le groupe de parlementaires dont elle émanerait, visant à :
- Faire cesser toute livraison d’armes (incluant tout composant pour systèmes d’armes ou équipement à double usage) de la France à Israël, comme demandé par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies le 05/04/2024 ;
- Reconnaître l’État de Palestine aux côtés de l’État d’Israël sur la base des résolutions de l’ONU, principalement les résolutions de l’Assemblée Générale n° 181 (29/11/1947, partition de l’ancienne Palestine mandataire) et A/ES-10/L.30/Rev.1 (09/05/2024, admission de la Palestine comme État membre) ou la résolution du Conseil de Sécurité n° 242 (22/11/1967, restitution des territoires conquis lors de la Guerre des Six-Jours et nécessité de frontières « sûres et reconnues ») ;
- Imposer sans délai un cessez-le-feu dans la bande de Gaza, notamment en prononçant des sanctions diplomatiques et économiques à l’encontre d’Israël et des dirigeants israéliens tant qu’un tel cessez-le-feu n’est pas effectif ;
- Condamner fermement et officiellement l’occupation illégale des territoires palestiniens par Israël depuis 1967, comme l’a fait la Cour Internationale de Justice le 19/07/2024 ;
- Faire respecter l’ordonnance de la Cour Internationale de Justice (CIJ) mentionnant clairement un « risque de génocide » ;
- Demander la suspension de l’accord d’association Union européenne - Israël, puisque le respect des droits humains constitue un élément essentiel d’un tel accord d’association signé par l’UE ;
- Faire respecter la souveraineté territoriale du Liban et de tous les pays de la région.
L’engagement de la diplomatie française est primordial pour les ressortissant·e·s Français·es établi·e·s dans la 10e circonscription législative de l’étranger : en portant une voix forte et singulière pour la paix et la justice internationale, la France retrouverait son rang dans le concert des nations. Au-delà de l’expression de nos convictions humanistes les plus essentielles et les plus universelles, il est question de l’importance de la parole de la France dans la région, du respect dû à toutes les communautés dans les pays où nous sommes établi·e·s, et finalement de la sécurité et de la prospérité de nos ressortissant·e·s, au Moyen-Orient et partout dans le monde.
Signataires :
Jean-Baka Domelevo Entfellner, conseiller des Français·es de l’étranger (Kenya, Ouganda, Rwanda, Burundi, Tanzanie, Zambie, Zimbabwe) élu à l’AFE
Jean-Daniel Chaoui, conseiller des Français·es de l’étranger (Madagascar), membre honoraire de l’AFE
Jean-Christophe Bégué, conseiller des Français·es de l’étranger (Togo, Ghana)
Gaël Claquin, conseiller des Français·es de l’étranger (Mozambique, Afrique du Sud, Namibie, Botswana)
Rafaël Pleutin, conseiller des Français·es de l’étranger (Égypte)
Arsène Atindehou, conseiller des Français·es de l’étranger (Bénin)
Daniel Waide, conseiller des Français·es de l’étranger (Rwanda, Kenya, Ouganda, Burundi, Tanzanie, Zambie, Zimbabwe)
Kalliopi Ango Ela, ancienne conseillère à l’AFE et ancienne sénatrice représentant les Français·es établi·e·s hors de France
Aude Demoustier, conseillère des Français·es de l’étranger (Kenya, Ouganda, Rwanda, Burundi, Tanzanie, Zambie, Zimbabwe)
Esther Pialot, conseillère des Français·es de l’étranger (Cameroun et Guinée équatoriale)
Marianick Urvoy, ancienne conseillère des Français·es de l’étranger (Égypte)
Madeleine Katende Tshikunda, conseillère des Français·es de l’étranger (République Démocratique du Congo)
Bruno Martinato, conseiller des Français·es de l’étranger (Côte d’Ivoire et Libéria, 9e circonscription législative), ancien casque bleu de la FINUL (2012-2014)
Michel Gleyze, conseiller des Français·es de l’étranger (Éthiopie, Soudan et Soudan du Sud)