Édition internationale

Trois ans de guerre en Ukraine vécus de Pologne : " Je me sens trahi, sans espoir " 

La marmite bouillait depuis au moins 2014. La Pologne alertait tandis que l’Ouest riait sous cape devant les mises en garde de cette trouble-fête, qui semblait empêtrée dans des tensions accumulées avec son voisin russe depuis des siècles. Ce 24 février 2025 a un goût amer pour Darek, Polonais pourtant combatif de 60 ans qui connait bien la Russie ; il vit très mal les négociations menées par Donald Trump avec Vladimir Poutine... Comme un air désagréable de "déjà-vu".

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Écrit par Bénédicte Mezeix-Rytwiński
Publié le 24 février 2025, mis à jour le 4 mars 2025

 

24 février 2022, la bascule

Dans la nuit du jeudi 24 février 2022, Vladimir Poutine a lancé une opération militaire contre l'Ukraine : des frappes russes ont ciblé de nombreuses villes du pays. Et pendant que la Pologne se préparait à accueillir des milliers de réfugiés, l’Ouest se réveillait. Trois après, la Pologne a montré sa détermination pour protéger les frontières du continent. Pas un jour ne passe sans que les médias, européens ou internationaux ne citent le pays, commentent, analysent sa position. Sauf que…

 

À l’approche du 24 février la Pologne protège les Ukrainiens jusqu'en 2025, mais...

 

Ce 24 février 2025 a un goût amer : Darek, Polonais de 60 ans, qui connait bien la Russie, se sent mal depuis quelques jours. « Je me sens sans espoir, trahi… oui, c’est ça, sans espoir. », expliquant que depuis le début des négociations le scepticisme le gagne. « En tant que Polonais, c’est dur ce qui se passe en ce moment entre Donald Trump et Vladimir Poutine. » Pourquoi ? Il reprend : « Nous, Polonais, avons déjà rencontré des situations similaires au cours de notre Histoire, nous avons déjà été trahi un certain nombre de fois, comme à Yalta, par-exemple donc je ressens beaucoup d’empathie pour les Ukrainiens aujourd’hui et puis, j’ai aussi peur que cela arrive dans le futur, à la Pologne », rajoute cet homme imposant qui ne se laisse pourtant pas si facilement impressionné. « La Pologne a dû faire face à des mécanismes similaires, reprend-il, quelqu’un décide pour vous et vous vous retrouvez exclus des négociations ».

Mais c’était le seul moyen de faire assoir Vladimir Poutine à la table des négociations, non ? « Oui, concède Darek, une rencontre entre Américains et Russes, c’est un levier tactique pour débuter des négociations, mais le revirement de Donald Trump après sa rencontre avec Vladimir Poutine a de quoi inquiéter pour l’avenir. »

Le Premier ministre Donald Tusk a admis à Paris que « Les relations transatlantiques [entraient] dans une nouvelle phase » et cette nouvelle phase est anxiogène pour le pays, qui assure la présidence tournante du Conseil de l'Union européenne jusqu'au mois de juin 2025 et vise à consacrer près de 4,7% de son PIB à la défense, en 2025, ce qui le place en tête au sein de l'OTAN. 

Quant au président de la République de Pologne, Andrzej Duda, à Washington pour s'entretenir avec Donald Trump a confirmé que son homologue américain envisageait de renforcer la présence de l'armée américaine en Pologne. De son côté, la Maison Blanche a déclaré dans un communiqué que Donald Trump avait confirmé l'étroite alliance entre les deux pays.

Pour la nation polonaise, le traumatisme d’avoir été rayé de la carte pendant 123 ans est encore vif, c'est pourquoi le sort de l'Ukraine les touche profondément, eux qui ont eu à combattre la Russie depuis 1492 et ont connu la domination russe puis soviétique.

Dès la fin de la PRLPolska Rzeczpospolita Ludowa - jusqu'en 1989, la Pologne a été réduite à l'état de satellite de l'URSS, le pays a immédiatement eu des ambitions euro-atlantiste, apportant également son soutien à l'Ukraine et la Géorgie. La Pologne a d'ailleurs été le premier pays à reconnaitre l'indépendance de l'Ukraine. Quant à la Russie, elle n'a cessé de jouer la carte de l'agressivité, en s'appuyant sur un usage politique de l'histoire, avec les pays qui la bordent.

Au cours de l'année 2021, alors que des signaux laissaient présager une intervention russe imminente en Ukraine, la Pologne indiquait, par la voix du Secrétaire d’État à l’intérieur Maciej Wąsik, se tenir prête à un scénario de déplacement massif de population. 

 

Une partie d'échec

Donald Trump, en shérif de district est bien décidé à conduire son entreprise géopolitique comme il dirige The Trump Organization : en business man, avec un « deal » sur le lithium, le cobalt, le tantale ukrainiens à la clé.

 

Entretien : Guillaume Pitron, « La Guerre des métaux rares » pas si rares que ça — 1/3

 

Le Tsar-dictateur, Vladimir Poutine drapé depuis 25 ans dans la revanche n’est pas près de lâcher du terrain.

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, est accusé par Donald Trump de dictature, argumentant qu’il n’y a pas eu d'élections en Ukraine - une situation en réalité provoquée par la loi martiale en vigueur depuis le début de l'invasion russe en 2022.

D’ailleurs, quelle invasion ?

 

 « La femme du sous-officier vous a menti en disant que je l'ai fait fouetter ; elle a menti, je vous jure qu'elle a menti. C'est elle qui s'est fouettée elle-même. »
Le Revizor – Le Gouverneur, comédie en cinq actes de l’écrivain russe Nikolaï Vassilievitch Gogol

 

L’exclave russe de Kaliningrad est-elle un danger direct pour la Pologne ?