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Durabilité : Le devoir de vigilance des entreprises sur leur chaîne de valeurs

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Écrit par Pirola Pennuto Zei & Associati
Publié le 7 novembre 2022, mis à jour le 8 novembre 2022

Le devoir de « Due diligence » de la filière de production des entreprises constitue l’un des piliers de la stratégie européenne pour une transition des entreprises vers un modèle économique plus durable. Point sur l’état de la réglementation européenne et de certains Etats partenaires stratégiques de l’Italie.

 

La Commission européenne a présenté le 23 février dernier sa proposition de directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité, dans le cadre de sa stratégie renouvelée en matière de finance durable.
Cette proposition s’inspire notamment de la législation française adoptée en mars 2017 (« Loi de Vigilance ») applicable aux groupes français employant plus de 10.000 salariés dans le monde ou 5.000 en France, ainsi que de la loi allemande adoptée en juillet 2021, dont l'entrée en vigueur est prévue à partir du 1er janvier 2023 (Lieferkettensorgfaltspflichtengesetz – LkSG) pour les entreprises dépassant également certains seuils dimensionnels. 

La proposition de directive, comme les lois françaises et allemande, vise à favoriser un comportement durable et responsable des entreprises tout au long de leur chaîne de valeur grâce à son application extraterritoriale.

De la rétribution équitable à l’environnement

Plus précisément, le projet de directive introduit un devoir de vigilance pour les entreprises européennes et non, qui seront tenues de prévenir, faire cesser ou atténuer les incidences négatives de leurs activités en matière de droits de l'homme (travail des enfants, exploitation des travailleurs, rétribution équitable, etc) et sur l'environnement (pollution, perte de biodiversité, etc).
La directive définit « les incidences négatives sur les droits de l’homme et sur l’environnement » comme les violations des droits ou des interdictions consacrées par les conventions internationales énumérées par la proposition.

Champ d'application

Le projet prévoit une application tant aux entreprises situées dans le territoire de l’Union européenne que, de manière extraterritoriale, à celles dont le siège est situé à l’extérieur de l’UE mais qui y sont actives, selon les critères suivants :

a) les entreprises avec siège social dans le territoire de l’UE :
- avec un effectif de plus de 500 salariés et un chiffre d'affaires mondial supérieur à 150 millions d’euros ;
- avec un effectif de plus de 250 salariés et un chiffre d'affaires mondial de plus de 40 millions d'euros, dès lors qu’au moins 50 % de ce chiffre d’affaires est réalisé dans un ou plusieurs des « secteurs à fort impact » soit les secteurs textile, agroalimentaire et minier ;

b) les entreprises de pays tiers opérant dans l'UE dont le chiffres d’affaires réalisé dans l'UE dépasse les seuils indiqués pour les entreprises européennes.
En ce qui concerne le petites et moyennes entreprises (PME) y compris les micro-entreprises, elles restent formellement exclues des obligations de la proposition de directive, en raison des coûts élevés qu'elles devraient soutenir si elles y étaient directement soumises. Cependant, les relations d'affaires qu’elles entretiennent souvent avec les entreprises soumises à la directive entraîneront quoiqu’il en soit des coûts significatifs également pour les PME insérées dans la chaine de valeur des entreprises soumises au devoir de due diligence les concernant et qui devront donc se conformer aux critères minima de durabilité visés par la directive.
En effet, le devoir de vigilance des grandes entreprises qui y sont soumises, doit être implémenté non seulement par les entreprises concernées vis-à-vis de leurs filiales dans le monde entier, mais aussi à l’égard de leurs fournisseurs de produits et services faisant partie de la chaîne de valeur et avec lesquelles il existe une relation commerciale établie.

Les obligations de vigilance des entreprises

Afin de se conformer à l'obligation de vigilance prévue par la proposition de directive, les entreprises seront tenues:
a) d’intégrer le devoir de vigilance dans leurs politiques et les mettre à jour annuellement ;
b) d’identifier les effets négatifs réels ou potentiels sur les droits de l'homme et l'environnement de leur activité;
c) de prévenir ou atténuer les effets potentiels ;
d) de cesser les effets réels ou les minimiser ;
e) d’établir et maintenir une procédure de signalement d’irrégularités ;
f) de rendre compte publiquement du respect du devoir de vigilance.

En outre les grandes entreprises, qu'elles soient basées dans l'UE ou dans des pays tiers, devront adopter un plan pour s'assurer que leur modèle d'entreprise et leur stratégie de production et de commercialisation sont compatibles avec les exigences de la transition vers une économie durable et avec les objectifs fixés par l'Accord de Paris.

Obligations des administrateurs

La proposition de Directive prévoit ainsi que les administrateurs des entreprises sont également tenus de respecter l’obligation de vigilance lorsqu'ils prennent des décisions, à moyen et à long terme.

Pouvoir de contrôle et sanctions

Afin de renforcer la portée contraignante des obligations de vigilance, chaque État membre désignera les autorités administratives chargées de surveiller le respect de ces obligations et de sanctionner les entreprises en cas de violation. Les sanctions seront fixées par chaque Etat membre.

Au niveau européen, la Commission mettra en place un réseau européen des autorités de contrôle, qui sera composé de représentants des organismes nationaux afin d'assurer et de favoriser la coopération, la coordination et l'alignement des pratiques réglementaires (d'enquête, de sanction et de contrôle) des autorités de contrôle ainsi que le partage d'informations entre elles.

En outre, le législateur européen a prévu un système de responsabilité pour les entreprises en cas de violation du devoir de diligence comportant un "effet négatif" causant un préjudice.

Pour que ce projet de directive entre en vigueur, il faut attendre l'approbation par le Parlement et le Conseil de l'UE et la transposition de la directive par les États membres, qui disposeront de deux ans après son entrée en vigueur.

Notons cependant que les entreprises italiennes fournisseur ou sous-traitants, notamment - mais pas seulement - dans la filière du textile, de la chaussure et de la maroquinerie, des grands groupes français de la mode et du luxe, sont déjà concernées par le sujet, étant insérées dans la chaine de valeur de ces groupes déjà assujettis à la Loi Vigilance, tout comme un nombre très important d’entreprises italiennes de l’industrie manufacturière sera visé par l’entrée en vigueur imminente de la loi allemande LkSG, sans attendre donc la transposition en droit italien de la directive.

 

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En collaboration avec Martina Lucchetti, Pirola Pennuto Zei & Associati

 

 

Pirola Pennuto Zei Associati
Publié le 7 novembre 2022, mis à jour le 8 novembre 2022

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