Le projet de décret sur les personnels détachés auprès de l’AEFE mobilise les syndicats des acteurs de l’enseignement français à l’étranger. Après une grève le 19 mai dernier, Jérôme Nassoy de SNES-FSU secteur hors de France revient avec nous sur les craintes pour les recrutements pour les postes vacants pour la rentrée 2022.
Force est de constater que la volonté de l'AEFE de publier un nouveau décret dans l'urgence est un échec
Quelles sont vos craintes pour la rentrée 2022 ?
Dès le mois de février, le SNES-FSU avait plaidé pour que l'AEFE prenne le temps de la ré-écriture du décret cadrant la situation administrative des personnels détachés auprès de l'opérateur public, au lieu de tabler sur la publication en urgence d'un nouveau décret dans l'espoir - illusoire selon nous - de pouvoir recruter des personnels en détachement sur les 340 postes qui restent à pourvoir dans le réseau pour la rentrée 2022. L'AEFE n'a pas fait ce choix et a présenté en mars un projet de décret. Début mai, nous apprenons que ce projet de décret a été retoqué par le Ministère de l'Éducation nationale et par la Fonction publique (DGAFP - Direction générale de l'administration et de la Fonction publique) ! Les modifications qu'entendent imposer les ministères entraîneraient non seulement des reculs très importants par rapport au projet de décret qui avait été présenté en mars après discussions en groupe de travail, mais constitueraient des attaques sans précédent contre des dispositifs historiques, allant jusqu'à supprimer la consultation des Commissions consultatives paritaires (CCPL et CCPC) pour le recrutement des personnels détachés. Cette nouvelle mouture du projet de décret a été rejetée à l'unanimité par les organisations syndicales représentatives, au Comité technique extraordinaire du 6 mai, puis de nouveau au Comité technique extraordinaire du 19 mai.
Force est de constater que la volonté de l'AEFE de publier un nouveau décret dans l'urgence est un échec. Aucun décret n'est publié à ce jour, l'AEFE ne peut donc pas procéder au recrutement de personnels détachés sur les 340 postes restant à pourvoir pour la rentrée 2022. Les établissements doivent donc procéder à des recrutements en contrat local, alors que les viviers sont insuffisants voire inexistants dans certaines zones, et le caractère tardif de cette décision risque fort d'accentuer les difficultés de recrutement. De plus, le salaire des personnels de droit local étant totalement à la charge des établissements (contrairement à celui des personnels détachés), cela risque de poser des problèmes budgétaires dans certains établissements.
Le SNES-FSU craint donc deux choses.
-Nous craignons d'une part qu'un certain nombre d'établissements ne parviennent pas à pourvoir les postes vacants pour la rentrée 2022.
- Nous craignons d'autre part que les différents ministères passent en force et publient le nouveau décret cadrant la situation administrative des personnels détachés dans sa version qui est unanimement rejetée par les organisations syndicales représentatives, au lieu de laisser le temps à de nouvelles discussions pour parvenir à un texte acceptable.
Quelles sont les remontées des personnels sur le terrain ?
Les personnels expriment les mêmes craintes sur le terrain : dans de nombreux établissements ils craignent que les postes restant à pourvoir ne trouvent pas preneurs en contrat local.
Ils sont aussi profondément opposés à la nouvelle version du projet de décret que les ministères entendent imposer pour le nouveau cadre juridique des personnels détachés, synonyme de régressions majeures.
Etes-vous satisfait de la mobilisation lors de cette grève ?
Oui, la mobilisation le 19 mai a été forte dans de nombreux établissements du réseau AEFE, si de nombreuses zones étaient en période d'examens ou de correction des épreuves de spécialité du baccalauréat. Vous trouverez les chiffres remontés par nos sections sur le site du SNES-FSU hors de France pour le 2nd degré (secondaire) et sur le site du SNUipp-FSU hors de France pour le 1er degré (primaire).
Est-ce que l'AEFE vous a entendus ?
Pas véritablement, dans la mesure où, plutôt que de plaider auprès de sa tutelle pour que le projet de décret soit mis en suspens et que les discussions reprennent, elle a soumis de nouveau au Comité technique du 19 mai les mêmes projets de textes qui avaient été unanimement rejetés au Comité technique du 6 mai.
Concernant les difficultés de recrutement en contrat local pour la rentrée 2022, l'AEFE a toutefois assuré en Comité technique qu’un dialogue est établi avec les établissements et qu'ils pourraient bénéficier d’une aide financière dans le cadre de l’enveloppe budgétaire globale de l’AEFE. Le SNES-FSU espère que cela pourra aider les établissements à faire face au coût budgétaire engendré par le recrutement de personnels en contrat local.
Nous sommes aussi très attentifs à la préparation de la rentrée 2022 dans les établissements
Quelles sont les prochaines actions envisagées ?
Cela dépendra notamment des suites données au nouveau projet de décret sur les personnels détachés auprès de l'AEFE ; si la version unanimement rejetée par les organisations syndicales représentatives venait à être publiée, les personnels ne manqueraient pas de se mobiliser de nouveau, tant les conséquences seraient graves pour certains de leurs droits et, au-delà, pour le fonctionnement même du réseau de l'opérateur public AEFE.
Nous sommes aussi très attentifs à la préparation de la rentrée 2022 dans les établissements et aux campagnes de recrutement en cours pour les postes qui restent à pourvoir. Localement, cela donne lieu par endroits à des interventions syndicales de nos représentantes et représentants SNES-FSU, dans l'objectif de pourvoir les postes et d'organiser au mieux la rentrée.