Édition internationale

Yannick Kamanan : “Je n’ai pas eu la carrière de footballeur que j’aurais dû avoir”

Imaginez un jour, sentir la pression de la Ligue des champions sur vos épaules, jouer pour le mythique club de Tottenham Hotspur ou être considéré comme une pépite de votre génération. Yannick Kamanan a connu tout cela, et pourtant il se considère comme un talent gâché. L’international français, qui a connu 14 clubs, partout dans le monde, est aujourd’hui basé à Londres et a ouvert Champs Football Club, fort de son expérience. Retour sur un parcours singulier et pourtant tout aussi extraordinaire : “Pour moi, j’étais trop fort. J’ai simplement fait certains choix qui m’ont desservi.”

Yannick kamakanYannick kamakan
Écrit par Ewan Petris
Publié le 20 février 2025, mis à jour le 27 février 2025

Yannick Kamakan, jeune joueur du Mans, vient d’un quartier défavorisé d’Élancourt (78). Comme beaucoup chez lui, il est peu attentif en cours et rêve d’une carrière bien souvent impossible, celle de footballeur professionnel. N’ayant pas trop d’espoir niveau étude et étant formé au club de foot du Mans, il joue les prolongations et la carte de la dernière chance : “À l'époque, tout fonctionnait grâce aux agents. Perdu pour perdu, j’en ai contacté trois. Un seul m’a répondu et m’a demandé où je voudrais jouer dans ma vie.” Quelques mois plus tard, il se retrouve à faire un essai à Bolton. Ce n’est pas concluant ? Tant pis, Yannick passe à autre chose : “Une cassette de ce que je faisais a été envoyée au club de Tottenham,” marquant le coup d’envoi d’une carrière pour le moins atypique. 

 

À 17 ans, il arrive à l’aéroport d’Heathrow, s'entraîne pendant quelques semaines avec le club de Tottenham. Pour les moins novices, ces semaines de formation peuvent littéralement changer une carrière. En cas de méforme, le club ne vous rappelle plus, mais en cas de réussite, cela peut devenir… intéressant. C’est justement le cas pour Yannick. Il se débrouille si bien que le club se demande s’il ne devrait pas tout de suite monter avec la réservel. Notre Frenchie lance la contre-attaque : “Lors d’un match important contre Arsenal (derby du Nord), l'entraîneur me dit sur le ton de la rigolade : si tu marques, je t’offre un contrat pro…” La suite, vous la devinez bien ! 

 

Le guide du supporter de Premier League : quel club londonien allez-vous soutenir ?


 

Le plot-twist d’une carrière destiné aux sommets du football ?

 

Yannick décolle, son style de jeu plaît aux Britanniques. Jeu rapide, puissant dos au but, athlétique, il a tout d’un grand. “J’ai commencé en tant que professionnel à 17 ans, mais je continuais à jouer avec les jeunes pour ne pas griller les étapes”, nous confie-t-il, plein d’assurance. À cette époque, il connaît aussi ses premiers pas en équipe de France U19. “Les clubs français reviennent petit à petit vers moi et s’intéressent à mon profil, car je suis le seul Français jouant à l’étranger.” 

 

À cette époque, Yannick brille à Tottenham, qui deviendra bientôt l’un des futurs cadors européens : “Ils voulaient m'offrir un nouveau contrat. Ils voyaient un potentiel et m'ont fait monter les échelons.” Sous l’impulsion d'une nouvelle équipe et d’un retour en France, Yannick fait un choix, qui le suivra toute sa vie : “Je me suis dit que le championnat français était plus facile que le championnat anglais. Eh bien non, c'est juste différent.” Alors, Yannick signe au Racing Club de Strasbourg et laisse derrière lui une carrière en Premier League. Un choix curieux qui se traduit même dans son football :  “À l’inverse des clubs britanniques, à Strasbourg, tu construis par derrière, ce qui fait que si tu n’as pas compris comment ça marche, tu te perds très rapidement.”


 

Yannick kamaman
Les 14 clubs de Yannick Kamaman

 

De la Ligue 1 à la Ligue Azerbaïdjan

 

Yannick ne reste pas longtemps à Strasbourg. À vrai dire, il va enchaîner les clubs, partout dans le monde :  Tottenham B (1998-2002), Strasbourg (2002-2003), Dijon (2003-2004), GFC Ajaccio (2004-2005), KV Ostende (2005-2006), Maccabi Herzliya (2006-2007, 2007-2008), Schaffhausen (2006-2007), Maccabi Tel Aviv (2008-2009), Sivasspor (2008-2009), Viry-Châtillon (2016-2019).

 

Le tout est évidemment agrémenté de plusieurs anecdotes : “J’ai coché les cases du rêve de tout joueur : jouer en Ligue 1, équipe de France (jeune)disputer la Ligue des Champions, puis l’Europa League.” 

Interrogé sur les différences de niveau entre les équipes au niveau européen, il poursuit : “Éliminé de La Ligue des Champions, mon équipe avait été repêchée en Europa League (2e grande compétition européenne) et nous sommes tombés contre le Shakhtar, une grande équipe ukrainienne. Pendant notre préparation hivernale, nous les affrontons, en amical, et gagnons 3-0. Lors des matchs officiels, ils nous infligent 3-0, sec. Ça va très vite au haut niveau et tu vois la différence : 11 joueurs de niveau professionnel, qui prennent le match au sérieux, tu ne peux rien faire.”


 

"Par rapport à mes qualités, je n'ai pas eu la carrière que j’aurais dû avoir”

 

"Être footballeur pro, c’est un travail. Rester dans ce monde-là, c’en est un autre."

 

Aujourd’hui, à 43 ans, Yannick évoque avec amertume : “Par rapport à mes qualités, je n'ai pas eu la carrière que j’aurais dû avoir.” Pourtant, dans sa voix, se dessine un mélange de rancœur et de lucidité. Lui, qui était trop fort, trop rapide, trop puissant pour l'Angleterre avait tout pour s'inscrire dans la durée et n’importe qui vous dirait que son parcours suscite le respect et l’admiration. Mais pour lui, cette errance raconte plus une fêlure, qu’une réussite : "Quand tu bouges tout le temps, cela veut dire que tu cherches quelque chose. Mais à un moment, tu prends conscience que tu es passé à côté."

 

Yannick kamaman

 

Yannick affiche ne pas avoir réalisé l’opportunité entre ses mains : "Je n’ai pas pris la mesure du club, je n’ai pas réalisé." Seul, mal entouré, il navigua sans repères. "Il n’y avait que ma mère et mes frères. D’ailleurs, dans le foot, on a tous un père spirituel. Moi, c’était Chris Hutton. Il m’avait pris sous son aile, il me disait d’attendre, d’être patient. Mais je n’ai pas écouté." Cependant, Yannick a toujours mis un point d’honneur à terminer ses contrats, rendant son parcours encore plus impressionnant, car selon lui : "Être footballeur pro, c’est un travail. Rester dans ce monde-là, c’en est un autre." Lui, il a tenu. Il a gardé les nerfs solides. Il a compris ce qu’il avait bien fait et surtout ce qu’il avait mal fait, ce qui lui permet dorénavant de transmettre son expérience au plus jeune…
 

 

La nouvelle passion de Yannick : du terrain, au banc de touche !

 

Yannick kamaman et jeunes

 

Yannick Kamanan a trouvé un nouveau sens à sa vie : transmettre. "Quand t’as pas fait la carrière que t’aurais pu faire, tu peux faire quoi ?", pose-t-il sur un ton rhétorique et léger. La réponse, il l’a trouvée en créant son propre club de football à Battersea, presque par accident. Tout commence avec sa fille, qui lui dit un jour : "L’after-school est bien, mais les profs, ne s’y connaissent pas autant que toi". Subjugué par cette remarque, il fronce les sourcils, la moue décomposée par une phrase légère, pourtant si lourde de sens pour lui. Yannick est décidé : Il veut offrir une structure qui permette aux enfants de grandir, par le football. 

Au départ, il met en place un système d’after-school club, simple activité périscolaire. Mais rapidement, il veut aller plus loin. "Les petits voulaient faire un championnat, prendre un petit groupe, faire des matchs amicaux… et je me suis lancé à créer un club de foot." Très vite, l’engouement dépasse ses attentes : de quelques enfants, il se retrouve à en encadrer 65. Quatre ans plus tard, son club, Champs Football Club, aligne six équipes en championnat britannique, des U8 aux U12. 

Là où d’autres se seraient contentés de ce passé extraordinaire de footballeur, Yannick a vu une renaissance : "J’ai dû recommencer une nouvelle carrière où je suis très fort. Et tous les jours, j’adore. Coacher, ce n’est pas juste du football. Il s’agit d’un enfant qui arrive, vierge de tout apprentissage, et qui demande à apprendre. Et quand tu as des connaissances, ça ne peut être qu’un moment génial…”

 

Infos pratiques : 

CHAMPS FOOTBALL CLUB 
Site internet 
Instagram

Training Schedule :
Location: Battersea Park
Days: Monday, Wednesday, Friday
Time: 4:30 PM – 6:00 PM

Age Groups & Sessions : 
U8 Lions - U8
U9 Lions - U9
U10
U12-U13