Étienne Faugier, originaire de France, ne prédestinait pas ses recherches à l’automobile. Arrivé à Québec par hasard, après avoir envisagé Vancouver, il a découvert le sujet en rencontrant des professeurs locaux. C’est Jacques Bernier, un spécialiste de l’histoire de la médecine, qui lui a proposé de s’intéresser aux usages de l’automobile au Québec. Une révélation pour le chercheur qui se consacrera dès lors à ce thème.
l’histoire des déplacements au Québec est marquée par des changements majeurs
Dans son ouvrage, Faugier ne se contente pas de parler de la voiture. Il évoque un phénomène plus large qu’il appelle "automobilisme". Selon lui, ce terme englobe tous les véhicules motorisés – camions, motoneiges, autobus – et leurs impacts sur la société québécoise. En effet, l'automobile ne concerne pas seulement la possession d’un véhicule, mais elle influence l’organisation des villes, les infrastructures et même les pratiques quotidiennes des citoyens.
Une révolution dans les mentalités
L'arrivée de l'automobile a transformé profondément la façon dont les Québécois percevaient le temps et l'espace. Les déplacements, autrefois lents et limités à quelques modes comme la marche ou le vélo, se sont accélérés et étendus. L’automobile a favorisé la mobilité individuelle, permettant de redessiner les infrastructures routières, les habitudes de voyage et les modes de vie.
On ne fabrique pas qu’une automobile, on fabrique une société
Cette citation de Bernard Charbonneau, reprise dans le livre, illustre bien l’impact sociétal de l’automobile. Selon Faugier, l’introduction de ce nouveau mode de transport a bouleversé non seulement les pratiques de mobilité, mais aussi la structure même de la société, en encourageant l’urbanisation, le développement du tourisme routier et la législation liée à la sécurité routière.
Des résistances à l’automobile
Si l'automobile a été accueillie avec enthousiasme par certains, d'autres s'y sont opposés. Les cochers, les chartiers et même les partisans du tramway ont vu dans ce nouveau mode de transport une menace à leurs moyens de subsistance. Faugier relate les résistances que l’automobile a rencontrées dès son introduction, que ce soit pour des raisons économiques ou par peur des dangers liés à la vitesse.
Les femmes et la conquête du volant
L’histoire de l’automobile est aussi celle d’une conquête pour les femmes. Initialement écartées du monde des conducteurs, elles ont dû se battre pour obtenir leur place au volant, longtemps réservée aux hommes de l’élite. Faugier met en lumière ces luttes souvent oubliées, qui ont permis aux femmes de devenir des actrices à part entière de l’automobilisme québécois.
Les clubs automobiles : précurseurs de la modernité
Les clubs automobiles, comme ceux de Québec et Montréal, ont joué un rôle majeur dans la promotion de l’automobilisme. Ces associations ont milité pour l’amélioration des infrastructures, encouragé le tourisme routier et influencé les décisions gouvernementales. Aujourd’hui, ces clubs ont évolué pour devenir les actuels CAA (Club Automobile Association), mais leur influence sur le développement des routes et de la signalisation routière reste indéniable.
Regarder dans le rétroviseur pour comprendre l’avenir
Étienne Faugier insiste sur l’importance de comprendre l’histoire de l’automobilisme pour mieux appréhender les enjeux actuels de mobilité. Le débat sur le tramway à Québec en est un exemple flagrant. Alors que le projet divise, Faugier rappelle que l’histoire des déplacements au Québec est marquée par des changements majeurs, comme l’abandon du tramway dans les années 1940. Comprendre ce passé permet d’envisager les transformations à venir avec une perspective plus large.
Une société en transition
Si l’automobilisme a structuré la société québécoise pendant plus d’un siècle, la transition vers des modes de transport plus écologiques est aujourd’hui au cœur des préoccupations. Pour Faugier, le défi actuel est de réussir à rééquilibrer l’usage de la voiture en ville au profit de moyens de transport plus durables, comme le tramway, le vélo ou la marche à pied. Il conclut en ouvrant une réflexion sur l’avenir des déplacements, appelant à un nouveau modèle où la mobilité collective serait valorisée au même titre que la liberté individuelle.