A l’occasion de la création cette année du premier bureau de la Fondation de France en Asie, la Directrice Générale de la Fondation de France Axelle Davezac était à Hong Kong aux côtés de Julien-Loic Garin, Executive Director pour l'Asie, pour présenter ce nouveau projet ambitieux. Nous les avons rencontrés.
La Fondation de France soutient la philanthropie
Axelle Davezac , vous êtes à la tête de la Fondation de France depuis 7 ans et depuis 15 ans d’associations caritatives. Pouvez-vous nous rappeler ce qu’est et à quoi sert la Fondation de France.
Fondée il y a un peu plus de 50 ans sous l’impulsion du Général de Gaule, la Fondation de France a pour ambition de développer la philanthropie en France au service de la communauté. Cela se fait en accompagnant les mécènes et donateurs pour aider les autres et en faisant vivre des projets d’intérêt général sur le terrain. Nous sommes aujourd’hui le premier réseau de philanthropie en France avec plus de 1000 fondations abritées et plus de 12000 projets chaque année. Nous jouons le rôle de lien entre associations, institutions de recherche, d’éducation ou culturelles et philanthropes.
La Fondation de France s’appuie sur un réseau international. Comment cela fonctionne-t-il ?
Au fil des années, nous nous sommes adaptés à un monde de plus en plus mondialisé et nous avons structuré des collaborations à l’international, au sein d’un réseau européen (Translational Giving Europe) puis aux Etats Unis (Friends of Fondation de France), il y a une vingtaine d’années pour faciliter et accompagner la générosité de donateurs sur le sol américain vers des projets en France et en Europe. Aujourd’hui, l’ouverture de ce bureau en Asie est la suite logique de ce mouvement, pour accompagner les donateurs asiatiques mais aussi pour développer les collaborations entre la France et Hong Kong sur les thèmes de l’éducation, la recherche, l’environnement ou encore la culture. Pour être efficaces dans notre rôle de facilitateurs, il faut à la fois comprendre les envies des mécènes et être proches des institutions et des associations qui mènent les projets.
Hong Kong va devenir le hub pour la philanthropie en Asie
Pourquoi avez-vous choisi Hong Kong ?
Axelle Davezac : L’ambition de Hong Kong de devenir le hub de la philanthropie en Asie, réaffirmée par son Chief Executive John Lee, est un paramètre important dans ce choix mais ce n’est pas le seul. Les longues relations entre la France et la Chine, tout comme la convergence d’intérêts entre Hong Kong et la France sur de nombreux sujets jouent aussi un rôle. Par ailleurs, nous pouvons aider à transformer en actions efficaces les envies exprimées par des entreprises et personnes à Hong Kong pour s’engager dans la philanthropie. Enfin Hong Kong est présente sur les thèmes de la culture, de l’éducation, les arts et la recherche. Sur ces thèmes, nous avons une grande expérience et nous pouvons favoriser les rapprochements entre les initiatives en France et à Hong Kong pour des résultats concrets pour tous.
Julien-Loic Garin : Hong Kong est un hub international en Asie qui attire une large population étrangère. L’important contingent de Français de Hong Kong entretient des liens forts avec la communauté des affaires. Hong Kong a déjà une pratique existante de la philanthropie. Sur le plan juridique et fiscal, Hong Kong offre aussi un environnement avantageux, en comparaison d’autres endroits en Asie, comme la Chine continentale ou Singapour, pour les associations reconnues d’utilité publique comme la Fondation de France. Enfin, pour des raisons économiques et fiscales, de nombreux asiatiques ont choisi Hong Kong comme port d’attache.
La Fondation accompagne les dons depuis l'étranger
Julien-Loïc, vous avez pris la tête de la Fondation de France Asie. Qu’est ce qui fait que vous ayez pris cette décision
J’ai été séduit par le fait que la Fondation de France qui adresse un vaste éventail de causes d’intérêt général. C’est une extension de mon parcours professionnel dans la promotion de la culture française et des échanges entre Hong Kong et la France, avec en plus des artistes et institutions culturelles, la recherche scientifique et l’éducation et malheureusement demain de plus en plus de crises humanitaires qui n’épargnent pas cette partie du monde. Pour bien connaître la société hongkongaise, je trouve qu’il y a un vrai besoin d’accompagnement de la générosité qui n'est pas toujours correctement orientée. Je pense aussi que la volonté politique de Hong Kong de devenir le hub philanthropique de Asie va inciter les family offices à choisir Hong Kong pour affecter une partie de leur fortune dans des actions philanthropiques, que ce soient les asiatiques l’Asie ou le Moyen Orient, comme l’Arabie Saoudite, qui cherche actuellement diversifier les investissements à Hong Kong.
Quelles garanties apportez-vous aux donateurs ?
L’expertise de la Fondation de France vis à vis du tissu associatif français est clé car il est compliqué de faire des dons depuis l’étranger. La Fondation de France sélectionne et suit les meilleurs projets en rapport avec les attentes des donateurs, en créant un lien sécurisé. Dans le domaine de l’environnement, par exemple, nous sélectionnons et développons des collaborations avec des projets en France qui correspondent à ce que le mécène finance déjà à Hong Kong. Sur le modèle de ce que nous faisons depuis 20 ans aux États Unis, nous permettrons d’augmenter le nombre de projets financés, en apprenant de la France et de Hong Kong. A chaque fois, nous garantissons la transparence sur l’origine et l’utilisation des fonds, la sécurité juridique et fiscale internationale grâce à notre structure importante et reconnue.
Nous luttons contre les exclusions
La Fondation de France aide quelques 12200 projets dont 1680 à l’étranger. Quels sont les types de projets que vous soutenez, en Asie et dans le reste du monde ?
En ligne avec notre ambition initiale de développement de la philanthropie, nous couvrons les sujets d’intérêt général, avec une expertise sur des thèmes aussi variés que l’éducation, la vulnérabilité médicale, culturelle ou vis-à-vis de l’environnement. Après la crise Covid, nous avons révisé notre stratégie globale autour de deux grands enjeux : Le premier est l’interaction des êtres humains avec leurs environnements. L’environnement peut être physique, comme dans la lutte contre le réchauffement climatique ou encore numérique. L’environnement numérique est notamment facteur d’exclusion pour les personnes âgées ou populations vulnérables, ce que nous dénonçons sous le terme de « fracture numérique ». Ainsi nous soutenons l’éducation, la formation quant à la fiabilité des informations publiées, comprendre l’information, ou encore l’intelligence artificielle et ses implications en termes de comportements et de rapport au monde. Le deuxième grand enjeu est la manière dont nous construisons ensemble la société de demain. Cela concerne plus l’Europe dont certaines populations se fragmentent entre communautés, avec des questions sur la démocratie et l’accompagnement des personnes vulnérables ou en difficulté. Il s’agit de bâtir des sociétés en limitant l’exclusion, en France ou dans certains pays d’Europe. Dans chacune des lignes d’actions sous ces grands enjeux nous avons des comités d’experts bénévoles pour définir des lignes d’action et choisir les projets.
Nous gérons les urgences et le temps long
Vous vous êtes distingués par une aide massive lors du tremblement de terre en Turquie et en Syrie. À quels défis fait face la Fondation de France aujourd’hui?
Nous estimons qu’il faut à la fois pouvoir agir dans l’urgence que dans le temps long. En effet, lorsqu’une catastrophe intervient, nous devons pouvoir amener une aide de façon rapide et extrêmement efficace. Dans le même temps, sur des thèmes comme l’accompagnement des personnes âgées, il nous faut construire des programmes sur 10 ou 15 ans pour parvenir à changer les conditions de prise en charge. Du fait du réchauffement climatique, nous sommes des plus en plus mobilisés par des catastrophes naturelles comme les tremblements de terre en Turquie-Syrie en mars, au Maroc en septembre dernier ou encore les inondations en France ou en Europe. Face à cette situation, nous œuvrons à la prévention des crises liées aux catastrophes, avec de la formation des habitants à de nouvelles techniques de construction pour mieux résister aux vents forts à Saint Martin par exemple suite à l’ouragan Irma ou encore des plans d’occupation des sols, y compris agricoles, limitant les effets des eaux ou des incendies.
Comment les Français de Hong Kong ou d’Asie peuvent-ils contribuer ou aider ?
Nous allons proposer à Hong Kong un outil de mobilisation rapide pour les catastrophes, afin d’aider et d’orienter les dons. Par ailleurs nous allons accompagner les Français et Hongkongais dans les projets de philanthropie en France ou ailleurs dans la recherche, l’éducation, l’environnement ou la culture. Parmi les entreprises françaises, la BNP ou Schneider font déjà partie des mécènes que nous accompagnons mais nous sommes ouverts aussi bien aux donateurs privés ou professionnels, pour bâtir une stratégie philanthropique, accompagner les projets, évaluer leur efficacité et faire que ces actions amènent du sens pour le mécène. Les Français de Hong Kong sont les bienvenus pour nous aider à identifier des projets ou des mécènes potentiels. De notre côté, nous allons proposer des projets liés au climat, l’éducation, l’innovation, la culture ou la recherche.