Édition internationale

Le Royaume-Uni peut-il tirer profit de la guerre commerciale de Donald Trump ?

Face à l’intensification de la guerre commerciale provoquée par l’instauration de nouveaux droits de douane américains le 2 avril 2025 par Donald Trump, le Royaume-Uni, sous la direction de Keir Starmer, tente de transformer la crise en opportunité. En débloquant 20 milliards de livres pour soutenir ses exportateurs via UK Export Finance, Londres espère rediriger son commerce vers des marchés alternatifs, notamment en Afrique, en Asie et en Europe de l’Est. Mais cette stratégie peut-elle vraiment profiter au pays ?

Keir Starmer et Donald TrumpKeir Starmer et Donald Trump
Keir Starmer et Donald Trump, au cœur des tensions commerciales. Londres cherche à se réorienter face aux nouveaux tarifs imposés par Washington.
Écrit par Morat Alizée
Publié le 22 avril 2025

Le 2 avril 2025, Donald Trump a relancé la guerre commerciale en imposant de nouveaux droits de douane : 10 % sur la majorité des importations britanniques et jusqu’à 20 % sur les produits européens. Cette décision bouleverse les équilibres commerciaux mondiaux. Le Royaume-Uni, pris entre ses liens historiques avec Washington et la nécessité de préserver ses échanges avec l’Union européenne, se retrouve dans une position stratégique complexe. Pour éviter une dépendance excessive à des partenaires instables, Londres amorce une diversification de ses relations économiques.

 

La dépendance du Royaume-Uni à ses partenaires historiques

Le Royaume-Uni reste fortement dépendant de ses exportations vers les États-Unis et l’Union européenne. Selon l’Office for National Statistics, les chiffres du commerce extérieur en janvier 2025 confirment cette interdépendance : les importations en provenance de l’UE se sont élevées à 29.8 milliards de livres (environ 34,9 milliards d’euros), tandis que les exportations vers l’UE atteignent 15 milliards de livres (environ 17,6 milliards d’euros). En comparaison, les exportations vers les États-Unis s’élèvent à 5.9 milliards de livres (environ 6,9 milliards d’euros), bien que les importations en provenance des États-Unis s'élèvent à 8.7 milliards de livres (environ 10,2 milliards d’euros).

Une aide versée pour la diversification des marchés commerciaux

Face à la guerre commerciale déclenchée par Donald Trump, le Royaume-Uni cherche à redessiner sa stratégie commerciale pour limiter sa vulnérabilité et saisir de nouvelles opportunités. Sous la direction de Keir Starmer, le gouvernement a débloqué un soutien massif via UK Export Finance (UKEF), qui atteint désormais 80 milliards de livres (environ 93,6 milliards d’euros), dont 20 milliards (environ 23,4 milliards d’euros) annoncés le 12 avril 2025. Cette aide vise en priorité les secteurs les plus touchés par les nouveaux droits de douane américains: 25 % sur l’acier, l’aluminium et les voitures, et 10 % sur la majorité des autres produits britanniques. Jusqu’à 10 milliards de livres (environ 11,7 milliards d’euros) seront spécifiquement alloués à ces industries stratégiques. Parallèlement, le Royaume-Uni s’efforce d’ouvrir de nouveaux débouchés commerciaux, notamment en Afrique, en Asie et en Europe de l’Est, dans des domaines comme l’énergie renouvelable ou les infrastructures numériques. L’adhésion au Partenariat Transpacifique (CPTPP) en décembre 2024 vient également renforcer cette dynamique en Asie-Pacifique, en créant des opportunités dans des secteurs tels que les services financiers, l’agriculture ou les énergies propres. Cette approche, mêlant soutien économique ciblé et diversification géographique, vise à transformer une situation de crise en levier de repositionnement stratégique sur l’échiquier mondial.

“Cette guerre commerciale n’est dans l’intérêt de personne ”

Des réactions similaires entre Emmanuel Macron et Keir Starmer

Emmanuel Macron et Keir Starmer ont adopté des positions similaires face à la montée des tensions commerciales avec les États-Unis. Selon un article du Monde, les deux dirigeants considèrent que cette guerre commerciale n’est « dans l’intérêt de personne ». Le Président français a mis en garde contre une détérioration des équilibres économiques mondiaux et a appelé à la retenue et au dialogue diplomatique.

Keir Starmer a, de son côté, alerté sur les conséquences immédiates pour l’industrie britannique. Il a affirmé que les nouvelles taxes pouvaient compromettre la compétitivité du pays. Tous deux prônent une réponse stratégique fondée sur la coopération internationale, sans exclure l’adoption de mesures ciblées pour protéger leurs économies respectives. Cette convergence illustre la volonté de préserver les intérêts européens tout en maintenant un canal de communication ouvert avec Washington.

Quel avenir pour le Royaume-Uni dans le jeu mondial ?

La question clé est désormais de savoir si cette stratégie peut réellement profiter au Royaume-Uni. Pour Keir Starmer, la réponse semble se situer dans une position de vigilance stratégique, il privilégie une approche neutre et prudente. Cette position pourrait permettre au Royaume-Uni de naviguer sans se laisser piéger dans les zones tarifaires concurrentes entre les États-Unis et la Chine, tout en préservant ses relations avec l’Union européenne et ses autres partenaires commerciaux, comme la Chine. En évitant des décisions radicales et en cherchant à diversifier ses relations économiques, le Royaume-Uni pourrait se positionner pour tirer profit des opportunités à long terme sans se retrouver marginalisé dans l’économie mondiale.