Le parti au pouvoir au Japon a perdu sa majorité à la chambre basse du Parlement lors de législatives dimanche, pour la première fois depuis 2009 selon des projections, un échec cuisant pour le nouveau Premier ministre japonais Shigeru Ishiba qui avait convoqué ce scrutin anticipé.
Le parti au pouvoir au Japon a perdu la majorité absolue à la chambre basse du Parlement, pour la première fois en 15 ans, à l'issue des législatives de dimanche, selon des projections, un échec cuisant pour le nouveau Premier ministre Shigeru Ishiba.
Celui-ci avait lui-même convoqué ces élections anticipées, quelques jours seulement après avoir pris ses fonctions le 1er octobre, espérant bénéficier d'un état de grâce pour consolider son pouvoir en renforçant la position de son Parti libéral-démocrate (PLD), qui a gouverné le Japon presque sans interruption ces sept dernières décennies.
Mais la chaîne de télévision nationale NHK et d'autres médias ont annoncé dans les heures qui ont suivi la fermeture des bureaux de vote que le PLD ainsi que son partenaire de coalition de longue date Komeito (centre droit) n'avaient pas obtenu les 233 sièges nécessaires pour gouverner sans avoir à négocier avec d'autres partis.
Il s'agit même, d'après ces projections, du pire résultat enregistré depuis 2009 par le Parti libéral-démocrate, et ce à l'issue d'une campagne au cours de laquelle il a pâti d'une forte inflation dans l'archipel nippon et des retombées d'un scandale financier.
La NHK a rapporté lundi matin que le PLD et Komeito n'avaient obtenu que 208 des 465 sièges de la chambre basse, avec 22 sièges restant à pourvoir.
Aux précédentes législatives de 2021, le PLD avait eu la majorité absolue, avec 259 sièges. Komeito en avait quant à lui 32.
- "Sévèrement jugés" -
Un tel résultat serait quasi-inédit dans l'histoire du PLD, qui a réussi à se maintenir au pouvoir presque sans interruption depuis 1955.
La défaite s'annonce sévère pour Shigeru Ishiba, 67 ans, devenu Premier ministre après avoir pris la tête de ce parti.
"Nous avons été sévèrement jugés", a-t-il déclaré à la NHK.
Les électeurs "ont exprimé leur fort désir de voir le PLD réfléchir (aux causes de sa défaite) et devenir un parti qui agira en accord avec la volonté du peuple", a-t-il ajouté.
"Si nous ne parvenons pas à obtenir une majorité à cause de la sévérité du jugement du public, nous demanderons au plus grand nombre de gens possible de coopérer avec nous", a de son côté dit à des journalistes le responsable des élections au PLD, Shinjiro Koizumi.
Ce revers électoral pourrait affoler les marchés financiers, peu habitués à un tel cas de figure, avertissent des analystes.
- Percée du PDC -
Le Parti démocratique constitutionnel (PDC), la principale force d'opposition, a quant à lui nettement renforcé sa présence au Parlement, a affirmé la NHK qui le créditait lundi matin de 143 sièges, alors qu'il n'en avait que 96 auparavant.
"Les électeurs ont choisi le parti le plus apte à faire avancer les réformes politiques. C'est pourquoi nous avons reçu autant de soutien", a lancé son dirigeant Yoshihiko Noda, Premier ministre pendant quinze mois en 2011-2012, selon Kyodo.
Cet homme de 67 ans a promis d'engager des "discussions sincères avec divers partis", martelant que "notre philosophie de base est que l'administration PLD-Komeito ne peut pas continuer", d'après Fuji-TV.
M. Noda avait critiqué samedi "la politique du PLD consistant à mettre en oeuvre rapidement des mesures pour ceux qui leur donnent beaucoup d'argent".
Toutefois, sa posture "est assez similaire à celle du PLD. Il est fondamentalement conservateur", avait expliqué à l'AFP Masato Kamikubo, politologue à l'université Ritsumeikan, avant le scrutin.
- Scandale financier -
Le PLD peine à tourner la page d'un scandale de "caisses noires", qui avait déjà contribué à l'impopularité du précédent Premier ministre, Fumio Kishida.
Shigeru Ishiba avait assuré samedi pendant un rassemblement électoral à Tokyo que son parti voulait "repartir sur de nouvelles bases en tant que parti équitable, juste et sincère".
Il avait promis aux électeurs "un nouveau Japon", espérant appliquer son programme de renforcement de la défense, de soutien accru aux ménages à faibles revenus et de revitalisation des campagnes japonaises.
Mais alors que M. Ishiba s'était engagé à ne pas soutenir la campagne des membres incriminés dans le scandale, le quotidien Asahi a rapporté que le PLD avait versé 20 millions de yens (122.000 euros) aux sections locales dirigées par ces personnes.
De quoi provoquer la fureur de l'opposition et la colère des électeurs, alors même que l'envolée persistante des prix, qui érode le pouvoir d'achat, alimente leur frustration.
Shigeru Ishiba est également critiqué pour avoir fait marche arrière sur plusieurs sujets depuis son élection, comme la possibilité pour un couple marié de ne pas porter le même nom de famille et une plus forte taxation des plus-values.
Shigeru Ishiba avait longtemps été un outsider au sein du PLD, n'hésitant pas à critiquer ses dirigeants et les dynasties politiques, ce qui lui valait une certaine popularité - une image qui s'est rapidement écornée tout au long de la campagne.