Édition internationale

L'Art de la Guerre, un classique chinois très actuel

Depuis sa découverte par le monde occidental, notamment dans les années 80 du XXe siècle, l’œuvre de Sun Tzu n’a pas cessé d’inspirer les politiques, businessmen et même des individuels en quête de développement de soi. Qui était donc ce sage d’il y a plus de 2000 ans et pourquoi son traité n'a jamais perdu de son actualité ?

Art de la guerreArt de la guerre
Écrit par Anna Riondet
Publié le 28 février 2025, mis à jour le 7 mars 2025

Qui était Sun Tzu ?

 

Sun Tzu

 

Tout ce que nous savons sur Sun Tzu provient essentiellement des sources postérieures à sa vie, notamment des mémoires historiques et annales du IIe siècle avant J-C. Sun Tzu serait d’ailleurs plutôt un surnom car cela signifie littéralement Maître Sun.

Né dans l’État de Wu en 544 avant J-C, mort en 496 avant J-C donc durant la période dite des Printemps et Automnes, Sun Tzu est l’auteur présumé du plus grand ouvrage de stratégie militaire intitulé l’Art de la guerre et le père de la théorie de l’approche indirecte.

La légende dit qu'il aurait gagné les faveurs du roi du royaume Wu en lui faisant une démonstration pratique de son savoir-faire, en plus de son traité théorique. Ainsi, il aurait fait rassembler les 180 concubines du roi qu'il aurait divisé en deux équipes avec comme "capitaines" les deux favorites du roi. Il leur a donné un ordre, mais au lieu de l'exécuter, les concubines auraient ri. Sun Tzu a alors réitéré l'ordre en se disant qu'elles ne l'auraient pas compris. Face au même manque de réaction des deux "capitaines", le stratège a décrété que si l’ordre était compris, mais non exécuté, c'est que les officiers n’étaient pas compétents. Et il aurait fait exécuter les deux concubines. Face aux protestations du roi, il aurait répliqué qu'un général compétent sur un champ de bataille n’avait pas à obéir au roi. Par la suite, les concubines restantes auraient exécuté les ordres de Sun Tzu sans rechigner et le roi aurait été impressionné par les qualités exceptionnelles de son conseiller.

 

Art de la guerre - un traité intemporel

Longtemps inconnu en dehors de la Chine, le traité a été traduit pour la première fois en français en 1772 par un jésuite français Joseph Marie Amiot. Depuis lors, il est devenu un texte de référence.
Redécouvert récemment dans les années 80 du XXe siècle, il est appliqué dans des domaines aussi variés que le business, la diplomatie, le sport ou encore le développement personnel.

Rédigé à l’origine sur des lamelles de bambou, reliés par des fils de soie, l’essentiel du traité peut se résumer à cette phrase :

 

“L’art de la guerre, c’est de soumettre l’ennemi sans combat.”

 

L’Art de la Guerre de Sun Tzu est profondément imprégné des principes et la philosophie du yin et du yang. Il est composé de 13 chapitres commençant chacun par la phrase: Maître Sun a dit. Les parties successives analysent de manière très pragmatique et rationnelle les différents aspects de la guerre et proposent des principes de la poursuite intelligente d’une guerre victorieuse. Dans l’ensemble, il s’agit d’éviter autant que faire se peut l’affrontement direct et d’y recourir une fois les autres moyens épuisés ou après avoir bien préparé sa stratégie basée sur une connaissance approfondie de son ennemi.

Les notions les plus importantes qui s’en dégagent sont l’économie et l’harmonie, la vertu, les notions du vide et du plein ainsi que la fluidité (la métaphore favorite de l’auteur est celle de l’eau, synonyme de fluidité d’une armée qui sait de plier à tous les retournements et réagir aux initiatives de l’adversaire). Et enfin, la notion la plus importante de toutes : la ruse. Traitée comme moyen complémentaire dans l’art militaire occidental, la ruse règne en maître dans les stratégies chinoises et être rusé est la plus grande des vertus.

Comme l’a si bien dit Maitre Sun :

 

"La guerre a la duperie pour fondement et le profit pour ressort".

 

Stratégie orientale face aux tactiques occidentales

L’approche de Maitre Sun est bien différente de la perception de la guerre prônée par les principaux stratèges occidentaux dont Carl von Clausewitz, général et théoricien prussien, auteur d’un autre traité militaire intitulé De la guerre et dont la philosophie militaire peut se résumer comme suit : « La guerre est un acte de violence dont l'objectif est de contraindre l'adversaire à exécuter notre volonté. […] Et il n’y a pas de limite à la manifestation de cette violence. »

 

Clausewitz

 

À travers les 600 pages de son traité (inachevé), Clausewitz décrit une philosophie brutale destinée à écraser et annihiler l’ennemi, ce qui implique l’usage massif de la force sur un champ de bataille. On est donc très loin, sinon à l'opposé de Sun Tzu qui dit :

 

“Le guerrier victorieux remporte la bataille, puis part en guerre. Le guerrier vaincu part en guerre, puis cherche à remporter la bataille.”

 

Dans son ouvrage de moins de 100 pages, Sun Tzu, lui, privilégie la paix sans faire de la destruction physique de l’ennemi une priorité. Au contraire.

De par ces différences dans l’approche, le traité de Clausewitz reste aujourd'hui cantonné au domaine militaire alors que celui de Sun Tzu est applicable et appliqué dans beaucoup d’autres contextes.

 

Domaines d’application de la sagesse de Sun Tzu

  • Le sport, notamment les sports de combat : en effet la tactique sportive s’apparente à l’art de la guerre en ce qu’elle nécessite d’étudier et analyser points forts et faibles l’adversaire ainsi que de connaitre ses propres points faibles et forts, construire sa stratégie de jeu ou de combat en fonction, faire preuve de flexibilité…
  • Le management qui requiert de la flexibilité stratégique, une veille concurrentielle (connais ton ennemi et connais-toi toi-même), innovation, création de nouveaux besoins, importance des alliances, feintes, fuites d’informations contrôlées pour tester la réponse du marché, etc…
  • Le marketing et le numérique sont également des domaines d’application des préceptes de l’Art de la guerre, là encore, on va avoir recours à la flexibilité, l’adaptabilité aux changements rapides, connaissance de l’adversaire, innovation (ne surtout pas se reposer sur les victoires passées pour ne pas se faire dépasser par les adversaires !)
  • Les ressources humaines peuvent également puiser dans l’a sagesse de Sun Tzu, dans la mesure où le DRH se positionne en stratège pour éviter les conflits, savoir attirer et retenir les talents, savoir se positionner entre le souverain et l’armée etc. tel un général sur le champ de bataille…
  • La diplomatie qui est un domaine où par définition, on essaie d’éviter le conflit frontal…
  • Enfin, on peut s’inspirer du Maitre Sun pour son développement personnel, notamment en ce qui concerne l’importance de la connaissance de soi, de ses forces et faiblesses, développement de la patience, la discipline et l’adaptabilité…

Alors, si vous n’avez pas encore eu l’occasion de faire connaissance avec le sage chinois et son œuvre, j’espère que cette esquisse rapide vous aura inspiré à le découvrir. Les traductions et éditions françaises sont nombreuses et facilement accessibles donc bonne lecture !

Flash infos