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Entreprendre en Espagne : l’art de jongler entre passion et bureaucratie

En Espagne, l’entrepreneuriat a du cœur, mais aussi de lourdes chaînes. Alors que la passion est le carburant principal des entrepreneurs, la bureaucratie et le manque de financement viennent brider cet élan. Aperçu des défis à relever pour les créateurs d’entreprises, selon l’étude menée par Holded.

une personne avec un ordinateurune personne avec un ordinateur
Écrit par Paul Pierroux-Taranto
Publié le 17 octobre 2024, mis à jour le 22 octobre 2024

 

C’est entendu, entreprendre est d’abord une affaire de passion. D’après une étude récente, l’“Informe Emprende” de Holded, 24% des entrepreneurs espagnols sont animés par ce sentiment quand ils se lancent. Un chiffre légèrement supérieur à la moyenne européenne, dépassé uniquement par la Suède. Mais, comme souvent, la route du succès est semée d’embûches. Malgré cette motivation débordante, les entrepreneurs espagnols se heurtent à des obstacles de taille : une bureaucratie labyrinthique et un accès au financement plus compliqué qu’un casse-tête chinois. Résultat ? Beaucoup voient leur élan freiné avant même d'avoir pu déployer leurs ailes.

 

 

un graphique holded

 

 

Quand la paperasse étouffe l’innovation

Le plus grand ennemi des entrepreneurs espagnols est sans conteste la bureaucratie. Avec ses formulaires en triple exemplaire et ses procédures à rallonge, elle en fait fuir plus d’un. 23% jugent que la législation et les démarches administratives sont « très compliquées ». En d’autres termes, la paperasse pèse lourd sur les ailes de ceux qui voudraient faire décoller leur business, malgré toute la passion et la détermination du monde.

Et comme si ce n’était pas assez, l’accès au financement est une autre barrière dressée sur leur chemin. 29% des entrepreneurs espagnols estiment que décrocher des fonds relève du parcours du combattant. En cause : des procédures complexes, une documentation interminable, et des critères d'éligibilité trop restrictifs. Le soutien financier existe, certes, mais il est bien souvent hors de portée des entrepreneurs débutants, qui peinent à réunir les garanties nécessaires. La situation est d'autant plus frustrante que le financement, on le sait, est le nerf de la guerre pour les jeunes entreprises.

 

Entreprendre après 40 ans : la norme en Espagne

Dans l’étude de Holded, l'Espagne se distingue par une autre particularité notable : la majorité des entrepreneurs y sont plus âgés que la moyenne européenne. Tandis que dans d'autres pays, les jeunes foncent tête baissée dans l'aventure entrepreneuriale, 64% des patrons d’entreprises espagnols ont déjà soufflé leurs 40 bougies. Les moins de 34 ans ? Ils ne représentent que 12,3%, un des chiffres les plus bas d’Europe. À titre de comparaison, la France et la Belgique sont nettement plus « jeunistes », avec respectivement 37,9% et 37,3% d’entrepreneurs sous la barre des 34 ans.

 

 

un graphique holded

 

 

Transformation digitale : les entrepreneurs espagnols hésitent à décoller

Et pendant que l’Europe fait un grand saut vers la révolution numérique, l’Espagne, elle, semble traîner un peu des pieds. Chez les entrepreneurs espagnols, on reste fidèle aux bonnes vieilles méthodes : feuilles de calcul, documents Excel, et logiciels bien installés sur son ordinateur de bureau. Le cloud ? Encore un peu trop “dans les nuages” pour en faire un allié de confiance.

Cette timidité face à la numérisation est frappante dans un contexte où la technologie est reconnue comme un moteur essentiel de croissance. L'intelligence artificielle, les solutions de gestion automatisées, et l'analyse de données à grande échelle, sont autant d’armes pour rester compétitifs dans l’écosystème européen et mondial. Pourtant, les entreprises espagnoles renâclent à franchir le pas, freinées par des inquiétudes concernant la sécurité des données ou tout simplement par une résistance au changement.

 

 

un graphique holded

 

 

Pour éviter la casse, mieux vaut avoir un bon conseiller

Autre point clé de l’étude, le rôle des cabinets de conseil. Dans le dédale administratif espagnol, ils sont un peu les GPS des PME ! Ces conseillers spécialisés sont des alliés de poids dans un environnement où chaque erreur peut coûter cher, voire mener au naufrage.

Certes, les entrepreneurs espagnols ne sont pas toujours aussi enthousiastes que leurs homologues européens (61,4% de satisfaction contre 74% en Europe), mais ils reconnaissent tout de même que le service rendu vaut son pesant d'or. Près de la moitié (49,4%) estiment que le prix des services fournis est juste. Bref, même si tout n’est pas parfait, mieux vaut investir dans un bon guide pour éviter de se perdre en chemin !

 

Un optimisme prudent pour 2025

Malgré toutes ces embûches, les entrepreneurs espagnols gardent un œil sur l’avenir avec un optimisme prudent. Un peu plus de la moitié d’entre eux (54,2%) sont convaincus qu'ils atteindront leurs objectifs dans l’année à venir. Ce chiffre, bien que positif, reste en deçà de celui de certaines régions d’Europe comme le Benelux, où 65,5% des entrepreneurs débordent de confiance. 

Cela dit, l’Espagne connaît une dynamique plutôt encourageante. En quatre ans, 15% des entreprises ont vu le jour, confirmant une tendance à la hausse dans l'écosystème entrepreneurial. Pour que cette vague se poursuive et s’amplifie, il faudra dépoussiérer les vieux mécanismes : alléger la paperasse, faciliter l’accès aux fonds et enfin prendre le train de la transition numérique. Autrement dit, l’Espagne doit s’assurer que la route vers l’innovation soit aussi fluide que la passion qui anime ses entrepreneurs.

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