Dans le dernier épisode du podcast Langue à Langue de Margot Grellier, le traducteur Mathieu Dosse ouvre les portes de l’univers de João Guimarães Rosa, maître de la littérature brésilienne. Entre argot des favelas, néologismes et oralité, il dévoile les défis et la créativité qu’exige la traduction d’un auteur de sa stature. Un voyage sonore et littéraire qui explore la richesse de la langue brésilienne et la magie du passage entre les cultures.
Le podcast Langue à Langue, animé par Margot Grellier, nous invite à une plongée immersive dans l'univers complexe de la traduction littéraire, un art subtil où chaque mot devient une pièce maîtresse d'un pont entre les cultures. Dans un épisode dédié au traducteur franco-brésilien Mathieu Dosse, dont le travail illumine l'œuvre de l'écrivain brésilien João Guimarães Rosa, l'auditeur est guidé par une double identité culturelle et linguistique. Mathieu partage son expérience de traducteur, son amour pour les mots et son combat pour faire dialoguer deux langues, le portugais brésilien et le français, à travers une littérature profondément enracinée dans l’âme du Brésil.
La traduction comme art et défi
Mathieu Dosse, Français par son père et Brésilien par sa mère, traduit le portugais du Brésil depuis plus de dix ans. Installé à Charenton, en France, il partage sa passion pour la langue brésilienne et les défis qu’elle pose aux traducteurs. Parmi ses projets phares figure la traduction du recueil Mon oncle le jaguar & autres histoires (2016), un exemple parfait des subtilités de la langue de Guimarães Rosa.
Lors de l'épisode, Mathieu explique que traduire un tel auteur est comparable à marcher sur un fil tendu entre deux mondes. La langue brésilienne, d'une incroyable plasticité, regorge d'argot, de néologismes et d'archaïsmes régionaux. Guimarães Rosa, en particulier, invente une langue unique, mêlant les traditions rurales du Minas Gerais aux influences mythologiques européennes. Chaque mot, chaque tournure exige une réflexion minutieuse pour préserver l'essence du texte original.
L’argot, miroir des réalités sociales
Un thème central de l’épisode est l'argot, notamment celui des favelas de Rio, que Mathieu a dû retranscrire dans un français reflétant à la fois l'oralité et le contexte social. Il évoque ses recherches approfondies, entre dictionnaires d'argot et discussions avec des amis, pour trouver les équivalents qui résonnent avec justesse dans la langue française.
Mathieu Dosse explique notamment son choix de mélanger des mots familiers et soutenus, avec parfois des trouvailles tirées de dictionnaires d’argot ou de nouveaux termes utilisés par sa propre fille. Il cite par exemple l’intégration de "avoir le seum" ou d’expressions plus surprenantes qu’il découvre en observant les jeunes générations. Pour traduire des termes liés au cannabis, omniprésents dans certaines œuvres de Giovanni Martins, Mathieu Dosse a aussi exploré des expressions françaises comme "la beuh" ou "charbon" (employé par les trafiquants, signifiant "aller travailler dur, au charbon").
Dans de telles circonstances, la traduction devient un véritable exercice de récréation : il ne s'agit plus seulement de transposer les mots, mais de restituer un univers entier. Mathieu décrit également le plaisir qu'il a à mélanger des registres variés, de l'argot au passé simple, pour capturer l'oralité de Guimarães Rosa.