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Avant son départ de Thaïlande, le bilan de la consule française

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courtoisie Ambassade de France - La cheffe de la section consulaire, Samira Abdelli
Écrit par Catherine Vanesse
Publié le 17 juillet 2020, mis à jour le 15 février 2022

Depuis le début de la crise liée au Covid-19, l’ambassade de France en Thaïlande et les services consulaires sont sur le pied de guerre. La cheffe de la section consulaire, Samira Abdelli, revient sur la crise et les aides pour soutenir les Français dans une crise qui n’est pas encore terminée.

Samira Abdelli, chef de la section consulaire à l’ambassade de France en Thaïlande a pris ses fonctions le 1er septembre 2017 et s’apprête à la fin de l’été à quitter son poste pour de nouvelles aventures. Dernièrement, la crise engendrée par les mesures mises en place pour lutter contre l’épidémie de coronavirus a mobilisé de nombreuses ressources de l’ambassade pour répondre aux demandes et aux besoins de la communauté française en Thaïlande. Une communauté, qui selon les derniers chiffres communiqués par l’ambassade de France en Thaïlande, s’élèverait à environ 40.000 personnes dont 13.352 inscrits au registre consulaire. 

A quelques semaines de la fin de sa mission, Lepetitjournal.com/bangkok a voulu faire le point sur la situation des Français en Thaïlande, les problématiques auxquelles a dû faire face la communauté et les mesures mises en place par l’ambassade et la section consulaire pour assister les Français, de passages ou résidents, face à la crise sanitaire et économique liée au Covid-19.

Quelles problématiques ont le plus mobilisé l’ambassade et le consulat durant la crise du Covid-19 ?

Les problématiques ayant sollicité la plus grande mobilisation ont été le suivi des dispositifs sanitaires mis en œuvre par les autorités thaïlandaises ; la gestion des communautés françaises de passage (maintien d’une offre aérienne en lien avec Air France, vols spéciaux avec publics prioritaires identifiés par le service social, 3 vols affrétés en lien avec Qatar Airways pour plus de 1.200 de nos ressortissants, problématique de l’extension automatique de visas qui a impliqué un travail de coordination entre les pays européens présents en Thaïlande après l’établissement de plus de 3.500 attestations) ; l’appui à la communauté résidente (mise en œuvre du plan sanitaire, social et scolaire du gouvernement au profit des Français de l’étranger, maintien d’un service consulaire traditionnel d’urgence) et l’information de notre communauté et de ses représentants.

Estimez-vous que cette crise est terminée pour les expatriés en Thaïlande, pourquoi ?

Cette crise dans ses versants économique et social n’est manifestement pas terminée. 

La crise touche assez durement les auto entrepreneurs et chefs d’entreprises du secteur du tourisme, notamment dans les provinces de Phuket et Surat Thani. Nombre d’entre eux craignent de ne pas être en mesure de faire face à la situation (manque de trésorerie ; absence de perspective de reprise d’activité ; accès limité aux dispositifs d’aides mis en place par les autorités publiques locales ou les facilités mises en œuvre au niveau du réseau bancaire). Les salariés français du secteur, qui ont souvent un statut incertain et précaire, sont particulièrement concernés. 

Plusieurs résidents confient réfléchir à un retour en France, notamment lorsque la perte de leur activité entraîne la perte de leur permis de travail et de leur visa. La majorité souhaite néanmoins passer cette épreuve en Thaïlande en insistant sur l’absence de liens familiaux ou amicaux en France, en particulier après des dizaines d’années d’expatriation, et en mobilisant les aides possibles auprès de l’ambassade.

Quel accompagnement l'ambassade a-t-elle accordé aux résidents en difficulté ?

L’ambassade a d’abord cherché à répondre aux inquiétudes de la communauté française :

Un dispositif de réponse téléphonique de crise en présentiel, et organisé également à partir du domicile des agents mobilisés en télétravail, a été mis en œuvre très tôt pour prendre la relève du dispositif classique (standard classique et astreinte consulaire). 

Une adresse générique dédiée à la crise a été mise à la disposition des résidents qui souhaitaient avoir des informations sur les possibilités de retour en France, les restrictions à l’entrée en France ou au retour en Thaïlande (près de 5.000 messages traités). Quatre lignes téléphoniques consulaires dédiées (affaires sociales ; demandes de titres de voyage et de certificats ; état civil) ont également été mises en place pour répondre aux interrogations de la communauté résidente sur le fonctionnement des services consulaires et les conditions de réalisation de leurs démarches pendant la période de suspension d’une partie de l’activité. 

Une lettre d’information consulaire a été adressée toutes les deux semaines à la communauté résidente inscrite au registre des Français. Le site internet de l’ambassade a été mis à jour régulièrement et les réseaux sociaux ont relayé ces informations de manière réactive.

Les services consulaires ont également organisé un système de rendez-vous pour prendre en charge les urgences avérées. En pratique, plusieurs démarches qui nécessitent notamment une comparution personnelle sont restées accessibles en présentiel (délivrance de titres de voyage 3 fois par semaine, réception du public pour certaines démarches d’état civil, de légalisation ou de certificats urgents) ;

Un accompagnement spécifique des personnes vulnérables a été mis en place :

Un formulaire dédié recensant les besoins des résidents français a été mis en ligne. Les 49 résidents ayant signalé des problèmes de santé ont été contactés. De manière plus générale, une campagne d’appels a été organisée à l’adresse de notre communauté résidente la plus vulnérable (1.927 inscrits au registre de 70 ans et plus et 49 personnes signalées sur le formulaire). Une majorité d’entre elles a pu s’entretenir avec un agent consulaire. L’opération avait pour objectif de maintenir le lien social et d’identifier les situations les plus difficiles. 

Un accompagnement spécifique des personnes testées positives covid a été organisé (formulaire en ligne ; suivi par le service social, la conseillère santé mondiale et le médecin-conseil du poste) ;

Une cellule d’écoute et d’accompagnement psychologique a été ouverte par l’ambassade début mai 2020 et reste à la disposition de la communauté.

Vous avez pu noter le déploiement d’un plan sanitaire, scolaire et social dans un cadre budgétaire inédit. Nous sommes le seul pays à proposer un tel accompagnement à nos communautés à l’étranger. 

Enfin, l’organisation de la reprise d’activité depuis le mois de juin dernier s’est traduite par un renforcement significatif de l’offre de rendez-vous pour réaliser son titre de voyage, obtenir ses certificats ou réaliser les démarches consulaires habituelles (légalisations, copies conformes, procédure de mariage ou déclaration de naissance). Le niveau d’accueil est supérieur à ce qu’il était avant le déclenchement de la crise et doit permettre à chacun de réaliser ses démarches.

De quelles aides les résidents français en Thaïlande peuvent-ils bénéficier ?

Les résidents peuvent solliciter des secours occasionnels, notamment le secours occasionnel de solidarité prévu par le gouvernement pour les plus démunis. Le dispositif est détaillé sur le site internet.

Par ailleurs, des rapatriements pour indigence et certaines allocations peuvent être examinés au cas par cas. Les résidents sont invités à solliciter le service social à cette adresse social.bangkok-amba@diplomatie.gouv.fr pour identifier le dispositif d’aide adéquat.

Combien de demandes de bourses ont été déposées jusqu’ici cette année ? 

238 dossiers ont été examinés en première campagne (223 présentés en conseil consulaire -CCB1- et 15 hors conseil consulaire). Ces dossiers représentent 859 bourses réparties entre 174 familles et correspondent à 180 demandes de renouvellement et 58 premières demandes.

Lors de la première campagne des bourses en 2019, 160 dossiers avaient été présentés, 574 bourses réparties entre 117 familles (135 renouvellements et 25 premières demandes).

Le montant global des bourses scolaires pour la première campagne de l’année scolaire 2020/2021 est de plus de 1.400.000 euros contre plus de 815.000 euros en 2019. 

Comment expliquez-vous ce chiffre par rapport à l’année dernière ?

L’évolution budgétaire s’explique par la demande croissante de bourses de la part de familles d’enfants scolarisés dans deux établissements homologués depuis peu (BCIS à Phuket et La Petite École Bangkok) et par l’effort financier significatif consenti par l’État pour accompagner les familles particulièrement touchées par la crise sanitaire.

Il faut ajouter à ces demandes de l’année scolaire 2020/2021, les aides spécifiques au règlement du 3ème trimestre pour l’année 2019/2020 qui n’est pas comptabilisé dans le budget mentionné et qui concerne souvent les mêmes familles.

Combien de Français ont déposé une demande pour obtenir l’aide ponctuelle et exceptionnelle (de 124.80 € pour le foyer et 83.20 € par enfant à charge) et combien l’ont obtenue ?

Les demandes d’aide sociale ne s’apprécient pas de manière mécanique. Les ressortissants français à l’étranger, de passage comme résidents, sollicitent souvent l’ambassade sans demander à bénéficier d’un dispositif spécifique. Ils souhaitent qu’une solution puisse leur être apportée dans le cadre d’une situation de détresse donnée. Le rôle du service social est ainsi d’identifier des solutions avec eux et ces dernières n’impliquent pas nécessairement la mobilisation de fonds publics. 

Nous avons reçu un peu plus de 200 demandes d’aide et environ un quart d’entre elles ont donné lieu au versement d’un secours ou d’une aide exceptionnelle. 

A quoi devons-nous nous attendre en ce qui concerne les arrivées de nouveaux expatriés pour les mois ou années à venir ? Avez-vous fait des estimations ?

Nous ne pouvons pas anticiper les projets de venue en Thaïlande de ressortissants français que nous ne connaissons précisément pas. Il est possible que la Thaïlande continue d’attirer de la même manière les retraités comme les plus jeunes, mais la séquence actuelle risque de durer tant que les conditions d’accès au territoire restent restrictives. 

Plusieurs consuls honoraires arrivent prochainement au terme de leur mandat/limite d’âge de 70 ans, dont le premier est celui de Khon Kaen à la fin du mois. Que pouvez-vous nous dire sur le processus de sélection de leurs remplaçants ? 

Le processus de recrutement est en cours. Ce processus a été un peu retardé par le projet initial des autorités thaïlandaises de ne retenir que les candidatures de consuls honoraires de nationalité thaïlandaise. Nous avons donc attendu que le cadre de nomination soit clarifié, ce qui a été fait avec la parution d’instructions de la part du Mofa (ministère des Affaires étrangères en Thaïlande) fin avril dernier. 

La gestion de crise a également légèrement décalé le processus qui a finalement été engagé le 19 mai. L’ensemble des représentations étrangères se trouve dans la même situation. L’appel en candidature est en ligne : https://th.ambafrance.org/Appel-a-candidatures-Consuls-honoraires-de-France-en-Thailande

Sur Khon Kaen, l’agence connaîtra une vacance de fonctions de quelques mois. L’ambassade rétablira temporairement des permanences consulaires dans les provinces qui ne pourront plus compter sur une agence consulaire.

Pourrait-on voir un jour un consul honoraire à Pattaya ? 

La nomination d’un consul honoraire à Pattaya est tout à fait envisageable dans le futur. Elle implique l’identification de candidatures sérieuses de bénévoles prêts à relever ce défi.

Concernant l’utilisation qui est faite de la liste d’adresses emails des Français inscrits au registre consulaire, outre l’ambassade et le consulat, certaines associations semblent pouvoir communiquer à loisirs des messages divers via cette liste dont certains destinataires disent pourtant n’avoir communiqué leur email que dans le cadre de l’enregistrement consulaire. Pouvez-vous nous dire qui a accès à cette liste, comment se passe-t-il lorsqu’ils veulent l’utiliser, quelles en sont les règles et conditions d’utilisation et quelles sanctions sont prévues pour ceux qui ne les respectent pas ? 

Il faut distinguer deux types d’informations qui correspondent à deux cadres juridiques différents. Lorsque vous vous inscrivez au registre des Français vous pouvez également demander à être inscrit sur la liste électorale consulaire de manière à exercer votre droit de vote depuis la Thaïlande lors de certaines élections. Il vous est demandé dans ce cas de communiquer une adresse courriel pour chaque liste. La plupart des usagers indiquent la même adresse. 

La réglementation prévoit que la liste électorale consulaire peut être communiquée à tout électeur inscrit sur la même LEC que vous, tout candidat, tout parti ou groupement politique, les sénateurs et les députés représentant les Français établis hors de France ainsi que vos conseillers (AFE et consulaires).

La procédure est précisée sur le site France Diplomatie.

Dans tous les cas, le demandeur doit fournir l’engagement écrit sur l’honneur à ne pas faire un usage commercial des listes électorales consulaires et à ne pas les utiliser à des fins de politique intérieure de l’État de résidence de l’électeur (art. L330-4 du code électoral). L’usage commercial d’une liste électorale consulaire est puni d’une amende de 15.000€ (art. L113-2 du code électoral).

S’agissant de la liste des Français inscrits au registre, elle est strictement protégée et seules les catégories mentionnées par les textes peuvent êtres destinataires de certaines de ces informations sans jamais pouvoir communiquer des informations politiques.

Vous terminez votre mission en Thaïlande d’ici peu, quel bilan tirez-vous de votre passage ici, en quelques mots ?

J’ai été très honorée d’exercer mes missions dans un pays aussi riche que la Thaïlande. Mon objectif et celui de toute l’équipe a été de faciliter l’accès de notre communauté à son service public en réaménageant une partie des locaux et les procédures ainsi qu’en augmentant de manière significative les capacités d’accueil dans un cadre contraint. 

Les délais d’attente avant l’obtention d’un rendez-vous sont désormais limités et nos équipes ne ménagent pas leurs efforts pour vous accueillir dans les meilleures conditions. Les résultats en la matière sont significatifs. L’accessibilité de votre service public a également nécessité le renforcement de la communication consulaire (mise à jour constante du site internet et lettres d’information régulières). Enfin, la gestion de crise a été un défi que nous avons relevé collectivement et qui demandera encore une importante mobilisation dans le contexte incertain que nous connaissons tous.

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