Face aux enjeux environnementaux et à l’évolution des rites funéraires, Guillaume Marcoux a imaginé une alternative novatrice : la Forêt de la Seconde Vie. Ce cimetière écologique, où les défunts reposent sous des arbres plutôt que sous des pierres tombales, allie mémoire et régénération naturelle. Un projet pionnier qui réinvente le rapport à la mort tout en contribuant à la biodiversité et à la lutte contre le changement climatique.


Un ancien terrain de golf métamorphosé en havre naturel
C'est en 2019 que Guillaume Marcoux, alors promoteur immobilier, acquiert un terrain de golf à Sainte-Sophie, dans les Laurentides, à environ une heure de Montréal. "Nous avions un site enchanteur sous les yeux et nous nous sommes interrogés sur la meilleure manière de lui redonner du sens", explique-t-il. Loin des logiques de développement traditionnel, il imagine un espace où la nature et la mémoire humaine coexistent en harmonie. De cette réflexion naît La Forêt de la Seconde Vie, un lieu unique qui conjugue écologie, transmission intergénérationnelle et rituels funéraires repensés.
Un cimetière sans pierres tombales
Exit les traditionnelles allées de pierres grises et l'austérité des cimetières conventionnels. Ici, chaque défunt repose sous un arbre planté en son honneur. "L'idée est simple : s'enraciner dans la terre et permettre à un arbre de croître, en symbole de vie perpétuelle", résume Marcoux. La Forêt de la Seconde Vie propose différents espaces : forêt nourricière, jardins perpétuels ou encore la forêt des baumes, où les essences choisies diffusent parfums et bienfaits. "Nos concessions familiales permettent aux proches de se réunir sous un même arbre, créant un lien tangible entre les générations", ajoute-t-il.
Une distinction avec les forêts existantes transformées en cimetières
Contrairement aux initiatives qui consistent à transformer des forêts existantes en cimetières naturels, La Forêt de la Seconde Vie repose sur la création d’un nouvel écosystème forestier. "Nous ne nous contentons pas d’utiliser une forêt déjà là, nous la faisons naître de toutes pièces. Chaque arbre planté dans la forêt est un élément actif de la régénération de la biodiversité et de la captation du carbone", souligne Marcoux.
Ce modèle présente un double avantage : il permet d'éviter d’altérer des milieux naturels déjà établis et d’assurer un suivi écologique dès le début. "En partant de terrains non boisés, nous avons la possibilité d’adapter les essences d’arbres aux besoins locaux et de structurer une forêt durable qui continuera à croître pendant des générations", ajoute-t-il. L’impact environnemental est donc bien plus fort qu’une simple revalorisation d’un espace déjà forestier.
Un impact positif sur la biodiversité locale
En plus d’offrir un espace de recueillement respectueux de l’environnement, La Forêt de la Seconde Vie joue un rôle clé dans la préservation et le développement de la biodiversité. "Nous avons choisi avec soin les essences d’arbres afin de créer un écosystème propice à la faune et à la flore locales", explique Marcoux.
Les espaces forestiers du site attirent naturellement une grande diversité d’oiseaux, d’insectes et de petits mammifères, contribuant ainsi à la restauration des habitats naturels. "Nous avons constaté l’arrivée de nouvelles espèces d’oiseaux et d’insectes pollinisateurs qui trouvent refuge dans notre forêt en pleine croissance", ajoute-t-il. Cette interaction entre les plantations et la faune locale fait de La Forêt de la Seconde Vie un véritable sanctuaire naturel, où la mémoire des défunts participe activement au renouvellement de la nature.
Une approche écologique et innovante
Loin des pratiques funéraires classiques, la forêt bannit les cercueils en matériaux non biodégradables et privilégie la crémation, accompagnée d’un rituel d’inhumation des cendres au pied d’un arbre. "Nous avons développé une application qui permet aux familles de stocker des souvenirs numériques accessibles uniquement sur place. Cela encourage les proches à revenir, à se reconnecter à la nature et à perpétuer la mémoire des défunts", souligne Marcoux.
L’initiative ne s’arrête pas là. Conscient des enjeux environnementaux, le fondateur milite pour l’adoption de nouvelles pratiques funéraires, notamment la terramation (compostage humain), encore interdite au Québec. "J’ai déposé un mémoire au ministère de l’Environnement pour faire évoluer la réglementation. L’objectif est de permettre des alternatives plus respectueuses des sols et de la biodiversité", confie-t-il.
Une pérennité assurée par des dispositifs multiples
Afin de garantir la préservation du site sur le long terme, La Forêt de la Seconde Vie repose sur plusieurs niveaux de protection. Tout d'abord, une servitude de conservation à perpétuité a été notariée et enregistrée, assurant que les terrains ne pourront jamais être convertis à d'autres usages. Ensuite, un fonds de dotation géré par Philanthropie Laurentides garantit la pérennité du projet en finançant son entretien et sa protection. Enfin, un organisme indépendant, l'Institut des territoires, surveille la conformité et le respect des engagements environnementaux pris par l’initiative. "Nous avons voulu rassurer les familles et leur assurer que leur choix restera intact à travers les générations", explique Marcoux.
Un cimetière pour animaux de compagnie dès cette année
Consciente de l’importance des liens entre les humains et leurs compagnons à quatre pattes, La Forêt de la Seconde Vie s’apprête à ouvrir un espace dédié aux animaux de compagnie. "Nous avons remarqué une forte demande de la part des familles souhaitant que leurs animaux reposent près d’eux, dans un cadre respectueux de la nature", explique Marcoux. Ce cimetière écologique proposera des parcelles où les cendres des animaux seront mélangées à des graines de fleurs sauvages, contribuant ainsi à la biodiversité du site. "Il s’agit d’une manière douce et poétique de rendre hommage à ces compagnons qui ont partagé tant d’années de vie avec nous", ajoute-t-il.
Un modèle appelé à se développer
Face au succès grandissant du projet, avec déjà plusieurs centaines de concessions vendues, Marcoux ambitionne d’implanter de nouvelles Forêts de la Seconde Vie à travers le Québec. "L’industrie funéraire sait que le modèle traditionnel arrive en bout de course. Nous avons eu le courage de créer le cimetière de demain", affirme-t-il. L’idée séduit même au-delà des frontières : des acteurs français du secteur ont déjà manifesté leur intérêt.
Si l’avenir des rites funéraires reste en perpétuelle mutation, La Forêt de la Seconde Vie s’impose comme une réponse pragmatique aux défis contemporains. Un lieu où la mémoire des êtres se fond dans le cycle infini de la nature. Et si demain, nous choisissions de faire pousser une forêt en guise d’adieu ?
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