Le Cambodge finalise son plan climatique 2024-2033 et entend mieux intégrer les enjeux de genre dans sa contribution nationale à la COP30.


Le Cambodge prépare son nouveau cap climatique
Objectif : réduire massivement les émissions de gaz à effet de serre. Le Cambodge finalise sa Stratégie nationale de lutte contre le changement climatique (2024-2033), dans la perspective de la COP30 au Brésil en novembre 2025. À cette occasion, il présentera également sa Contribution déterminée au niveau national (CDN) 3.0 pour 2025-2030.
Genre et climat : encore des progrès à faire
Le 25 avril, lors d'une réunion réunissant la Banque asiatique de développement (BAD), le ministère des Affaires féminines, le ministère de l'Environnement et ONU Femmes, les participants ont dressé un constat clair : l'intégration des enjeux de genre dans la stratégie climatique reste perfectible.
Selon Fatima Verzosa, consultante pour la BAD, si les politiques nationales sur le genre sont solides, leur déclinaison dans les politiques climatiques est encore incomplète. Aujourd'hui, les femmes occupent seulement 18 % des postes de direction dans les secteurs concernés par la CDN, un chiffre tombant à 10 % dans le privé.
Verzosa plaide pour une meilleure prise en compte des données sexuées, des analyses d'impact, des objectifs précis et des budgets dédiés.
Des groupes de travail sous-utilisés
Autre constat : parmi les seize ministères dotés de Groupes d'action pour l'intégration du genre (GMAGs), seuls trois ont réellement participé à la construction des précédentes contributions climatiques. Pourtant, ces groupes existent depuis 2005 pour soutenir l'égalité femmes-hommes dans les politiques publiques.
La spécialiste appelle à renforcer les liens entre GMAGs et points focaux climat, pour une approche plus coordonnée et efficace.
Femmes et climat : une vulnérabilité accrue
Les défis sont nombreux : pollution intérieure liée à l'utilisation de biomasse, accès limité aux financements verts, faible adoption de l'énergie solaire, et un accès à l'électricité limité à 65 % des foyers dirigés par des femmes.
Dans la gestion des déchets, les femmes jouent un rôle clé, souvent dans des conditions précaires. Dans l'industrie du vêtement, le stress thermique expose particulièrement les travailleuses enceintes.
En agriculture, les outils d'adaptation climatique ignorent fréquemment les spécificités féminines, excluant de fait les femmes de certaines ressources vitales. Elles restent également sous-représentées dans les instances de gestion forestière et dans le partage des bénéfices liés aux programmes REDD+.
Côté infrastructures scolaires, 40 % des établissements n'offrent pas de sanitaires séparés pour filles et garçons, accentuant les inégalités. De plus, 80 % des tâches de collecte d'eau incombent toujours aux femmes et aux filles.
Un appel à l'action
Pour Ung Kathaphavy, ministre des Affaires féminines, il est urgent de briser l'invisibilité des femmes dans la lutte contre le changement climatique. Elle rappelle que 58 % du PIB cambodgien repose sur l'économie informelle, majoritairement féminine, et souligne le lien entre crise climatique, violences et exploitation.
« Le changement climatique est un problème créé par l'homme qui peut aussi détruire l'humain », a-t-elle averti.
De son côté, le ministre de l'Environnement, Eang Sophalleth, a insisté sur la nécessité de bâtir une CDN réaliste, "et non un simple exercice d’imagination".
Un chemin déjà entamé
Depuis 2015, le Cambodge a pris des engagements clairs : sa première CDN (1.0) priorisait 58 actions d'adaptation et 32 mesures d'atténuation. En 2020, avec la CDN 2.0, il visait une réduction de 41,7 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030, intégrant pour la première fois six actions spécifiques en faveur de l'égalité de genre.
En 2024, une évaluation de genre de 166 actions climatiques a été menée, confirmant les progrès accomplis mais aussi les marges d'amélioration. Avec la préparation de la CDN 3.0, le Cambodge a aujourd'hui l'opportunité de franchir une nouvelle étape vers une transition climatique réellement inclusive.
Avec l'aimable autorisation de Cambodianess, qui a permis la traduction de cet article et ainsi de le rendre accessible au lectorat francophone.
Sur le même sujet
