Édition internationale

Joëlle, une Française de deuxième génération cueilleuse professionnelle

Joëlle Bellanger, bien que née à Montréal, a grandi entre les deux mondes : celui de ses parents, arrivés de France dans les années 1950, et celui du Québec qu'elle appelle chez elle. Après une formation en produits forestiers, elle a trouvé sa voie en explorant les vertus des plantes indigènes du Québec.

Joëlle BellangerJoëlle Bellanger
Joëlle Bélanger et ses produits, fruits de ses cueillettes - Photos LPJ
Écrit par Bertrand de Petigny
Publié le 2 février 2025

 

 

Des racines françaises et québécoises

Joëlle Bellanger ne correspond pas au profil habituel des immigrants français au Québec. Née à Montréal de parents originaires du Pays Basque, ses racines sont profondément ancrées dans l’histoire de la migration franco-québécoise. "Mes parents sont venus ici pour une vie plus facile, plus accessible", raconte-t-elle. Son père, menuisier de profession, s’installe à Montréal avant de déménager avec sa famille à Saint-Calixte, un petit village en pleine nature. "Toute ma vie, j'ai été immergée dans la forêt, c'était un véritable ancrage."

Les Bellanger, comme beaucoup d'immigrants européens de l'époque, cherchaient une vie meilleure dans un Québec en pleine expansion. "Mon père et ma mère ont traversé l'Atlantique pour cette promesse d'un avenir plus serein, et c’est cette vision de la vie ici qui a façonné notre quotidien", ajoute Joëlle.

 

Forêt de Lanaudière
Forêt de Lanaudière, où Joëlle effectue ses cueillettes

 

 

Un chemin vers la forêt

Joëlle, après des études administratives, n’a pas immédiatement suivi la voie tracée par ses parents. Le goût de la nature l'a rattrapée plusieurs années plus tard, lorsqu'elle découvre une formation en produits forestiers à Saint-Jean-de-Matha, dans Lanaudière. "C’est là que je me suis découverte. J’avais toujours aimé la nature, mais je ne savais pas que cela pourrait devenir ma voie professionnelle." Elle s’initie à la cueillette, à la création de produits médicinaux et cosmétiques à base de plantes indigènes du Québec. "La forêt, les plantes sauvages, c’est une passion qui m’habite. C’est mon lien avec le passé et avec la nature d’ici", confie-t-elle.

Son expérience en forêt s’est enrichie grâce à ses apprentissages sur les propriétés des plantes locales, et elle n’hésite pas à affirmer : "Je préfère me tourner vers ce qui pousse ici, c’est ce que je connais et ce que je ressens."

 

De la formation à l'entrepreneuriat

La formation de Cueilleuse suivie par Joëlle l’a propulsée dans un univers où elle a su combiner tradition et innovation. "Ce n’est pas le diplôme qui m’a fait avancer, mais l’expérience et la pratique sur le terrain. Beaucoup d’entre nous ont dû s’adapter et créer leurs propres niches", raconte-t-elle.

Si certains de ses collègues vendent le produit de leur cueillette à des restaurants, Joëlle, elle, propose des ateliers sur la fabrication de savons, de crèmes et d’autres produits à base de plantes, avec un accent particulier sur les plantes médicinales et cosmétiques. "Je trouve que le Québec manque encore de formateurs sur ces sujets. Et c’est cette lacune que je veux combler", ajoute-t-elle avec conviction.

Son activité n’est pas seulement professionnelle ; elle est aussi personnelle. "Je veux transmettre aux gens l’idée de l’autonomie, leur montrer qu’ils ont à portée de main des ressources naturelles pour leur bien-être." Une idée qui s’est concrétisée au travers de ses ateliers, où elle enseigne l'utilisation des plantes pour des soins alternatifs.

 

 


La formation spécialisée de cueilleurs professionnels est proposée par l’Association forestière de Lanaudière dans le cadre de la formation générale aux adultes du Centre multiservice des Samares.
Cette formation professionnelle est structurée en deux modules et est offerte en alternance avec des activités pratiques d’intégration des connaissances sur le terrain. Elle vise le développement des compétences sur l’identification, la cueillette, le développement et la transformation des produits forestiers non ligneux (PFNL), dans un contexte commercial.


 

Vers une autonomie retrouvée

Joëlle Bellanger incarne parfaitement cette idée d’un retour aux sources, mais pas seulement au sens propre : elle invite les Québécois, et au-delà, les Français de deuxième génération comme elle, à se reconnecter à leurs racines naturelles. "Ce n’est pas seulement une question de survie, mais de bien-être. Se reconnecter à la nature, c’est aussi retrouver une forme de liberté."

La suite de son parcours semble toute tracée : dans un monde en quête de sens et de solutions durables, Joëlle Bellanger continue de bousculer les frontières entre nature, tradition et modernité. Ses ateliers grandissent et son message d’autonomie personnelle résonne de plus en plus fort. Reste à savoir quel sera le prochain pas dans ce voyage entre deux cultures et une forêt qui, de plus en plus, devient son terrain de jeu.

 

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