Les actes de piraterie ont augmenté dans le monde en 2024, et bondi dans le détroit de Singapour au premier trimestre 2025. La recrudescence du nombre d’attaques fait craindre une résurgence inquiétante de la piraterie maritime et un important impact sur le commerce mondial.


les membres d’équipage subissent de plus en plus des assauts avec armes à feu, dans 14 cas dans le détroit de Singapour depuis le début d’année 2025
Le premier trimestre 2025 marqué de piraterie dans le détroit de Singapour
Le Bureau maritime international (BMI) annonce en avril 2025 que les actes de piraterie et les vols à main armée dans le détroit de Singapour ont presque quadruplé au premier trimestre de 2025 par rapport à la même période en 2024. Au total, 27 incidents entre janvier et mars 2025 ont été recensés, contre 7 l’an dernier. Plusieurs dizaines de navires ont été pris pour cibles, souvent en pleine mer, et parfois à l’approche des ports. Les eaux du détroit de Singapour a toujours été l’une des zones les plus sensibles en matière de piraterie, mais selon Michael Howlett, directeur du BMI, “le pic d’attaques est préoccupant, surtout dans une zone aussi vitale pour le commerce international”. Le BMI souligne aussi la tournure des attaques ; les membres d’équipage subissent de plus en plus des assauts avec armes à feu, dans 14 cas dans le détroit de Singapour depuis le début d’année 2025 : “Nous constatons une utilisation croissante d’armes dans ces attaques, ce qui fait peser une menace directe sur la vie des marins" précise Howlett.
Offrant un passage en eaux profondes pour le port de Singapour, le trafic maritime est très important dans le détroit de Singapour. Zone névralgique où transitent environ 130.000 navires par an selon The Maritime Industry Knowledge Centre, les détroits de Malacca et Singapour représentent un cordon d’approvisionnement indispensable pour les pays d’Asie du Sud-Est et du monde.

60 actes de piraterie ont été comptabilisés, soit une augmentation de 110% par rapport à 2023
La tendance à la piraterie à la hausse dans le monde
Mais le détroit de Singapour n’est pas un cas isolé. En Asie du Sud-Est, l’archipel d’Indonésie est aussi touché par les actes de piraterie. Selon le BMI, 17 actes ont été dénombrés dans les 9 premiers mois de 2024, contre 12 en 2023. Près de 30 membres d’équipage ont subi une prise d’otage. Le sud de l’île de Tanjung Malatayur par exemple, a été le théâtre de vols ciblés sur des cargaisons de carburant.
Les données collectées sur l’année 2024 font état d’une hausse généralisée des actes de piraterie à l’échelle planétaire : 60 actes de piraterie ont été comptabilisés, soit une augmentation de 110% par rapport à 2023, selon le bilan annuel du Maritime Information Cooperation & Awareness (MICA) Center début février 2025.

La piraterie maritime est un phénomène très ancien, présent à l’époque des civilisations grecques. Depuis les années 1970, elle connaît un regain, souvent dans des zones pauvres où le trafic maritime est dense. On distingue deux types de piraterie : l’une liée au crime organisé avec des moyens importants, l’autre plus locale, souvent liée à la pauvreté ou à des revendications identitaires. Les zones touchées par la piraterie évoluent au fil du temps. Dans les années 70, l’Asie du Sud-Est était la principale région concernée. Dans les années 2000, les attaques se concentrent autour de la Somalie, notamment dans le golfe d’Aden. Puis, à partir de 2010, c’est le golfe de Guinée, en Afrique de l’Ouest, qui devient un point chaud. L’Amérique latine connaît aussi une montée des attaques, surtout au Brésil et dans les Caraïbes.
Pour Singapour, la piraterie est un enjeu essentiel, car la cité-État a structuré son économie autour de la mer.

L’enjeu majeur de la piraterie sur le transport maritime
Les conséquences financières des actes de piraterie en mer sont importantes : vols de marchandises, allongement des distances parcourues, hausses des primes d’assurance, investissements en sécurité, rançons, navires immobilisés, chute de fréquentation touristique dans certaines zones, etc… Selon un rapport de l'ONG Oceans Beyond Piracy (OBP), le coût mondial de la piraterie, économique et humaine, se situait autour de 2,2 Milliards de dollars en 2017, contre 7 milliards en 2010. Pour Singapour, la piraterie est un enjeu essentiel, car la cité-État a structuré son économie autour de la mer.
Certains événements de piraterie maritime marquent les esprits, comme le meurtre du navigateur Peter Blake au Brésil, le détournement du Sirius Star par des pirates somaliens, ou encore l’affaire du Maersk Alabama, où le capitaine Phillips a été sauvé par les forces spéciales américaines.
Des actions sont menées en Asie du Sud-Est contre la piraterie et la briganderie en mer comme des accords bilatéraux, permettant des patrouilles maritimes entre deux pays, des surveillances aériennes, ou encore la possibilité de poursuivre les pirates dans les eaux territoriales de l'État voisin. C’est le cas de Singapour et de l'Indonésie. Plus largement, un Accord de coopération régionale contre la piraterie et les vols à main armée à l'encontre des navires en Asie (ReCAAP) est créé depuis 2006 ; il permet notamment l’échange de renseignements. 21 pays l’ont signé à ce jour. "Ce n’est pas le moment de relâcher nos efforts !", insiste Michael Howlett de la BMI en avril 2025, encourageant les armateurs à continuer d’appliquer les protocoles de sécurité et saluant le travail des autorités locales et internationales.
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