Alors que l’on connaît l'héritage indien de ville comme Saint Malo ou Lorient via l’histoire de la Compagnie maritime des Indes ou du commerce des épices, c’est de la ville de Morlaix que l’association AADI fait perdurer les liens anciens et oubliés de la Bretagne avec le sous continent. S’appuyant sur la figure tutélaire de Dupleix, AADI, résolument ancrée dans le XXIème siècle, favorise les échanges et une meilleure connaissance réciproque via le festival Armor India, des voyages scolaires et des partenariats.
La vocation indienne de Jean Claude Breton
Si elle repose sur une équipe de bénévoles et un tissu de partenaires institutionnels, l’association AADI (Alliance Armor Dupleix Inde) repose avant tout sur l'histoire et le travail d’un homme, le bien nommé Jean-Claude Breton. D’un goût pour l’Inde qu’il a d’abord assouvi par de nombreux voyages avec son épouse, ce cadre de chez Total a eu l'opportunité d’aller y vivre dans les années 90, quand l’Inde s’ouvre au commerce mondial. Il y passera huit années et plongera profondément dans la culture indienne, ses codes, ses mutations... Il y nouera également de nombreuses relations, politiques, économiques et culturelles. Le répertoire de M. Breton ferait saliver plus d’un diplomate sur place.
Et au milieu de cette exploration, Jean-Claude croise ce qui lui donnera l’inspiration d’AADI : un tableau. Alors qu’il est invité à dîner dans la cabine du capitaine sur la frégate Dupleix en escale à Bombay, Jean-Claude admire une large toile qui montre un bateau partant d’un bras de mer et lit sa légende : Dupleix partant pour les Indes de Morlaix. Ayant passé toute son enfance dans les environs, il n’avait aucune idée que ses deux terres de cœur étaient liées !
Le passé morlaisien de Dupleix
Jean-Claude Breton entame alors ses recherches et retrouve la trace de Joseph François Dupleix dans le Finistère. En effet, le futur Gouverneur de Pondichéry, commandant général des établissements français en Inde et fervent défenseur de la présence française contre les Britanniques (qui aura laissé sa trace par son adaptation aux coutumes locales), a passé son enfance et une partie de son adolescence à Morlaix. Son père qui travaillait pour la Compagnie française des Indes avait été placé à la tête de la Manufacture des tabacs, fleuron de la dynamique économique locale d’alors. Jean-Claude identifie également le manoir où il a grandi sur les hauteurs de la ville, aujourd’hui racheté par un membre de la Société archéologique du Finistère qui entend bien mettre en valeur son histoire.
L'ingénieur-négociateur voit un signe dans ce lien inattendu et quelques années plus tard, une fois fini son travail avec Total et de retour en Bretagne, il entame son projet de coopération culturelle entre les deux territoires et AADI naît en 2005.
Inde et Bretagne : mieux se connaître et s’enrichir mutuellement
Forte de son ancrage historique, l'ambition de l'association est en revanche tout à fait moderne. AADI veut s'adresser à l’Inde et à la France du XXIème siècle. Au-delà des clichés et appréhensions sur le mysticisme ou la pauvreté, elle veut montrer que l’Inde, si jeune dans sa pyramide des âges et bientôt le pays le plus peuplé au monde, est aujourd’hui le creuset de mutations profondes. Une part non négligeable du futur de la planète s’y joue.
Jean-Claude Breton veut aussi faire connaître les cultures de l'Inde, dans leurs multiplicités, leurs richesses et leurs complexités. Parallèlement, une région comme la Bretagne ne peut qu'être enrichie de liens avec cette grande puissance économique, souvent plus attirée par l’Angleterre, les Etats Unis ou d’autres pays européens.
Le festival Armor India
Créé en 2007, le festival fait venir chaque année des artistes indiens dans la ville de Morlaix et devient rapidement un des événements culturels majeurs de la ville. Danse, performance, films, expositions et Street art, certains des invités sont souvent très connus en Inde. Le festival est d’ailleurs traditionnellement inauguré par l’ambassadeur d’Inde en France.
On peut aujourd’hui encore voir dans la Manufacture une grande fresque réalisée par le talentueux street-artiste Harshvardhan Kadam de Pune qui a repris les motifs du bâtiment mélangé avec celui d’un palanquin sur un éléphant.
Des échanges scolaires
En plus du rayonnement culturel, l’association croit profondément en la coopération et, fidèle à sa perspective tournée vers l’avenir, elle travaille avec la jeunesse. Depuis 2015, AADI a participé à créer des partenariats entre des lycées bretons et des établissements très prestigieux de grandes villes indiennes : Delhi, Mumbai, Pune, Kolkata… Chaque année, ils accompagnent les enseignants pour créer des échanges : plus de 1,500 étudiants sont partis en échange dans leur famille réciproque. Des expériences qui sont bien sûr profondément marquantes : les jeunes sont unanimement élogieux. Des étudiantes indiennes sont ensuite revenues en assistante de langue dans la région, des lycéens choisissent ensuite l’Inde pour faire leur stage, etc.
Autant de graines qui peuvent donner naissance à de futurs partenariats tangibles.
Jean-Claude Breton a d’autres projets qu’il couve depuis longtemps, comme créer un consortium entre établissements.... AADI accompagne aussi des entreprises dans une meilleure compréhension de l’Inde. Il souhaiterait aller plus loin autour d’une plus grande collaboration avec les autres acteurs institutionnels et économiques, régionaux et nationaux,
Malheureusement, les deux dernières éditions du festival Armor India ont été annulées à cause de la pandémie, sans parler des échanges scolaires qui ont bien sûr été mis à l'arrêt, même si des rencontres virtuelles ont été organisées.
Jean-Claude Breton n’est cependant pas homme à s'en tenir là et l’association débute en ce moment la première édition de son incubateur culturel, un programme réalisé par les jeunes pour les jeunes pour pallier l'immobilité forcée due à la pandémie ! Nous vous en dirons plus dans un prochain article.
La Bretagne n’a pas fini de dire Namaste.