L’étranger parfois perçu par certain.e.s comme vaste et potentiellement effrayant dû à sa diversité sera pour d’autres l’opportunité de s’y découvrir, s’y construire, se rencontrer à travers l’autre, mais également au travers de ses propres expériences, sans forcément penser à un avenir professionnel international. Rencontre avec des jeunes partis étudier en Amérique du Nord.
Une attraction aux raisons multiples
Pour certain.e.s, le désir de partir à l’étranger est en partie lié à un contexte politique dans leur pays. Ce fut le cas de Friya étudiante anglaise. « J’ai décidé de m’intéresser à l’étranger durant le Brexit en Angleterre. J’étais vraiment énervée par ce qui se passait. Consciente que vivre à l’étranger pouvait être difficile, je souhaitais garder une connexion avec l’Europe ». Pour, Lucas diplômé français de l’Université de Montréal, cette décision était rattachée à des raisons personnelles, mais également à un concours de circonstances, « je voulais fuir là d'où je venais et l’idée de l’inconnu dans l’étranger m’attirait. Mon départ était aussi lié au fait que je n’avais rien eu sur APB ». Ce fut également le cas de Sarah, diplômée française en études internationales à Montréal. « À 18 ans, je suis partie étudier au Canada principalement, car les opportunités qui s’ouvraient à moi en France ne me correspondaient pas. Je voulais voir ce qu’il se passait en Amérique du Nord, découvrir leur pédagogie et leurs méthodes d’enseignement. J’en suis ravie ». Nous pouvons retrouver une certaine similarité chez Hélène qui n'étant pas comblée par ses choix postbac, décide de réaliser son rêve, étudier à l’étranger. Ce rêve fut aussi guidé par son entourage « mon copain du moment avait de son côté tout planifié depuis longtemps pour venir s’installer à Montréal. Étant folle amoureuse et n’ayant pas vraiment de plan en France, j’ai décidé de chercher des formations à Montréal ».
Pour Arthur, étudiant à l’Université de Québec, ce fut la curiosité qu’il l’a poussé vers l’étranger. « Je suis très curieux. Je ne pense pas que le mode de vie « à la française » ou la culture française aient plus de valeur qu’une autre et que tous les Français.e.s soient prédisposé.e.s à apprécier ce mode de vie ou cette culture mieux qu’une autre. C’est pourquoi je suis à la recherche de ma place. Je recherche une culture dans laquelle je me sentirais proche, une communauté au sein de laquelle je me sentirais épanoui ». Pareillement pour Henry qui a vécu 3 ans au Canada. « Je suis assez curieux et aventurier de base, puis venant d’une petite ville et d’un environnement relativement fermé, j’avais envie de découvrir de nouvelles choses et de changer d’air ».
Pour d’autres, l’étranger était un défi personnel. Katerina professeure grecque récemment diplômée se demandait si l’étranger était faisable pour elle. « Pour moi, l’étranger signifiait une langue, une culture et une vie au quotidien différentes. C’était l’idée d’affronter la solitude et l’éloignement avec ma famille et mes ami.e.s. Je souhaitais savoir si j’en étais capable ». À cela, s’ajoutait son désir de se parfaire au niveau professionnel. « J’adore enseigner et je pense qu’en enseignant à l’étranger et apprenant les méthodes d’enseignement d’autres horizons, je pourrais être meilleure, car j’aurais plusieurs points de vue et sources d’inspiration ».
Pour Edwina, qui a étudié au Canada puis aux Pays-Bas, le choix de l’étranger coulait de source. « Venant d’une famille bilingue et internationale, et ayant des parents qui ont vécu dans d’autres pays étant jeunes, pour moi cette décision faisait sens ».
Gagner en maturité
L’étranger a permis à Friya de mûrir. « D’une certaine façon, partir de chez mes parents était une nécessité pour grandir et gagner plus rapidement en maturité ». Ce fut une expérience formatrice pour Sarah « la vie à l’étranger m’a fait mûrir rapidement, m’a émancipé, et m’a apporté de formidables outils pour le futur. Effectivement, partir loin de son cercle familial et social te permet d’être face à toi-même, c’est le moment d’abandonner toute pression sociale quelle qu’elle soit et de ‘faire ta connaissance’ ».
Cette découverte de soi-même se retrouve chez Philémon étudiant français. « Mon passage à Montréal m’a permis de me construire et devenir la personne que je suis aujourd’hui. Puis, au-delà de l’expérience personnelle, cette expérience m’a permis de nouer de précieuses amitiés, avec des personnes de tous horizons confondus. J’ai tissé un réseau très riche et diversifié, qui ne peut être que bénéfique ». En effet, l’étranger est synonyme de rencontre et d’enrichissement personnel. Comme pour Henry, « ça m’a apporté plein de nouvelles relations, beaucoup de maturité, d’organisation, de rigueur..., une plus grande ouverture d’esprit et une plus grande culture générale ».
Cet apport fructueux de développement se retrouve également chez Arthur, « je pense que le voyage et plus précisément les expériences humaines expérimentées dans des contextes de travail sont très favorables au développement d’un individu, sinon essentiels à l’éclosion de son plein potentiel ».
L’attachement à son pays
Après avoir vécu dans deux pays différents, Katerina sait à présent que son pays la comblerait amplement. « Cette expérience sera la dernière parce que je pense ne pas être capable de vivre à l’étranger non pas que je ne sois apte d’avoir une vie à l’étranger, mais je sens que ma famille et mes ami.e.s de Grèce me manquent. Je souhaite vivre en Grèce, car je me rends compte que je m’associe mieux avec mon pays et sa culture qu’avec d’autres pays ». L’attachement à son pays fait également écho chez Friya. « Je ne veux pas vivre à l’étranger pour toujours ‘home is home’ ».
Pour d’autres, le retour dans son pays natal n’est pas aussi certain. Pour Philémon, rien n’est fixé, il verra en fonction de ce que l’avenir lui réservera. « S’il est clair que j’aime voyager et habiter à l’étranger, y habiter pour moi n’est pas une condition sine qua non de mon futur. Je sais qu’étudiant dans les relations internationales et me professionnalisant dans ce milieu, je serai probablement amené à voyager dans mes futurs engagements professionnels. Et je sais que je me plairais aussi bien à Londres ou New York que Beyrouth, Bagdad ou Le Caire ».
Cette expérience, à entraîné un engouement chez Sarah. « J’ai envie de continuer de voyager et de découvrir de nouvelles villes où peut-être un jour, je pourrais m’installer définitivement ». Ce désir est évoqué aussi par Lucas, « l’étranger m’a ouvert aux autres et à la différence, j’ai envie de nouer plus de liens avec l’étranger. Je me verrai bien vivre et travailler à l’étranger. J’aime l’idée d’être obligé de créer tout un environnement social et géographique à partir de zéro et de me l’approprier ».
À Arthur de conclure sur l’essence même de l’étranger « oui, je vivrai et travaillerai à l’étranger, mais l’étranger est plus visible dans les mœurs et la culture, les différences se remarquent au niveau des peuples plus qu’au niveau des tracés hasardeux des frontières. L’étranger est d’abord dans ton pays avant d’être ailleurs, c’est une richesse formidable ».