L’alpiniste française Élisabeth Revol, pourtant toute fine et toute menue, a escaladé le Nanga Parbat, 8.126 mètres et a conquis le cœur du public polonais avec son histoire. Une présentation de son livre: Vivre Ma Tragédie au Nanga Parbat a eu lieu le 19 février 2020 à Varsovie au cinéma Luna. Les deux salles étaient pleines à craquer et remplies de personnes voulant entendre l'histoire de l'expédition hivernale himalayenne d’Élisabeth Revol et de Tomek Mackiewicz. La réunion a été organisée par Agora et le débat a été animé par Dorota Wellman.
Une histoire extraordinaire
En janvier 2018, toute la Pologne retenait son souffle et vivait l'histoire de la difficile ascension du Nanga Parbat et de l’opération de sauvetage qui s’en est suivie. L’ascension de la montagne a finalement été réussie mais l'alpiniste polonais Tomek Mackiewicz est mort en effectuant la descente des 8.126 mètres. Sa partenaire Élisabeth Revol, qui a survécu de façon miraculeuse, a décrit toute la tragédie dans son livre récemment publié en Pologne. Il est rare de voir autant de monde lors de la publication d’un livre en Pologne. L'intérêt pour les montagnes et le magnifique récit de la belle alpiniste sont à l’origine d’un tel engouement.
Une alpiniste chevronnée
Élisabeth Revol a d'abord parlé des débuts de sa carrière d'alpiniste dans les Andes, de son amour pour la montagne et des raisons pour lesquelles elle fait de l’escalade. La gratitude et les émotions qu’elle éprouve envers la montagne ainsi que les moments extraordinaires qu’elle a vécus là-bas y jouent un grand rôle. Ses deux ascensions solitaires du sommet de Lhotse, un sommet pourtant fatal pour le grimpeur polonais Jerzy Kukuczka, ont permis au public de se rendre compte de l’athlète extraordinaire qu’ils avaient en face d’eux. Dans toute expédition, il est important de choisir un bon partenaire. Tomek Mackiewicz l’était pour Élisabeth.
Une ascension fatale
L'histoire de l’ascension fatale du Nanga Parbat racontée par cette alpiniste française était à couper le souffle. Dans le livre, l'ascension en elle-même n'y est que brièvement décrite. Les experts ont demandé s’il n’aurait pas été plus prudent de ne pas aller au bout compte tenu de l'état de santé de Tomek. Revol a expliqué que l'Himalayisme d'hiver diffère de l’himalayisme d’été parce qu’en raison des changements météorologiques, les tentatives pour atteindre le sommet sont souvent reportées. Ils ont ainsi attendu quelques jours le bon moment avant d’atteindre le sommet. Tomek était très enthousiaste parce que c'était pour lui une nouvelle occasion d’atteindre le sommet de Nanga Parbat.
Malheureusement, l'alpiniste française n'a pas pu donner une réponse tout à fait convaincante aux questions qui lui ont été posées sur le fait que Tomek continuait l'ascension, alors que son état ne le lui permettait pas. Après avoir atteint le sommet, quand elle a réalisé à quel point l’état de santé de son partenaire s’était dégradé et qu'il était devenu aveugle, elle s’est retrouvée complètement désemparée. Hélas, personne ne peut plus poser de questions à Mackiewicz aujourd’hui. Élisabeth pense qu'il n’était pas conscient de son état. Mais comme ce n’était plus trop le temps de discuter, ils ont commencé une tentative désespérée afin d’atteindre la base numéro IV.
Les questions auxquelles elle a eu le plus de mal à répondre concernaient le moment où elle a dû décider de quitter Tomek en haut de la montagne et de descendre seule. Elle était tout le temps en contact avec des personnes organisant l'opération de sauvetage. Tout en réussissant à descendre 800 mètres plus bas, où Elisabeth a joué le rôle de guide et a essayé d’aider Tomek dans une situation impossible. L'hypothermie et le début du mal aigu des montagnes de son partenaire n'ont pas permis de continuer la marche. Mackiewicz avait déjà un début d’œdème pulmonaire et il ne pouvait plus respirer.
Élisabeth Revol, voyant le transport en hélicoptère comme la dernière chance d'aider Tomek, et cet hélicoptère ne pouvant transporter qu'une seule personne, elle a décidé de laisser son partenaire dans une crevasse et de continuer à descendre seule. Cette sage décision lui a sauvé la vie. Tomek n'avait aucune chance. Les conditions météorologiques n’ont hélas pas permis à l’équipe de secours de lui venir en aide. Et ainsi Nanga Parbat a englouti une nouvelle victime, une victime qui aimait cette montagne par-dessus toutes les autres.
Un retour difficile
Malheureusement, ces expéditions tragiques sont souvent suivies plus tard par une série d'accusations et de commentaires désagréables. Cela a également été vécu par Reinhold Messner, qui a perdu son frère au Nanga Parbat et lui a survécu. Il a subi de très lourdes accusations d’inconscience et d'égoïsme. Il a été accusé d’avoir provoqué la mort de son frère. De même, Revol a dû entendre de terribles accusations et des soi-disant conseils de personnes qui n'étaient pas là et ne connaissaient pas la situation exacte. Elle en parlait d'une voix blanche, ne sachant pas qu’un tel comportement peut parfois être une spécialité polonaise (Tragédie de Smolensk).
Un public ému et conquis
Le public était enchanté. Ils ont remercié l’alpiniste pour son superbe livre par de longs applaudissements.
La queue pour recevoir une dédicace ou un autographe de l’auteure était gigantesque. Peut-être n’avait-on pas vu une telle queue en Pologne depuis les années 80…