Avec l'ouverture d'une première boutique en août 2024 à Madrid, la marque Avril, dont le leitmotiv est de démocratiser et rendre accessible à tous les produits cosmétiques bio, à de grandes ambitions de développement sur la péninsule Ibérique. Mais le succès de l'enseigne passe par le bouche-à-oreille : avec zéro budget pub et un modèle qui élimine tous les frais superflus au profit du prix de vente le plus bas du marché, Avril compte sur sa capacité à fidéliser la clientèle et jouer sur les recommandations des acheteurs.


Cela fait plus d'une décennie que les Français ont découvert le concept et démontré leur attachement à un modèle qui allie la qualité aux petits prix, et fait in fine valoir l'achat malin. Au sud des Pyrénées, 15% de la clientèle est déjà constituée de compatriotes, observent Arnaud Decoster et Karine Goasguen, respectivement DG de la filiale espagnole et directrice de magasin. Le duo multiplie les initiatives pour attirer le public tricolore dans sa boutique et ainsi s'appuyer sur son rôle de prescripteur auprès des Espagnols.
Avril, un modèle qui allie la qualité aux petits prix
"Elles font un travail formidable", lâche admiratif Arnaud Decoster à propos de ses trois employées. Sous la houlette de Karine Goasguen, la directrice du magasin, les conseillères de vente Maria et Estela ont dû s'imprégner de la culture et de l'identité de la marque Avril, avec pour mission de décrypter un concept encore peu valorisé par les Espagnols -le bio- et s'assurer que les clientes repartent de la boutique satisfaites... et dans la mesure du possible, le panier bien garni. De fait, six mois après l'ouverture du magasin situé au 21 de la calle Conde de Peñalver, à quelques encablures du métro Goya, l'équipe est plus soudée que jamais. Les vendeuses se sont même mises à la langue de Molière ! "On part de rien, on a tout à inventer pour grandir, c'est extrêmement motivant", exprime à ce propos Karine Goasguen. La directrice de magasin sait qu'en ces débuts, la réussite tient à deux éléments essentiels : son inventivité à l'heure de faire connaître la boutique et la motivation de ses équipes.
De plus en plus d'hommes prennent conscience de l'importance de s'occuper de leur peau
À cet égard, les fêtes de fin d'année se sont avérées "incroyables" et les Espagnols n'ont pas démenti leur réputation dépensière pour Noël et pour les Rois Mages. Karine et ses équipes ont en parallèle multiplié les initiatives, avec des présences dans les pop-up stores, sur la Semaine française ou dans les marchés de Noël des lycées français. "On propose tous les samedis des ateliers gratuits", détaille-t-elle encore, "du yoga facial au rituel de maquillage, en passant par les soins masculins". Et de préciser : "De plus en plus d'hommes prennent conscience de l'importance de s'occuper de leur peau". Avec le 19 mars la Fête des pères dans le viseur, Karine entend agrandir la capacité d'accueil sur ces ateliers ("On travaille actuellement sur liste d'attente", confie-t-elle), au cours desquels elle ne manque pas de glisser quelques conseils de naturopathie et de réflexologie -ces deux autres passions.
Ce magasin, c'est aussi un peu mon bébé
Voilà désormais plus de 20 ans que cette Bretonne a posé ses valises en Espagne et sa rencontre avec le Lillois Arnaud Decoster, a constitué un "match" professionnel digne des meilleurs applications de rencontre. "Je cherchais une personne qui porte la double culture française et espagnole", se rappelle le responsable de la filiale, "et qui soit passionnée par nos métiers, avec une sérieuse expérience en direction de magasin". La pépite rare, donc. Avec deux décennies passés au sein du groupe Accor, une reconversion dans la réflexologie et plusieurs années à la direction d'une grande herboristerie de Madrid, le challenge a tout de suite interpellé Karine Goasguen. Depuis, l'un et l'autre travaillent coude à coude dans une ambiance qui mêle esprit start-up et expérience retail. "J'adore transformer un conseil en une vente, j'ai cet esprit commercial bien ancré", sourit Karine. Et d'ajouter : "Je me donne à fond, ce magasin, c'est aussi un peu mon bébé".

Une cliente constante, mais pas forcément fidèle
On l'a compris, l'atout d'Avril c'est — outre la qualité des produits et la certification bio – son prix. Pas de pub, pas de stocks, pas de frais inutiles, tout au service d'un tarif ultra compétitif. À l'instar des meilleures ventes de la boutique : le baume démaquillant au beurre de karité, la mousse nettoyante d'hamamélis, l'exfoliant au sucre de betterave et marc de pomme ou le lait corporel de karité à l'aloe vera sont autant de produits qui ne dépassent pas les 12€ l'unité. Le panier moyen, lui, est de 23€, sensiblement plus que la moyenne en France. "Une cliente qui rentre, c'est généralement une cliente qui repart avec un ou plusieurs achats", confirme Arnaud Decoster. "On a un taux de retour en magasin assez exceptionnel", rebondit Karine Goasguen. Pourtant, si "la cliente espagnole est très constante et plus coquette que la Française", comme l'observe le duo, elle ne se caractérise malheureusement pas forcément pour sa fidélité. "Il n'est pas étonnant qu'une Espagnole ait 5 ou 6 parfums dans sa salle de bain, alors que la Française en a maximum deux, un pour l'été, l'autre pour l'hiver", illustre Karine.
On a un véritable travail de pédagogie à réaliser
Autre différence, et pas des moindres : l'appétence pour les produits bio est beaucoup moins développée au sud des Pyrénées que dans l'Hexagone. "Notre message, c'est qu'il faut apprendre à utiliser des produits de qualité, naturels, qui sont bien meilleurs pour le corps et la peau. On a un véritable travail de pédagogie à réaliser", analyse Arnaud Decoster. "Aujourd'hui, les Espagnols franchissent le pas de porte avant tout pour nos prix, le fait que ce soit bio, c'est un plus, mais ce n'est généralement pas l'argument de base". Et d'ajouter : "Notre mission est de les convertir au bio car nous savons que c'est meilleur pour leur peau, leurs corps et leurs cheveux".

On attend les Français nombreux à venir nous visiter
Avec un modèle commercial passant par 5% des ventes sur Internet, 35% via des distributeurs et 60% en boutique, Avril s'appuie aussi sur un réseau de revendeurs qui va croissant en Espagne, avec des accords déjà en marche dans des grandes chaînes nationales. "L'objectif est d'ouvrir une vingtaine de magasins sur la péninsule Ibérique", affirme Arnaud Decoster, qui garde un œil particulièrement intéressé vers la Catalogne, "plus sensible à la culture bio". "De toutes façons, on va avancer prudemment et en fonction des opportunités de marché", explique-t-il. "Notre concept nous contraint à énormément maîtriser le coût des loyers". À l'instar de la boutique de la calle Conde de Peñalver : située à 3 minutes à pied du croisement entre la calle Alcala et la calle Goya, elle est tout juste en retrait des axes les plus coûteux : "200 mètres plus bas, les loyers explosent", constate le DG. Qui rebondit : "On attend les Français nombreux à venir nous visiter ici : ils connaissent notre marque et nos produits et savent qu'ils peuvent compter sur le meilleur accueil chez nous".
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