En pleine guerre commerciale sino-américaine, Washington annonce une exemption temporaire des tarifs douaniers sur les smartphones, ordinateurs et autres produits électroniques. Une mesure à double tranchant, entre stratégie électorale et calcul économique. Dans une guerre commerciale à plusieurs milliards de dollars, où chaque annonce peut faire trembler les marchés, les prochains mois seront cruciaux. Pour les entreprises, les investisseurs et les consommateurs, l’incertitude reste totale. Explications


Un sursis à 190 milliards de dollars
Vendredi 12 avril, l'administration Trump a annoncé que les smartphones, ordinateurs portables, tablettes et équipements électroniques — représentant environ 190 milliards de dollars d’importations annuelles — seraient exemptés des nouveaux tarifs douaniers imposés à la Chine. Cette décision, inattendue, vise à éviter une envolée des prix pour les consommateurs américains, tout en ménageant des entreprises comme Apple, qui assemble plus de 90 % de ses iPhones en Chine. L’exemption inclut aussi des composants-clés comme les puces et écrans LCD, stratégiques pour l’industrie technologique. Malgré cette exemption, le secrétaire au Commerce, Howard Lutnick, a prévenu que les produits concernés pourraient faire l’objet de "tarifs spécifiques" d’ici un à deux mois. Les nouvelles taxes, qui couvrent déjà plus de 300 milliards de dollars d’importations chinoises, font planer une forte incertitude sur le secteur tech.
Pékin : un "petit pas" insuffisant
Le 13 avril, le gouvernement chinois a qualifié l'exemption américaine de "petit pas" vers la résolution du conflit commercial, tout en appelant Washington à reconnaître l'"erreur" des hausses tarifaires et à les supprimer totalement. Pékin a souligné que ces mesures ont perturbé l'économie mondiale et affecté négativement les entreprises et les citoyens des deux pays. A ce stade la Chine a confirmé ses droits de douane sur une large gamme de produits américains, certains jusqu’à 125 %. Elle a également inscrit environ 60 entreprises américaines — dont des acteurs de la tech et de la finance — sur une liste de surveillance, limitant leur accès au marché chinois. Pékin appelle désormais à une mobilisation internationale contre le "chantage économique" des États-Unis, tout en augmentant ses achats auprès d'autres partenaires comme le Brésil et la Russie pour compenser. Malgré ces tensions, la Chine a exprimé sa volonté de reprendre le dialogue avec les États-Unis, à condition que celui-ci soit basé sur le respect mutuel et l'égalité.
Le rappel à l'ordre des marchés financiers
Si Donald Trump justifie sa politique de barrières douanières par la nécessité de renforcer l’industrie nationale et de rééquilibrer une balance commerciale déficitaire — 382 milliards de dollars en 2024 avec la Chine, chaque tranche de 10 % de nouveaux droits de douane pourrait coûter jusqu'à 0,3 point de PIB aux États-Unis, selon la Banque Centrale. En outre, la relocalisation industrielle prônée par la Maison-Blanche reste largement théorique à court terme. Le point de rupture a semble-t-il été atteint le 9 avril quand les taux d'intérêt à dix ans aux Etats-Unis se sont envolés, atteignant 4,5%, marquant clairement la méfiance des marchés financiers pour la stratégie américaine. Une pause globale de 90 jour dans les droits de douanes bonifiés a aussitôt été annoncée par la Maison Blanche pour tous les pays sauf la Chine. Aujourd’hui l’exemption temporaire sur les produits électroniques agit comme un amortisseur politique et économique supplémentaire, mais ne règle pas la crise de confiance.
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