Arrivée au Québec en 2008, Sabine Monpierre a découvert les défis invisibles de l’intégration des Antillais français. Entre engagements communautaires et combats identitaires, elle est devenue une voix incontournable. Rencontre.


Des Antilles au Québec, un voyage initiatique
Originaire de Guadeloupe, Sabine Monpierre, a d’abord exercé dans le secteur du tourisme avant de s’établir au Québec avec sa famille. "Nous sommes arrivés avec 11 valises et une douzième invisible, celle qui contenait nos doutes, nos espoirs et nos souvenirs", confie-t-elle. Son arrivée a été marquée par une phase d’adaptation difficile, entre euphorie et questionnements. "J’ai vite compris qu’il ne suffisait pas de parler français pour se sentir pleinement intégré", se souvient-elle.

Un soutien indéfectible de son mari
Son époux, lui aussi originaire de Guadeloupe, a joué un rôle clé dans cette transition. Ayant étudié au Québec dans sa jeunesse, il connaissait déjà certaines réalités locales et a apporté un soutien précieux à sa famille. Pourtant, son propre parcours a été semé d’embûches : alors qu’il poursuivait ses études supérieures, il a dû interrompre son cursus pour accomplir son service militaire français, une obligation qui l’a contraint à mettre en pause ses ambitions académiques et professionnelles. "Cela a été une épreuve, mais il a su rebondir et nous avons construit ensemble notre avenir ici", explique Sabine Monpierre.
Un engagement ancré dans l’expérience
Confrontée aux défis de l’intégration, Sabine Monpierre s’est investie dans le milieu communautaire. "J’ai commencé à travailler avec des nouveaux arrivants allophones, tout en constatant que nous, francophones des Outre-mer, n’avions pas de soutien spécifique." Elle décide alors de retourner aux études en développement communautaire et en droit pour mieux comprendre et défendre les droits des populations vulnérables.
Une femme au service de la reconnaissance francophone
Aujourd’hui, Sabine Monpierre est une voix incontournable pour la reconnaissance des Antillais francophones au Québec. "Notre histoire est méconnue, nos parcours sont trop souvent invisibilisés", explique-t-elle. Grâce à son engagement, elle participe à de nombreux comités et plaide pour une meilleure prise en compte des spécificités des Antillais dans les politiques d’intégration. Son action lui a valu plusieurs distinctions, dont le prix Pour un Québec sans racisme en 2023.

Une transmission essentielle pour ses enfants
Mère de trois enfants, Sabine Monpierre accorde une importance capitale à la transmission de son héritage culturel. "Nous avons toujours veillé à ce qu’ils connaissent leurs racines, leur langue et leur histoire, mais leur intégration ici reste compliquée", explique-t-elle. Son aîné, arrivé à l’âge de 10 ans au Québec, a fait le choix de retourner en Guadeloupe, ressentant un décalage avec la société québécoise. "Il n’a jamais réussi à se sentir pleinement chez lui ici, les hivers étaient trop difficiles physiquement", confie-t-elle. Quant à ses plus jeunes enfants, ils s’interrogent sur leur identité. "L’intégration est un combat permanent, et je vois bien que ce n’est pas aussi simple que certains voudraient le croire."

Un regard tourné vers l’avenir
Après 17 ans au Québec, Sabine Monpierre a trouvé son équilibre, même si elle admet que l’intégration est un processus permanent. "Il m’arrive encore de devoir justifier qui je suis", confie-t-elle. Mais loin de se laisser décourager, elle poursuit son engagement avec détermination. "Si j’avais eu un organisme comme L’Arbre du voyageur à mon arrivée, mon parcours aurait été différent. Aujourd’hui, je veux être cette ressource pour les autres."
L'association Arbre du voyageur : une boussole pour les Antillais au Québec
Une femme, un combat, une inspiration
Sabine Monpierre incarne la résilience et l’engagement. Par son parcours, elle montre qu’au-delà des obstacles, il est possible de se réinventer et de créer du changement. Son histoire est celle d’une femme qui, entre Guadeloupe et Québec, a su bâtir des ponts et offrir une voix à ceux qui en avaient besoin.
Sur le même sujet
