Édition internationale

Francophonie des Amériques : Voix et visages d’un monde en construction

Tout au long du Mois de la Francophonie, le Réseau international des Maisons des Francophonies (RIMF), avec le soutien de l’OIF, a donné la parole à celles et ceux qui font vivre le français à travers les Amériques. Ce dossier, qui en marque la clôture, rassemble des portraits, des témoignages et des récits qui dessinent une francophonie diverse, engagée, et bien ancrée dans les réalités du continent.

Galerie de portraitsGalerie de portraits
Mireille Ho-Sack-Wa/Badamie, Jessy Lindsay, Haydée Silva, Alan Nobili, Peter Hominuk, Mariette Mulair, Marcel Morin, Jean-Claude Bernard, Joseph Dunn, Claire-Marie Brisson, Yves Turbide, Peggy Feehan et sénateur Jeremy Stine - Photo LPJ
Écrit par Bertrand de Petigny
Publié le 6 avril 2025, mis à jour le 13 avril 2025

 

 

 

Une initiative portée par le RIMF avec le soutien de l’OIF

Réalisé à l’occasion du Mois de la Francophonie, ce dossier exceptionnel intitulé Francophonie en Amériques – Voix et Visages d'un monde en construction a été coordonné par le Réseau international des Maisons des Francophonies (RIMF), avec le soutien de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Il rassemble une série de portraits, d’entretiens et de récits qui dressent un tableau vivant de la diversité francophone du continent américain.

Bien plus qu’une cartographie linguistique, il s’agit d’une mosaïque humaine, portée par des trajectoires singulières et des engagements concrets.

« La Francophonie ne peut être pensée sans ses périphéries, sans ses marges, sans ses réinventions », affirme Mireille Ho-Sack-Wa/Badamie. Première femme docteure en littérature de la communauté Kali’na, elle propose une refondation de la Francophonie à partir des langues et savoirs autochtones. Son approche, baptisée Armazonisme, milite pour une francophonie ancrée dans les réalités ultramarines.

 

 

 

Un combat pour la visibilité et la transmission

Dans un Ontario encore largement anglophone, Peter Hominuk, directeur général de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), porte une vision affirmée : « Il faut faire entendre nos voix, ici comme ailleurs. Notre présence est politique. » L’AFO défend ainsi les droits des francophones et encourage une présence active et structurée du français dans l’espace public.

Jessy Lindsay, artiste de 24 ans, incarne quant à elle la voix d’une jeunesse franco-ontarienne résolument bilingue et engagée. Son œuvre musicale comme ses prises de position illustrent une volonté de s’affranchir des catégories figées.

 

 

« On n’est pas juste francophones. On est pluriels. » - Jessy Lindsay

 

 

Une université comme symbole d’émancipation

L’Université de l’Ontario français (UOF), à Toronto, symbolise cette volonté d’autonomie et de rayonnement. Née d’un long combat politique et communautaire, elle accueille aujourd’hui une population étudiante diversifiée et engagée. Brice Andy, étudiant camerounais, raconte avoir choisi cette institution pour « étudier en français dans une grande ville anglophone, tout en restant connecté à ses origines ». Pour beaucoup, l’UOF représente un modèle d’intégration linguistique à l’échelle canadienne.

 

 


 

Réveiller les mémoires oubliées

Dans les amphithéâtres d’Harvard, Claire-Marie Brisson enseigne bien plus que le français : elle transmet la mémoire d’une Amérique francophone trop souvent oubliée. « Il ne s’agit pas seulement de langue, mais de patrimoine et de justice historique », insiste-t-elle. Son enseignement reconnecte les étudiants avec des pans entiers de l’histoire nord-américaine.

Ce travail de mémoire s’inscrit aussi dans le paysage. De la Louisiane à la Guyane, en passant par le Manitoba, des monuments s’élèvent pour rendre visible une présence francophone souvent reléguée à la marge. Ces lieux racontent en silence les résistances passées et les espoirs à venir.

 

 

 

Institutions en mutation

Dans la capitale canadienne, l’ACFO Ottawa fête ses 60 ans. Sa directrice, Anik Larivière, entend adapter son action aux réalités changeantes : « La francophonie d’aujourd’hui est multiple. Il faut en tenir compte dans nos actions et notre gouvernance. » Cette évolution passe par l’écoute des jeunes, l’ouverture à la diversité culturelle et la réinvention des modes de mobilisation.

Au Manitoba, Mariette Mulaire se fait l’ambassadrice d’une francophonie économique assumée. Présidente du conseil d’administration de TV5 Québec Canada et figure influente sur la scène internationale économique, elle défend une approche pragmatique.

 

« Il est temps de cesser d’opposer langue et économie. » - Mariette Mulaire

 

 

Des passeurs culturels au cœur de l’action

Figure incontournable de la scène culturelle francophone canadienne, Yves Turbide s’est distingué par son engagement en faveur de la diversité des expressions artistiques. À travers ses multiples responsabilités dans le secteur culturel, il a œuvré pour une francophonie vivante, ancrée dans la création contemporaine. Parmi ses initiatives marquantes figure le site ontarioterredemots.ca, qu’il a contribué à faire émerger : une plateforme dédiée à la mémoire, à la littérature et à la transmission des voix francophones de l’Ontario.

 

 

« Ce qui fait la richesse de la francophonie, c’est sa capacité à accueillir, à se renouveler, à créer des ponts entre les cultures » - Yves Turbide

 

Le travail de mémoire engagé par ce site, entre patrimoine littéraire et découvertes actuelles, incarne précisément cette vision d’une francophonie enracinée et tournée vers l’avenir.

 

 

 

Louisiane : entre institutions fortes et voix passionnées pour la langue française

La Louisiane offre un visage singulier de la francophonie. Sur place, les Alliances Françaises jouent un rôle déterminant dans la revitalisation linguistique et culturelle. Aux côtés d’acteurs comme le CODOFIL, elles soutiennent les écoles d’immersion, les échanges et la visibilité de la langue française dans un contexte anglophone dominant.

Joseph Dunn, militant et passeur culturel, refuse toute forme de défaitisme : « Notre langue n’est pas en train de mourir. Elle se transforme, et c’est à nous de l’accompagner. » Quant à Peggy Feehan, directrice du CODOFIL, elle insiste sur la dimension communautaire : « L’avenir du français passe par l’école, mais aussi par la famille, par la communauté. »

 

 

 

Haydée Silva, une voix francophone au Mexique

Professeure, traductrice et chercheuse, Haydée Silva porte depuis le Mexique un regard attentif sur les dynamiques de la francophonie internationale. Spécialiste des jeux de langage et de la traduction, elle participe activement à la diffusion du français en Amérique latine, tout en soulignant l'importance d’un dialogue constant entre les différentes aires culturelles.

Dans ses interventions, elle insiste sur la nécessité de mieux reconnaître la diversité des espaces francophones : « La francophonie ne peut se penser uniquement depuis l’Europe ou le Nord. Elle se construit aussi depuis les Suds. » Par son parcours et ses travaux, Haydée Silva rappelle que la francophonie est d’abord une affaire de liens humains, de circulation des idées et de respect des pluralités.

 

 

 

Une polyphonie à écouter, un avenir à imaginer

Ce dossier Voix et Visages offre bien plus qu’un panorama : il pose les jalons d’un nouveau récit francophone des Amériques. Une francophonie qui ne se résume pas à une norme, mais s’écrit au pluriel, entre héritages, résistances et créations. Elle existe déjà. Il appartient maintenant à toutes les forces vives — institutions, communautés et citoyens — de la faire grandir.

Et vous, quelle part prendrez-vous dans cette polyphonie francophone ?

 

 

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Les articles de ce dossier ont été réalisés en collaboration avec le RIMF, avec le soutien de l’Organisation Internationale de la Francophonie

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