Pour la seconde fois en quelques années, une femme candidate à la Maison Blanche a échoué à se faire élire à la tête de la première puissance mondiale après une campagne où la question du genre a été un élément central.
Contrairement à Claudia Sheinbaum qui s'est imposée au Mexique comme la première présidente nord-américaine il y a quelques semaines, Kamala Harris, comme Hillary Clinton en 2016, a buté sur le dernier obstacle.
En campagne pour Kamala Harris, l'ancienne secrétaire d'Etat avait appelé les Américains à briser enfin "le plus haut, le plus difficile des plafonds de verre" en élisant la candidate démocrate. En vain.
Si ces défaites tiennent évidemment à la personnalité et la popularité de leur adversaire, Donald Trump dans les deux cas, pour de nombreux observateurs la question de la misogynie de la société américaine est également un facteur.
Car Kamala Harris et Donald Trump ont clairement montré des visions radicalement opposées de la condition des femmes et de leurs droits.
Le républicain a en effet misé sur les codes virilistes et toute sa campagne a été émaillée de commentaires insultants ou méprisants à l'égard des femmes, venant de lui ou de ses relais politiques et médiatiques.
Il n'a pas tari d'éloges sur les dirigeants à poigne, il s'est entouré de champions de sports de combat et a tenu par-dessus tout à projeter une image de force.
Il s'est présenté en "protecteur" des femmes, mais assurant qu'il les protègerait "que cela (leur) plaise ou non", et a courtisé assidûment l'électorat qui, pêle-mêle, plébiscite les cryptomonnnaies, le MMA et considère que la société américaine a sombré dans le "wokisme".
Donald Trump a également décrit Kamala Harris comme une "attardée mentale" ou une "folle" qui serait, si elle devenait présidente, "un jouet" pour les autres dirigeants du monde.
Cette conception traditionnelle de la place des femmes n'a pas eu d'effet repoussoir sur une partie de l'électorat féminin.
"A sa place"
La démocrate elle-même n'a pas fait ouvertement campagne sur le fait qu'elle pouvait devenir la première présidente des Etats-Unis.
Mais elle s'est beaucoup appuyée sur des femmes célèbres telles que Beyoncé, Jennifer Lopez, Lady Gaga ou Oprah Winfrey, en pariant que son message toucherait même des électrices conservatrices.
Elle a également porté les libertés des femmes, faisant en particulier du droit à l'avortement l'une des pierres angulaires de sa campagne. Mais cela n'a, semble-t-il, pas été suffisant pour rallier assez de femmes conservatrices modérées, comme elle l'espérait.
Lors d'un meeting de campagne, Michelle Obama avait dénoncé dans un discours enflammé le deux poids deux mesures dans le traitement des deux candidats à la Maison Blanche.
"Nous attendons d'elle qu'elle soit intelligente et qu'elle s'exprime clairement, qu'elle ait une politique claire, qu'elle ne montre jamais trop de colère, qu'elle prouve encore et encore qu'elle est à sa place", avait-elle lancé à la foule.
"Mais pour Trump, nous n'attendons rien du tout. Aucune compréhension de la politique, aucune capacité à construire un argument cohérent, aucune honnêteté, aucune décence, aucune morale", avait dénoncé l'ex-Première dame des Etats-Unis.
Dans une vidéo datant de 2021, qui a ressurgi cet été, le futur vice-président de Donald Trump, le sénateur J.D. Vance, a accusé les démocrates au pouvoir d'être une bande de "femmes à chats malheureuses" sans conscience de l'"intérêt direct" du pays, puisque dépourvues de progéniture.
Kamala Harris, qui n'a pas d'enfants biologiques, élève avec son mari Doug Emhoff les enfants que ce dernier a eus d'une précédente union.
Au cours des sept dernières années, selon l'American Enterprise Institute, la proportion de jeunes hommes qui estiment que les Etats-Unis sont allés "trop loin" dans la promotion de l'égalité des sexes a plus que doublé.