L’immobilier espagnol s’emballe. En dix ans, le prix moyen d’un logement a bondi de 54 %, atteignant près de 200.000 euros pour 80 m². De Palma à Madrid, en passant par Valencia et Malaga, les hausses à deux chiffres se généralisent, ravivant le souvenir de la bulle de 2007.


En Espagne, les prix de la pierre jouent les funambules. Vingt ans après l’explosion de la bulle immobilière, le marché flirte à nouveau avec les sommets. En 2015, acquérir un appartement de 80 m² coûtait en moyenne 129.420 euros, rappelle le portail immobilier Fotocasa. Dix ans plus tard, ce même bien avoisine les 200.000 euros, soit une envolée de 54 % !
Selon l’analyse “Variación acumulativa de la vivienda en España en 2025”, publiée par Adevinta, le prix moyen du mètre carré atteint désormais 2.489 euros. C’est 1 % de plus qu’en 2005, à l’apogée de la dernière bulle.
Retour vers 2007
- 2005 : 2.464 €/m² (au début de la bulle)
- 2008 : éclatement de la bulle, effondrement des prix
- 2015 : creux du marché, 129.420 € pour un 80 m²
- 2025 : retour à 2.489 €/m²… soit le même niveau qu’avant la crise.
'Nous sommes revenus à un niveau de prix similaire à celui de 2007', avertit María Matos, porte-parole de Fotocasa.
Une hausse des prix qui s’accélère depuis 2020 en Espagne

Alex P, Pexels. / Depuis 2020, la hausse des prix de l'immobilier en Espagne est vertigineuse.
Si la tendance s’est dessinée sur une décennie, la véritable poussée s’est produite récemment. Depuis 2020, les prix ont grimpé de 35 %, dont 10 % sur la seule dernière année. Et le phénomène n’épargne presque aucun territoire.
L’explication est en partie structurelle : la construction de logements sociaux s’est effondrée depuis 2013, alors que la demande, elle, n’a cessé de croître, dopée par la reprise économique et l’attractivité des grandes villes. Résultat : un déséquilibre persistant entre l’offre et la demande, aggravé depuis la pandémie.
Quelles sont les villes les plus chères pour acheter un logement en Espagne ?
Baléares, Canaries, Madrid : la flambée
Si la hausse des prix touche l’ensemble du territoire espagnol, elle ne se manifeste pas partout avec la même intensité. Trois régions en particulier concentrent les plus fortes augmentations de ces dix dernières années : les îles Baléares, avec un bond spectaculaire de +176 %, suivies des Canaries (+121 %) et de la communauté de Madrid, qui affiche une hausse de +106 %.
Ce trio de tête illustre une double dynamique : d’un côté, la forte attractivité touristique et résidentielle des archipels méditerranéen et atlantique ; de l’autre, le poids économique et démographique de la capitale. Dans ces territoires, la demande explose, mais l’offre peine à suivre, provoquant une pression constante sur les prix.
À l’inverse, certaines régions intérieures affichent une évolution bien plus modérée, comme la Castille-La Manche (+8,5 %), l’Estrémadure (+9 %) ou la Castille-et-León (+8,8 %). Moins exposées à la tension démographique ou touristique, elles témoignent d’un marché plus stable, voire stagnant.
Quelles sont les communes près de Madrid où le mètre carré est le moins cher ?
Sur le temps long, les écarts restent tout aussi saisissants. En 2025, les prix sont toujours inférieurs à ceux de 2005 dans des régions comme l’Aragon, la Castille-La Manche ou La Rioja. À l’inverse, les Baléares (+139 %), les Canaries (+60 %) et Madrid (+34 %) ont nettement dépassé leurs niveaux d’avant-crise et se taillent une place parmi les zones les plus spéculatives du pays.
Palma, Malaga, Valencia… des capitales à prix d’or
À l’échelle des capitales de province, le constat est tout aussi marquant : la quasi-totalité des grandes villes espagnoles a vu ses prix grimper, à l’exception de Zamora, où les prix ont reculé de 4 % depuis 2015.
En tête de ce classement :
- Palma de Majorque, avec une explosion de +173 % en dix ans,
- Malaga, qui suit de près avec +153 %,
- Madrid, où les prix ont augmenté de +119 %,
- Valence, également au-dessus des 100 %, avec +103 %.
Ces villes partagent des caractéristiques communes : forte attractivité économique, dynamisme démographique, rayonnement touristique ou culturel, et rareté du foncier disponible. Elles concentrent les investissements et les nouveaux arrivants — ce qui accentue encore la pression sur le marché.
À l’autre bout de l’échelle, notons que certaines villes moyennes ont connu des hausses plus modérées : Ourense (+13 %), Ávila (+8 %), Palencia (+7 %) ou encore Jaén (+4 %).
Vers une nouvelle bulle immobilière ?
La progression annuelle des prix, estimée à 10,2 %, suscite des inquiétudes. Si cette cadence se maintient, les cinq prochaines années pourraient connaître une envolée deux fois plus rapide que celle observée entre 2015 et 2025. De quoi raviver les spectres de la bulle immobilière des années 2000…
Pour María Matos, directrice des études chez Fotocasa, la priorité est claire : agir sur l’offre. “Il est urgent de rééquilibrer le marché, notamment en relançant la construction de logements accessibles.” Dans un pays où 76 % des ménages sont propriétaires, voir l’accès à la propriété devenir un privilège réservé à une élite poserait une sérieuse question de société.
Car l’Espagne ne manque ni de soleil ni de demande, mais bien de mètres carrés à prix humain. Et si la pierre reste un rêve pour certains, elle risque, à ce rythme, de devenir un mirage pour beaucoup.
Sur le même sujet
