Édition internationale

Sari rose et bambou : Le combat quotidien du Gulabi Gang pour la Justice Sociale

Notre conception classique de la lutte contre les injustices sociales implique souvent des campagnes organisées, des réformes institutionnelles ou des plaidoyers portés par des figures publiques. Cependant, dans certaines régions du monde comme en Inde, la justice sociale prend une forme bien plus radicale et inattendue. C’est le cas du Gulabi Gang, un collectif de femmes en Inde qui a choisi de se battre pour ses droits d’une manière aussi audacieuse qu’inspirante.

downloaddownload
Écrit par Marie-Hélène
Publié le 1 mars 2025, mis à jour le 7 mars 2025

Le Gulabi Gang, c’est quoi ? 

C’est un collectif composé de femmes issues des milieux les plus marginalisés, ne se contentant pas de dénoncer les injustices. Drapées de saris rose vif et armées de bambou, elles interviennent directement là où le système échoue. Leur histoire nous rappelle que parfois, la justice ne peut attendre les décisions des tribunaux ou des autorités. 

Parfois, elle doit être arrachée à mains nues, avec courage et solidarité.

Leur combat m’a profondément marquée et fait réfléchir. Il m’a permis de repenser ma propre conception de l’activisme féministe et de ce que la résilience implique. Ces femmes ne sont pas seulement des militantes : elles sont le symbole vivant d’une révolte contre un système qui les a opprimées pendant trop longtemps. À travers leur sororité et leur détermination, elles montrent que même face aux plus grandes injustices, il est possible de se relever et de riposter.

 

Des femmes qui ne se contentent pas de dénoncer les violences mais interviennent directement

Lorsqu’un mari bat sa femme et que tout le village détourne le regard, elles débarquent chez lui pour lui, demander des comptes. Lorsque des fonctionnaires corrompus détournent les aides gouvernementales destinées aux veuves et aux plus démunis, elles envahissent les bureaux et exigent des explications. 

Elles ne croient pas en un système qui les a abandonnées depuis des générations. Alors, elles deviennent elles-mêmes le système, armées de leurs bâtons et de leur sororité.

 

Un mouvement qui émerge de la colère mais aussi de la solidarité

Le Gulabi Gang a été fondé par Data Satbodh Sain et mené par Sampat Pal Devi,  deux femmes qui ont refusé d’accepter l’injustice sociale comme une fatalité. Issues de familles pauvres de la caste des Dalits, elles ont grandi dans un monde où le genre et la caste dictaient chaque aspect de l’existence. Mais au lieu de se résigner, elles ont fait le choix de la révolte. 

Son message est simple : Aucune femme ne doit souffrir en silence. Si le système ne nous protège pas, alors nous nous protégerons les unes les autres.

Ce qui n’était au départ qu’un petit groupe de femmes décidées à se défendre est devenu une sororité de milliers de militantes, réparties dans plusieurs districts de l’Uttar Pradesh. Leur uniforme (un sari rose vif) n’est pas un simple choix vestimentaire. 

 

C’est un acte de défiance, un message visuel puissant : "Nous sommes là. Nous ne serons plus jamais ignorées".

 

Ébranler un système qui les ignore 

L'impact du Gulabi Gang ne se limite pas aux confrontations spectaculaires. Leur existence a contraint les forces de l’ordre à agir, parfois de bonne grâce, parfois sous la pression de l’opinion publique.

Dénoncer la corruption : Elles ont révélé des affaires de policiers acceptant des pots-de-vin pour étouffer des plaintes de violences conjugales et d’agressions sexuelles.

Créer une justice alternative : Là où la loi est d’une lenteur accablante, leur action permet une protection immédiate aux victimes et une voie concrète pour qu’elles retrouvent leur dignité.

Se faire des alliés inattendus : Certains policiers, initialement hostiles, reconnaissent désormais leur utilité. Il arrive même que les autorités fassent appel à elles pour résoudre des conflits, prouvant ainsi que parfois, l’action directe ouvre la voie à la collaboration.

 

Une réflexion qui nous concerne tous (et toutes) 

Pour nous, observateurs extérieurs, le Gulabi Gang nous force à remettre en question notre propre conception de la justice et du militantisme. Leur approche est aux antipodes des modèles occidentaux, où la lutte pour les droits repose souvent sur des réformes institutionnelles et juridiques.

Mais dans un monde où ces institutions échouent trop souvent, l’action directe n’est-elle pas parfois le seul recours ?

Aurions-nous le courage de faire ce qu’elles font ? D’entrer dans l’arène, de confronter l’injustice en face, de ne plus attendre que quelqu’un d’autre mène le combat à notre place ?

La prochaine fois que vous croiserez une femme en sari rose, souvenez-vous qu’il s’agit un uniforme de résistance qui va bien au-delà d’un vêtement traditionnel et nous rappelle que dans certains endroits du monde, c’est dans la rue que la justice émerge et non dans les tribunaux. Le combat est loin d’être terminé !

Que pensez-vous de l’approche du Gulabi Gang ? Bouscule-t-elle votre vision du militantisme et de la justice ? 

Sujets du moment

Flash infos